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Sandrine Collette : Six fourmis blanches (19/11/2018)

sandrine colletteSandrine Collette, née en 1970 à Paris est une romancière française. Passé un bac littéraire puis un master en philosophie et un doctorat en science politique, elle devient chargée de cours à l'université de Nanterre tout en travaillant à mi-temps comme consultante dans un bureau de conseil en ressources humaines. Ce roman, Six fourmis blanches, date de 2015 et j’ai bien cru ne jamais pouvoir le lire, tant la file d’attente était longue à la médiathèque de ma ville.

Un petit groupe de six touristes s’est lancé dans un trek de quelques jours dans les montagnes d’Albanie, sous la conduite de Vigan, un guide local. Surpris par une tempête de neige imprévue, l’expédition tourne au cauchemar après un premier mort. Dans ces mêmes montagnes, Mathias, sorte de chaman chargé par les populations d’éloigner les mauvais esprits en sacrifiant des chèvres lors de cérémonies ancestrales, fuit les hommes de main d’un nommé Carche, un vieux caïd de la vallée cherchant à se venger de la mort d’un de ses jeunes parents dont il tient le sacrificateur pour responsable.

Deux histoires contées par deux voix en chapitres alternés : celle de Mathias et celle de Lou, l’une des touristes, et bien entendu ces deux histoires finiront par se croiser pour n’en plus faire qu’une. Le début du roman, avec le personnage de Mathias, crée une ambiance légèrement mystérieuse faite de superstitions et croyances des temps anciens avec des sacrifices d’animaux pour conjurer le mauvais sort et favoriser l’avenir des mariés ou des nouveaux nés, ces grandes événements de la vie. De leur côté nos randonneurs amateurs paraissent bien guillerets à ce point du récit et le lecteur attend que ça dégénère, sans savoir encore d’où viendra le coup.

C’est la nature dans toute sa puissance sauvage qui frappe. Et là nous pouvons féliciter l’écrivain qui sait bien rendre la fatigue des marcheurs, dans un premier temps,  qui est souvent occultée dans les récits de voyageurs pédestres ; puis quand le vrai danger arrive avec son premier mort, les différents stade de la  détresse et de l’angoisse prennent le lecteur à la gorge. On souffre avec eux. Souffrances physiques suivies de souffrances morales quand des choix cornéliens devront être faits (continuer à marcher ou s’arrêter, abandonner un mourant pour peut-être sauver les autres…), ce genre de cas de conscience qui exacerbent le suspense. Pour Mathias, il est aussi question de survie mais lui n’affronte pas des éléments déchainés, ce sont des hommes qui veulent le tuer. Tous ces fuyards finiront par se regrouper, mutualisant leurs peurs et les périls et comme Sandrine Collette trouve que ce n’est pas assez, elle incorpore à son récit un fameux coup de théâtre qui va rogner les dernières miettes du moral de Lou.

On retrouve dans ce roman les éléments sur lesquels l’auteur s’appuie souvent, l’homme affrontant les éléments déchainés de la nature, les cas de consciences et les choix moraux. C’est écrit d’une plume alerte sans s’éterniser dans des détails superflus, bref c’est un bien bon bouquin.

 

« Vigan se prend la tête entre les mains. Non, pas une bête, c’est pas vrai, c’est pas vrai… Nous l’observons en tremblant, hagards, écoutons autour de nous comme si un danger pouvait nous fondre dessus. L’air s’est chargé de tension, notre peur nous prend à la gorge, féroce, décuplée par l’ignorance. Que s’est-il passé ? Qui a découvert Arielle et a pu la dépouiller, l’abandonner de cette façon, sans compassion, sans respect, sans rien ? Sommes-nous arrivés aux confins de l’univers, où nous aurions dérangé une tribu inconnue ? Je ne sais plus ce que nous devons craindre, être seuls ou non, être suivis ou non, par quoi. Homme ou bête. D’un coup Vigan se relève : - On dégage. Tout de suite. »

 

 

sandrine colletteSandrine Collette   Six fourmis blanches   Denoël – 276 pages –

 

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