George Pelecanos : Une Balade dans la nuit
14/01/2019
George P. Pelecanos, né en 1957 à Washington, est un écrivain et scénariste américain, auteur de romans policiers. Il amorce une carrière de romancier en 1992 par l'écriture de romans dont le personnage principal est Nick Stefanos, un Grec de Washington qui travaille parfois comme détective privé puis, en 2001, une nouvelle équipe de détectives privés, Derek Strange et Terry Quinn. Une Balade dans la nuit (2013) est le premier du cycle Spero Lucas.
Washington. Anwan Hawkins dirige un trafic de drogue depuis sa cellule de prison ; jusqu’à ce qu’un premier colis lui soit dérobé. Par l’intermédiaire de son avocat, il engage Spero Lucas, enquêteur du juriste depuis son récent retour d’Irak, pour retrouver le colis qui coûte un paquet…
Un gros méchant Ricardo Holley et son fils Larry, flic ripou, des gros bras avec de petites cervelles, des témoins malheureux d’avoir vu ce qu’il ne fallait pas voir, un enquêteur porté sur les femmes, « Son père lui avait dit un jour : « Ne laisse passer aucune occasion » et le fiston aimait bien son papa, etc. A chaque fois ça m’ennuie de résumer ce type d’ouvrage car en quelques lignes, sans tout vous dire pour ne pas vous gâcher la lecture, j’ai l’impression de répéter toujours la même histoire. Pour être clair et sans ambiguïté, l’intrigue reste pourtant très agréable à suivre. Voilà qui est dit.
Et comme d’habitude, une fois encore, c’est l’écriture qui fait le tri entre les bons et les mauvais polars. George Pelecanos connait son boulot, ce qui fait de ce bouquin, mieux qu’un vulgaire roman policier, un bien bon roman. Au début, le temps de m’y faire et de comprendre sa démarche, je me suis pas mal agacé du style de l’écrivain : une avalanche de détails superflus au premier abord, comme ces marques commerciales citées à tout bout de champ, limite placement de produits ; ou bien ces précisions géographiques exagérées, pour chaque déplacement dans la ville, les noms des rues ou des carrefours sont énumérés, pire qu’un GPS en folie !
Puis la logique m’est apparue. Le roman est prétexte à une sorte de reportage sociologique sur Washington, d’où cet aspect journalistique parfois. On côtoie la société en marge de la ville, ses démunis, les toxicos ou les vétérans désœuvrés à leur retour des lieux de guerres. Les marques commerciales symbolisent notre époque en tape à l’œil et le maillage routier de la capitale américaine met Washington en valeur, en faisant un personnage à part entière.
Le roman intègre aussi de bien belles choses comme cet attachant personnage d’Ernest, un jeune garçon élevé par une mère célibataire, rêvant de faire des études de cinéma. Et plus largement, il y a la notion de famille et de rapport père/fils, Spero Lucas qui se rend régulièrement sur la tombe de son père et s’intéresse de près aux projets du jeune Ernest, à moins, en plus conflictuel qu’on évoque les rapports familiaux chez les Holley…
Tout cela nous donne un bouquin épais en contenu et un polar beaucoup moins formaté que d’autres. Une bonne lecture.
« Le Tahoe que Bernard White et Earl Vance conduisaient était spacieux, mais l’Expedition, on aurait dit un bus. Personne en ville n’avait besoin d’un aussi grand véhicule, mais les gens voulaient le plus gros SUV du quartier. Le nom, l’Expedition, évoquait l’aventure, le safari, la découverte de mondes nouveaux, Lewis et Clark, nom de Dieu. Pourtant, les seuls que Bernard avait vu au volant de ces engins étaient des Blacks obèses, portable à la main, et des pères de famille blancs d’un certain âge avec des bides de buveurs de bière et des boucs. Pour eux, sortir des sentiers battus se limitait à une sortie de route après une soirée trop arrosée. Highlander. Pathfinder. Expedition. Pour aller où ? A l’hypermarché ? Ces conneries le tuaient. »
George Pelecanos Une Balade dans la nuit Le Livre de Poche – 325 pages –
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Elsa Maggion
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