Olga Tokarczuk : Histoires bizarroïdes
26/10/2020
Olga Nawoja Tokarczuk, née en 1962, est une femme de lettres polonaise. Elle a étudié la psychologie à l'université de Varsovie tout en travaillant bénévolement avec des personnes souffrant de troubles mentaux. Ses études achevées, elle devient psychothérapeute. C’est à partir de 1997 qu’elle se consacre entièrement à l’écriture. Elle obtient le prix Nobel de littérature 2018. Recueil de nouvelles, Histoires bizarroïdes, vient de paraître.
Voici un titre d’ouvrage qui ne ment pas sur son contenu, des histoires parfois tellement étranges que j’avoue ne pas être certains de les avoir comprises, ou pour être plus précis, pas certain d’en avoir saisi le sens caché. En supposant qu’un sens caché existe ?
Les dix nouvelles ne présentent pas d’unité de temps, l’une se déroule à l’époque de Descartes, d’autres aujourd’hui ou presque, certaines dans un futur hypothétique. Nulle unité de lieu non plus, la Pologne, la Suisse, la Chine ou encore je ne sais où ?
Le lecteur croisera un enfant qui fait des cauchemars, deux enfants sauvages aux mystérieux pouvoirs, un vieux fils flemmard qui enterre sa mère et se retrouve à la tête d’une multitude de bocaux de conserves, une famille d’androïdes féminines, un professeur venu dans une ville étrangère pour une conférence et pris dans un imbroglio dramatique à la Kafka, un greffé du cœur soudain animé de pulsions étranges, d’une femme âgée optant non pas pour une euthanasie mais pour une réincarnation en un animal, des religieuses qui chouchoutent une momie dans leur couvent ou encore une sorte d’idole rabougrie en fin de vie mais rafistolée à la va comme je te pousse par une poignée de notables pour la montrer au monde entier…
Ces textes sont extrêmement bien écrits (Nobel oblige !) donc le bouquin est fréquentable. Les histoires sont racontées comme s’il s’agissait de machins ordinaires avant qu’un détail ne vienne surprendre ou perdre le lecteur, il se croyait au présent mais il s’agit d’une dystopie, ou il pensait avoir à faire avec des humains, mais non ! Etc. Le récit est souvent sans reliefs narratifs mais le fond est souvent intéressant et si je l’ai dit, je ne suis pas sûr d’avoir tout capté, toutes ces nouvelles semblent nimbées d’un je ne sais quoi d’angoissant, voire d’apocalyptique en résonnance avec nos problèmes écologiques.
Bizarre, vous avez dit bizarre ?
« Monodikos était arrivé quand tous avaient le plus grand besoin de lui, quand la catastrophe du plastique avait détruit non seulement les maisons, les usines et les hôpitaux, mais aussi remis en cause certaines conceptions. La guerre avait ensuite complété l’œuvre de destruction. Quand les satellites tombaient, ils étaient comme des obus, des poignards lancés sur la Terre. Les gens oubliaient certains mots, et lorsqu’ils faisaient défaut, on ne pouvait pas s’en servir, ni donc décrire telle ou telle part du monde, qui sombrait alors dans le néant. Et puisqu’il était impossible de la décrire, on ne pensait plus à elle. Comme on ne pensait pas à elle, on l’oubliait. Simple exercice d’inexistence. »
Olga Tokarczuk Histoires bizarroïdes Editions Noir sur Blanc - 182 pages –
Traduit du polonais par Maryla Laurent
9 commentaires
Quoi, un titre d’elle que je ne connais pas? ^_^ Mais je confirme, on ne comprend pas toujours tout, peu importe, ça fait du bien aux neurones
Ouf ! Merci Keisha pour le « je confirme, on ne comprend pas toujours tout » ! Mais je comprends aussi que pour vous comme pour moi, ce n’est pas une critique négative….
Je ne connais pas non plus ce titre, mais je note car je veux tout lire de Tokarczuk, même si, je plussoie, on ne comprend pas toujours tout, c'est vrai !
Génial ! Après avoir lu un bouquin dont je n’ai pas tout compris, voici un commentaire que je ne comprends pas non plus ! En tout cas merci Ingannmic pour ce mot qui m’était inconnu.
Pour les niais dans mon genre : Le terme plussoyer est un néologisme (un mot nouveau donc) qu'on retrouve très fréquemment sur les forums de discussions, dans les commentaires de blogs et sur les médias sociaux. Il signifie qu'on est d'accord avec ce qui a été écrit précédemment.
Et le comble, c'est que je ne fréquente pas les réseaux sociaux, mais comme tu peux le voir, je fais bien semblant !!
Chez Tokarczuk, on ne comprend pas toujours tout, mais elle sait créer des ambiances et comme Ingannmic, j'aimerais lire tout ce qu'elle a écrit.
Vous m'avez toutes rassuré, avec cette écrivaine on ne comprend pas tout mais c'est normal ! Une fois de plus on peut constater que définir les critères qualifiant un "bon livre" est une tâche ardue...
Pour l'instant j'ai aimé les deux romans que j'ai lu de cette auteure. Mais ce que j'ai apprécié et qui semble manquer ici, c'est que sous l'aspect étrange l'auteur donne des clés rationnelles. Je crains que cela manque dans ces nouvelles et j'ai besoin de cela pour aimer l'étrange.
Sûr que tout n’est pas rationnel dans cet ouvrage… mais si vous avez aimé ses autres livres, sachant que celui-ci est court, le lire vous permettra de juger sur pièce. Non ?
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