Patti Smith : Just Kids
08/10/2012
Il ne s’agit pas d’un nouvel album de Patti Smith mais d’un bouquin. Non pas une autobiographie, mais plutôt le roman de sa vie.
Une vie qui débute le 30 décembre 1946 à Chicago (Etats-Unis) où naît Patricia Lee Smith, d’un père ancien danseur de claquettes et employé de bureau dans une usine, alors sa mère qui a abandonné une carrière de chanteuse de jazz pour élever ses quatre enfants, est serveuse dans un restaurant. À l'adolescence elle se détache de son éducation très religieuse que sa mère, une Témoin de Jéhovah, lui a donnée même si elle en conservera toujours une marque profonde qui ressort parfois au détour de son œuvre, et très tôt se passionne pour les arts, que ce soit la poésie, l’écriture ou le dessin.
Le livre retrace son parcours qui ne peut être dissocié de son mentor Robert Mapplethorpe, amant, meilleur ami et toujours guide artistique, l’homme de sa vie. Car c’est bien lui – Robert - le sujet principal du bouquin, puis Robert et Patti et finalement Patti après son décès tragique.
Le bouquin peut être lu de différentes manières. Une histoire du rock dans les années soixante-dix, avec ses hauts lieux à New York comme le CBGB et le Max’s Kansas City, ses rencontres avec les plus grands musiciens tels Jimi Hendrix, Janis Joplin, Johnny Winter, puis plus tard quand elle se lancera elle-même dans la musique avec la constitution de son groupe et l’enregistrement de son premier single et album. Ou bien encore, sa vie de bohême dans la ville qui ne dort jamais, de St Mark’ place au mythique Chelsea Hotel, de Coney Island à Times Square, nous la suivons les yeux grands ouverts, ébahis de revivre avec un tel guide notre jeunesse enfuie.
Mais il y a aussi les traces de son amour de la littérature et de la poésie et ses propres travaux d’écriture. Ses jobs dans des librairies, les bouquins chinés chez des revendeurs où elle déniche des éditions dédicacées qu’elle peut fourguer pour quelques dollars qui paieront le loyer du loft. Le voyage pèlerinage à Charleville-Mézières pour l’amour de Rimbaud, ses rencontres avec William Burroughs, Grégory Corso, Alan Ginsberg et d’autres.
Tout se mêle et s’emmêle, mais tout s’articule autour de sa rencontre avec Robert Mapplethorpe qui partagera sa vie de longues années et de sa trajectoire artistique à lui. Tous deux pauvres d’argent mais riches d’amour et de foi dans leur destin qui sera artistique ou ne sera pas. Lui deviendra le grand photographe de renommée internationale foudroyé par le Sida, elle l’artiste chanteuse/compositeur/écrivain et militante que tout le monde connaît. Deux biographies dans un seul livre, rien que cela est une affaire.
Le bouquin est magnifique, bien écrit et riche en détails secondaires dépassant une mémoire normale pour atteindre le niveau enviable d’œuvre littéraire sans pour autant trahir la réalité, mais ce qui émeut profondément c’est la fidélité et l’amour qui liaient ces deux artistes, ce qui transpire de chacune des pages de cet ouvrage. Dois-je ajouter que j’en conseille chaudement la lecture avec Horses le premier CD de Patti Smith en bande son.
« J’avais vingt ans quand je suis montée dans le bus. Je portais ma salopette, un col roulé noir, et le vieil imper gris que j’avais acheté à Camden. Ma petite valise écossaise rouge et jaune contenait quelques crayons de couleur, un carnet, les Illuminations, quelques fringues, et des photos de mon frère et de mes sœurs. J’étais superstitieuse. Nous étions un lundi ; j’étais née un lundi. C’était un bon jour pour arriver à New York City. Personne ne m’attendait. Tout m’attendait. »
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