Yves Crumeyrolle : Le manteau de la reine
15/11/2012
Avertissement : c’est l’auteur, que je ne connais absolument pas, qui m’a contacté pour me proposer son ouvrage afin que j’en fasse une chronique sur ce blog. Par ce geste, il se jette à l’eau car il s’agit de son premier livre et bien entendu on devine le trac qui taraude un écrivain quand il livre son travail pour la première fois au jugement d’un inconnu.
Yves Crumeyrolle est né en 1948 dans le Cantal. Après des études de philosophie et de techniques en bâtiment, Yves est devenu maître artisan, puis expert en construction. Depuis quelques années, il a commencé à écrire de la poésie et son premier livre, Le manteau de la reine, vient de paraître.
Quand j’ai reçu l’opus, j’ai failli renoncer à ma mission car on ne m’avait pas prévenu qu’il s’agissait de poésies, or c’est un genre littéraire que je n’apprécie pas car je ne le comprends pas. J’ai néanmoins accepté le challenge mais je tenais à le préciser, par honnêteté intellectuelle et pour que vous me lisiez en gardant en mémoire ce paramètre.
L’objet en lui-même est assez réussi, couverture sobre et élégante en cartonnage glacé. A l’intérieur, vingt-huit poèmes accompagnés chacun d’une illustration en couleur, précédés par une préface d’une amie de l’auteur. Il faut absolument lire ce texte d’introduction, car il présente admirablement bien le travail d’Yves Crumeyrolle, désamorçant à la source, critiques et interrogations qui sans lui, ne manqueraient pas de troubler le lecteur.
En exergue à chacun des poèmes, une citation latine donne le ton de la poésie mais plus généralement de l’ensemble, à savoir un recueil particulièrement pointu et savant qu’un empilage de notes en bas de pages viennent expliciter. Notre poète ne manque pas de culture, qu’il se réfère aux mythologies antiques (banal chez les poètes classiques me direz-vous), aux termes dialectaux, aux références philosophiques et particulièrement à Leibniz, aux sciences mathématiques (notre classique devient alors plus moderne) rien ne semble échapper au domaine du savoir de l’auteur, « Chasseur impénitent de l’épithète rare ».
Il y a peut-être là, dans cet étalage de culture trop ostentatoire, un point faible. Je l’ai dit, je ne suis pas un familier de la poésie, pour lire ce livre ma vision s’est donc focalisée sur mes repères connus, c’est à dire les mots. Tous ces termes rares glissés dans un roman m’auraient fait croire que j’étais intelligent car le sens général du texte ne m’aurait pas échappé, mais là, cumuler vocabulaire recherché et idées découlant des sensations poétiques – qui hélas me sont étrangères - voulues par l’auteur, ça fait beaucoup de chausse-trapes pour mon petit cerveau.
Bien que je ne me sente aucune légitimité dans ce domaine, je vous livre néanmoins mes impressions concernant les poèmes proprement dit. Les plus courts m’ont semblé les meilleurs car le poète à tendance à se rengorger de mots, asphyxiant ses vers à la recherche de la rime adéquate au point de paraître parfois, souvent diront d’autres, trop lourd. Il en est de la poésie comme de la cuisine, ce n’est pas la plus riche, la meilleure. Si j’osais un conseil amical à l'auteur, attention à ne pas confondre style et esbroufe.
D’autre part, j’ai été étonné par les sujets abordés, récriminations contre un contrôleur de la SNCF, évocations d’instants professionnels et j’ai cru noter aussi de bien nombreuses allusions au monde judiciaire. Tout cela dit en alexandrins bien entendu.
Pour résumer mon sentiment, ces poésies sont en réalité un acte militant, un manifeste rédigé par un amoureux de la langue française qui n’entend pas s’en laisser compter par le mouvement général d’avilissement de la langue et donc de la pensée. Yves Crumeyrolle mène un combat qui lui tient à cœur, dans ces conditions je ne peux que saluer et souhaiter bonne chance à l’auteur pour son projet littéraire.
Yves Crumeyrolle Le manteau de la reine
Avec des illustrations d’Isabelle Morange et une préface de Claire Michel. Ouvrage édité par l’auteur dont vous trouverez tous les détails, ici sur le site dédié au recueil.
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