Pierre Bordage : Tout sur le zéro
18/05/2020
Pierre Bordage, né en 1955 en Vendée, est un auteur de science-fiction qui a signé le renouveau de la science-fiction française des années 1990, genre qui était alors dominé par les auteurs anglophones. Au fil de ses publications, l’écrivain acquiert la notoriété et une reconnaissance parmi les meilleurs romanciers populaires français. Auteur d'une quarantaine d'ouvrages ainsi que de nouvelles, publiés chez différents éditeurs et de différents genres (Fantasy historique, Science Fantasy, polar, etc.), il a aussi conçu des novélisations et réalisé quelques scénarios pour le cinéma, pour ensuite s'essayer à l'adaptation théâtrale, ainsi qu'à celle de sa propre œuvre en bande dessinée. Tout sur le zéro, un roman de 2017, ne s’inscrit dans aucun des cycles de son œuvre et n’a rien à voir avec la science-fiction.
Le livre se déroule à Château-l’Envieux, petite station thermale du Lot-et-Garonne, et plus précisément dans son casino qui attire les curistes et tout une faune pittoresque d’habitués, de toutes les catégories sociales. Nous ferons ainsi connaissance avec Paul, un peintre assez connu atteint des premiers symptômes de la maladie de Charcot, de son ami Blaise, veuf depuis trois ans, d’Eloïse, dont la vie familiale se délite ou encore de Charlène. Autour de ce quatuor provincial, d’autres figures, des seconds rôles, comme Isabelle la directrice du casino…
Le roman prend largement son temps pour nous dépeindre le milieu du jeu, ces casinos où les gains ne couvrent pas les dépenses, les billets qui sortent des poches à l’insu de votre plein gré conduisant aux fins de mois difficiles, les petits mensonges et les gros vis-à-vis du conjoint ou de ceux qui ne connaissent pas votre vice. L’écrivain nous peint les motivations profondes de ces joueurs impénitents, véritables toxicos, certes il y a le gain espéré, mais plus encore, le jeu leur permet d’oublier leurs vrais problèmes personnels, « une bulle vertigineuse qui les plonge dans un état second. »
Les décors de ce monde à part bien plantés, on en vient à la romance ( ?), les habitués vont se rapprocher très lentement, Paul et Charlène, Blaise et Eloïse. L’ennui discret de la première partie se mue en récit proche des lectures pour midinettes : passages émouvants quand les couples en devenir confrontent leurs désirs et leur morale, passages nunuches quand la timidité et l’hésitation les bloquent, et passages carrément torrides quand les barrages s’écroulent.
Honnêtement, j’ai trouvé cela très quelconque et seul le format court du roman m’a poussé jusqu’au bout. Je me dois de préciser que le monde du jeu d’argent m’est totalement étranger, d’autres s’y reconnaitront peut-être et y trouveront intérêt ? Sinon l’écriture offre un petit supplément positif, de très nombreux chapitres ne sont constitués que d’une seule phrase ! Au début du roman, l’addiction au jeu et ce style créent une sensation d’étouffement pour le lecteur, un manque d’air. Mais on s’y habitue rapidement.
Une version inattendue des jeux de l’amour et du hasard ?
« … il tend cent euros à sa charmante voisine, qui les accepte avec un sourire reconnaissant, Edouard s’entend alors dire, comme dans un cauchemar : vous n’en auriez pas un peu pour moi ? pareil à l’un de ces horribles mendiants qu’il a chassés du trottoir devant la pharmacie, son vis-à-vis lève vers lui un regard surpris, légèrement réprobateur, finit par extraire deux billets de la liasse et les lui jette par-dessus la roulette comme des os à un chien, Edouard les ramasse avec une rapacité qui l’épouvante, bredouille un merci en se rasseyant sur son siège, toute honte bue, il n’est plus rien désormais qu’un joueur prêt à tout pour rassasier son vice, un homme nu, désespéré, une bâtisse délabrée ouverte à tous vents. »
2 commentaires
donc, merci de l'avoir présenté mais je évidemment je le laisse passer.
Vous ne ratez rien d'important. Je crois savoir que ce livre n'a pas eu un grand succès.... mais il diffère beaucoup du reste de l'oeuvre de cet écrivain.
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