Nicholas Jubber : Sur les traces de Prêtre Jean
14/10/2012
Nicholas Jubber est né en Angleterre, il étudie à l’université d’Oxford, puis part travailler comme enseignant à Jérusalem. Après la première Intifada(1987-1993) il décide de voyager à travers le Proche-Orient et l’Afrique de l’Est, voyage qui le conduit à la rédaction de Sur les traces du Prêtre Jean. Nicholas Jubber écrit régulièrement des articles pour la presse anglophone (The Guardian, The Observer…), ainsi que des pièces de théâtre.
Vers 1177 commence à circuler une lettre en latin qui aurait été envoyé à Manuel Comnème, Empereur de Byzance, par un certain prêtre Jean, l’informant qu’il existe une terre chrétienne au-delà des régions islamiques où se battent les chrétiens pour sauver les Lieux Saints. Ce royaume, dont le Prêtre Jean serait à la tête, est décrit avec tant de fougue et d’emphase « Pour l’or, l’argent, les pierres précieuses, les bêtes de toutes sortes et le nombre de peuples, nous pensons que nous n’avons point d’égal sous les cieux. Il n’y a aucun pauvre chez nous ; nous recevons tous les étrangers et pèlerins ; il ne se trouve point de voleurs ni de bandits en notre royaume, de même que l’adultère et l’avarice n’y ont cours » qu’il va mettre le feu aux esprits.
Le pape Alexandre III écrit une missive au roi des Indes, le fameux Prêtre Jean. Il choisit pour émissaire un moine médecin, maître Philippe. Personne ne sait dans quel Orient mystérieux et mythique se trouve le royaume du Prêtre Jean, ni s’il existe réellement. On fait courir les suppositions les plus folles à son sujet : qu’il est plus riche que tout autre empire, qu’un des fleuves qui le traverse vient du jardin d’Éden, qu’il abrite la fontaine de Jouvence ! Maître Philippe se met en route pour les Indes. Il part de Venise… et disparaît sans laisser de traces.
Quand huit cents ans plus tard, Nicholas Jubber trouve une copie de la lettre du pape dans une bibliothèque de Jérusalem, une idée folle germe dans son cerveau : il va reprendre à son compte la mission de Maître Philippe et porter la missive à son destinataire, c'est-à-dire sur la tombe de Prêtre Jean. En compagnie de son copain Mike, nos deux Indiana Jones au budget serré, vont se lancer dans une quête improbable qui passe par la Turquie, l’Arménie, la Syrie, le Liban, Israël, l’Egypte, le Soudan et enfin l’Ethiopie où Jubber situe le tombeau de Prêtre Jean.
Véritable odyssée, les deux hommes vont connaître les joies et les peines qu’on imagine dans une telle entreprise, les pays traversés ne sont pas tous de tout repos, agités par les problèmes politiques, religieux, tribaux. Les aléas des voyages, transports rudimentaires, repas frugaux, turista, bakchichs, chaleur, pluies diluviennes, se succèdent sans altérer le moral dela troupe. L’épopée n’est pas que géographique, Nicholas Jubber nous replonge dans le contexte de l’époque, les références historiques s’amoncèlent. Histoire, géographie, sociologie, linguistique, artistique, etc. le périple est physique et culturel.
Au terme du pèlerinage, Jubber pourra in extremis – avant l’avion du retour - et à l’insu du religieux gardien des lieux, déposer son manuscrit dans la tombe sans pour autant être dupe « L’Ethiopie n’était sans doute pas le pays du Prêtre Jean ; non parce qu’il aurait pu se trouver ailleurs, mais parce qu’il s’agissait d’un royaume sorti des carnets et de la plume fantaisiste d’un scribe du XIIe siècle. »
Au cours de mes lectures, j’avais déjà maintes fois croisé le personnage de Prêtre Jean qui enflamme facilement les imaginations (voir par exemple dans Baudolino de Umberto Eco), tout comme le Monstre du Loch Ness dans un genre différent ! Mais ici il est au cœur du bouquin et s’embarquer dans cette aventure relève du fantastique, du merveilleux, de l’onirique. Comme le résume un autochtone croisé par nos explorateurs « Le pape a écrit une lettre à quelqu’un qui n’existe pas et l’a confiée à un type dont personne n’a jamais entendu parler et dont personne ne sait s’il en est revenu. » Qu’importe !Que Prêtre Jean ait existé ou non, que les bribes d’informations qui circulent à son sujet nous fassent rêver et qu’un type comme Jubber se soit lancé dans un tel projet, moi ça me fascine littéralement et ce ne sont pas les quelques erreurs historiques signalées par les spécialistes qui changeront quoique ce soit à mon opinion.
« Pour comprendre l’attrait exercé par le Prêtre Jean sur les chrétiens du Moyen Âge, il faut expliquer l’attirance qu’exerçait à l’époquela Terre Sainte.Lefait que ce sol ait été foulé par les pieds de leur messie décuplait les espoirs qu’un rédempteur venu d’Orient puisse combiner les rôles politiques et religieux incarnés par le Christ Roi. Il est difficile d’appréhender cette idéologie dans le monde occidental moderne en mouvement constant, où la terre équivaut à un bien immobilier, et où peu de gens sont capables de situer la maison où habitaient leurs arrière-grands-parents. Le Moyen Orient conserve pourtant certaines notions associées au Moyen Âge. »
Nicholas Jubber Sur les traces de Prêtre Jean Editions Noir sur Blanc
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