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Pascal Garnier : Lune captive dans un œil de mort (27/02/2017)

pascal garnierPascal Garnier est un écrivain français né en 1949 à Paris et mort en 2010 à Cornas (Ardèche). Après une vie d'errance et de petits boulots, et un passage éclair par le rock 'n' roll, il  décide à 35 ans de se lancer dans l'écriture. Son œuvre abondante et multiforme comprend des romans noirs comme des ouvrages de littérature d'enfance et de jeunesse. Son roman, Lune captive dans un œil de mort est paru en 2009.

Martial et Odette, retraités, viennent d’emménager dans une résidence du Sud de la France. Ce genre de domaine, clos et sécurisé, destiné aux gens comme eux désireux de « vivre une retraite active au soleil » et ayant les moyens de se l’offrir. La résidence est toute neuve, au point qu’ils en sont les premiers habitants avec le gardien mal aimable à l’entrée. Puis viendront Maxime et Marlène, un couple plus tape-à-l’œil, et enfin Léa une femme seule. Nadine, une employée désinvolte, passe une fois par semaine pour gérer les activités du club-house. Les voisins voisinent, apéro chez l’un et barbecue chez l’autre, tout cela pourrait ressembler à une sorte de petit paradis.

Mais nous sommes chez Pascal Garnier alors s’instille un délicieux frisson car le lecteur sait qu’à un moment ou un autre ça va déraper. Comme toujours avec l’écrivain ça se fait en douceur, presqu’imperceptiblement. Quelques gitans qui s’installent non loin du domaine créent un début d’inquiétude chez nos « braves gens » si honnêtes, puis c’est un incident avec le révolver de Maxime qui manque tuer Martial par inadvertance… Lentement au fil du récit, les caractères des personnages se précisent, les rêves d’hier confrontés à la réalité d’aujourd’hui, les regrets, les chagrins aussi qu’on essaie d’enterrer et d’oublier en s’offrant ce merveilleux décor. Décor factice, décor de carton pâte, qui n’empêchera pas le drame inéluctable où plusieurs ne vivront pas jusqu’à la fin du roman.

J’ai lu quelques romans de l’écrivain et chaque fois c’est le même émerveillement : on s’attaque à un petit bouquin qui ne paye pas de mine, tout en dialogues percutants, touches d’humour discret, et on se trouve pris dans une nasse qui interdit de lâcher le roman avant le mot « fin ». On se régale de la précision chirurgicale de son observation pessimiste du genre humain (« Les gens entre eux, ça s’entrebouffe, ça ne peut pas faire autrement, c’est avide, de haine ou d’amour, du pareil au même »), faite non pas de longues analyses verbeuses mais de petites remarques ou détails qui font mouche à tous les coups. Du grand art pour ce maître de la concision.  

 

« On lui aurait donné le bon Dieu sans confession. Et que j’te souris à tout le monde, et que j’me fais passer pour une pauvre veuve éplorée… Une gouine, oui ! Une sale gouine !... En achetant cette putain de baraque, on avait bien insisté sur la moralité du voisinage, pas d’étrangers trop étranges, pas de chiens, pas de chats, pas d’enfants ou de petits-enfants plus de quinze jours d’affilée, pas de… Si on laissait les gouines, pourquoi pas les pédés ?... Il allait leur écrire au syndic, leur montrer qui il était ! »

 

 

pascal garnierPascal Garnier  Lune captive dans un œil de mort  Zulma  - 157 pages –

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