T.C. Boyle : Les Vrais durs
07/04/2017
T.C. Boyle (Tom Coraghessan Boyle) est un écrivain et romancier américain né en 1948 à Peekskill dans l’Etat de New York. Depuis 1978, il anime des ateliers d’écriture à l’Université de Californie du Sud et vit près de Santa Barbara, dans une maison dessinée par l’architecte Frank Lloyd Wright. Il est l’auteur de plusieurs recueils de nouvelles ainsi que de nombreux romans. Dernier livre traduit chez nous, Les Vrais durs est paru en 2016.
Alors qu’il est en croisière en Amérique centrale avec son épouse Carolee, Sten Stensen, tue un petit malfrat qui tentait de détrousser leur groupe de touristes descendu à terre. De retour au pays, notre héros malgré lui n’aspire qu’à retrouver sa vie de paisible retraité sous le soleil californien. Pour son malheur, Sten a un fils, Adam, qui souffre depuis l’enfance d’une forme aiguë de psychose paranoïaque et délirante aggravée par les drogues, il se prend pour John Colter le célèbre trappeur (membre de l'expédition Lewis et Clark, qui avait pour but d'explorer les Montagnes Rocheuses) et ses ennemis sont les flics et les Chinois ! Pour envenimer les choses, le jeune homme s’est entiché de Sara - à moins qu’il ne soit tombé dans ses filets - de quinze ans son aînée. Sara vit seule avec son chien, et le reste du monde est son ennemi, ne reconnaissant pas les lois et les représentants de l’autorité fédérale. Adam et Sara contre le reste du monde, tout cela ne peut que mal se passer et sombrer dans la violence…
Un bon roman, mais… sur la forme on peut le voir de deux manières différentes. Contrairement à ses dernières productions, si le texte reste dense et le rythme rapide, la narration n’y est pas du tout éclatée, les faits s’enchainent logiquement et chronologiquement, le ton général y est moins virulent, bref on n’y trouve pas la démesure d’autres des romans de Boyle. Certains s’en réjouiront, d’autres le déploreront. C’est vous qui voyez, selon votre degré d’exigence.
Ce bémol évacué, TC Boyle nous plonge dans cette Amérique qui nous fascine autant qu’elle nous effraye (Comme dirait Jean-Paul Dubois, L’Amérique m’inquiète). Fascination devant ces gens qui au nom de la liberté individuelle vivent en marge de la société en s’exemptant de ses lois, inquiétude devant ces mêmes qui sont armés, seuls ou organisés en milices, prêts à survivre dans des bunkers en cas de fin du monde. Sara qui pourrit sa propre vie par son attitude devant les règlements de la société, Adam un cran au-dessus vit dans son monde intérieur, une folie qui l’aveugle et le rend d’autant plus dangereux qu’il est armé.
L’Amérique est devenue folle nous dit (et répète sans cesse) TC Boyle avec ce cocktail mêlant chez ses personnages, un doigt d’écologie, une dose de xénophobie, un soupçon de drogues et une large rasade de violence meurtrière.
« Mais pourquoi Adam aurait-il eu envie de tirer sur un train ou de s’en approcher ? Sten ne connaissait pas la réponse, sauf qu’Adam avait la rage en lui et que cette rage devait trouver une cible, pour s’y frotter, la sentir, faire savoir au monde ce que c’était que d’avoir en soi une telle chose qui ne cherchait qu’à sortir. (…) La plupart d’entre eux réprimaient cette rage et affrontaient le monde, devenaient flics, prédateurs boursiers, militaires de carrière ou simples travailleurs manuels, alors que d’autres ne s’en défaisaient jamais et finissaient en prison, estropiés à la suite d’un accident de moto ou réduits en bouillie sur le bitume. Ou assassinés. Ils se faisaient tirer dessus. »
T.C. Boyle Les Vrais durs Grasset – 442 pages –
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Bernard Turle
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