P.D. James : Meurtres en blouse blanche
05/04/2015
Phyllis Dorothy James (1920-2014) est une célèbre écrivaine britannique auteur de romans policiers. A vingt et un ans, elle épouse Connor Bantry White, qui sert dans le corps médical de la Royal Army, et dont elle aura deux filles. Malheureusement, son mari revient traumatisé des Indes et jusqu'à sa mort en 1964, il partage sa vie entre les hôpitaux psychiatriques et sa maison. Pour nourrir ses deux filles et assurer la vie quotidienne, P.D. James doit travailler, d'abord employée de bureau à l'hôpital de Paddington, elle suit les cours du soir pour gravir les échelons de l'administration médicale. Par ailleurs, elle souhaite écrire depuis longtemps. Menant tout de front, elle s'attelle alors à la tâche, tous les matins entre six et huit heures. Sa détermination et son intelligence lui permettent d'accéder à un poste de cadre supérieur au ministère de l'Intérieur où elle travaille au département judiciaire (service de la médecine légale), puis occupe la fonction de magistrat jusqu'en 1984 (section juridique de la brigade criminelle), ce qui enrichit sa connaissance du système policier et juridique. Elle est anoblie en 1990 par la reine, qui la fait baronne James of Holland Park. Son premier roman, A visage couvert, paraît en 1962 et son dernier, La mort s'invite à Pemberley, en 2011. Meurtres en blouse blanche, date de 1971.
Il m’aura fallu attendre le décès de P.D. James pour réaliser que je ne l’avais jamais lue ! Il n’est jamais trop tard pour bien faire alors j’ai ouvert ce Meurtres en blouse blanche, considéré comme l’un de ses meilleurs.
L'hôpital John Carpendar, « une bâtisse extraordinaire, énorme édifice victorien en brique rouge crénelé, attestant d’une véritable folie ornementale, et que couronnaient quatre grandes tourelles », abrite plusieurs services, dont une école d'infirmières. Deux sont assassinées successivement en ces murs et vont perturber la vie quotidienne du milieu hospitalier sous la direction de Mary Taylor secondée par trois adjointes. L’enquête est confiée au commissaire Adam Dalgliesh, héros récurrent de quatorze romans de P.D. James.
Comme il s’agit du premier bouquin de l’écrivaine que j’aborde et connaissant sa renommée, j’avoue avoir été surpris car j’ai eu du mal à entrer dans le roman. Le texte est dense, l’écriture très précise en détails et descriptions, je me demandais où tout cela allait nous mener et même les deux cadavres ne semblaient pas pouvoir me sortir d’une lecture qui n’était certes pas ennuyeuse mais pas d’un intérêt réel non plus. L’arrivée du commissaire Dalgliesh, à peine comme une ombre dans le décor et les différents acteurs peu sympathiques, se répandant en propos peu aimables ou perfides sur un ton pète-sec, n’avaient rien pour modifier mon impression. Surtout, en tant que lecteur, je me sentais extérieur à l’intrigue car jamais l’écrivaine ne cherche à aider ou tromper le lecteur qui inconsciemment ou pas, mène sa propre enquête.
Et puis le dernier tiers du bouquin m’a sorti de mon indifférence. M’étais-je fait au style de P.D. James, à moins que ce ne soit l’enquête qui prenne un rythme plus soutenu, mais tout m’est enfin apparu plus riche et digne du talent d’un grand écrivain. L’étude des caractères m’a ébloui par sa finesse et sa richesse, Adam Dalgliesh m’a dévoilé des aspects de sa personnalité (poète publié, amateur de spectacles mais sans assez de temps libres).
La patience de Dalgliesh, au milieu de ce gynécée, est remarquable ; il devra essuyer la froideur des responsables des lieux perturbés par sa présence pouvant remettre en cause leurs pouvoirs, le secret professionnel et la respectabilité de l’institution, ou bien endurer les remarques féministes, « - Les hommes ne semblent pas vous inspirer un grand respect, n’est-ce pas Miss Rolfe ? – Si, beaucoup. Mais il se trouve que je ne les aime pas. On doit néanmoins respecter un sexe qui a su faire de l’égoïsme un art si poussé. C’est ça qui vous rend fort, cette aptitude à ne vous intéresser qu’à vous-même. » Et quand la solution révèlera que ces morts sont la conséquence d’un crash inopiné entre passé et présent, Dalgliesh devra encore se débattre avec sa conscience…
Un très bon roman, qui m’a déconcerté au début car je ne connaissais pas le style de P.D. James mais qui me donne envie de m’en imprégner mieux encore.
« « - Celle qui est décédée… qui est morte la première, était une élève infirmière de vingt et un ans, Heather Pearce… » Il rapporta tous les faits qu’il avait pu recueillir en s’efforçant d’éviter l’emploi des termes les plus criants du jargon policier auxquels il savait son chef particulièrement allergique et résista à la tentation de faire étalage de son récent savoir sur les sondes gastriques, sujet qu’il avait pris la peine de se faire expliquer longuement – bien qu’à contrecœur – par Miss Rolfe. « Nous avons donc, conclut-il, plusieurs possibilités : un suicide ou un accident dans le premier cas, ou les deux. Un meurtre dans le premier cas, qui n’aurait pas atteint la bonne victime. Ou encore deux meurtres. Un choix complexe, commissaire. »
P.D. James Meurtres en blouse blanche Fayard - 334 pages –
Traduit de l’anglais par Michèle Hechter
7 commentaires
J'ai beaucoup lu PD James quand j'avais une vingtaine d'années, en même temps que Ruth Rendell. C'était donc il y a déjà un bout de temps, et je crois que ça me plairait bien de replonger dans cette ambiance british traditionnelle mais efficace.
P.D. James que je ne découvre qu’aujourd’hui, Ruth Rendell que je n’ai jamais lue… j’ai l’impression d’être tombé de la dernière pluie, moi qui ne suis plus un jeunot depuis bien longtemps ! Qu’importe et comme toujours dans ces cas-là, je n’y vois que le côté positif, au moins me reste-t-il de certifiés bons livres à lire ! Et tout comme vous Sandrine, sachant qu’ils se déroulent dans les décors so british que j’affectionne, je m’en délecte par avance…
Idem, découverte à l'adolescence, j'ai trouvé un recueil de plusieurs histoires et je l'ai relu avec plaisir l'été dernier. Un classique. Et il n'est jamais trop tard pour découvrir un auteur ;-)
Tout à fait d'accord avec vous Elecktra.... surtout quand l'auteur est bon !
A une époque j'ai dévoré tous ses polars (et même La meurtrière et Les fils de l'homme, excellente SF)
De la SF ? Vous m’en bouchez un coin ! Mais bien entendu vous avez raison, j’ai vérifié, « Les Fils de l’homme » est présenté comme un thriller de science-fiction. On en apprend tous les jours et c’est bien !
Et il y a eu un film aussi (je l'ai vu bien sûr)
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