Ella Maillart : Ma philosophie du voyage
11/07/2022
Ella Maillart (1903-1997) est une voyageuse, écrivaine et photographe suisse. Membre de l'équipe suisse de ski, elle défend, de 1931 à 19343, les couleurs de la Suisse aux quatre premiers championnats du monde de ski alpin. Des talents multiples pour cette aventurière toujours en mouvement au nombreux voyages intrépides à travers l’Asie. En 1930 et en 1932, elle découvre le Caucase et l'Asie centrale, en 1935, en Chine, elle accomplit un raid extraordinaire dans les contrées désertiques au nord du Tibet et au Sinkiang et de 1940 à 1945, elle passe cinq ans dans le sud de l'Inde auprès des maîtres de sagesse. Toutes ses aventures sont consignées dans de nombreux et magnifiques livres que je vous conseille fortement de lire. Les manuscrits et documents d'Ella Maillart sont conservés à la bibliothèque de Genève, son œuvre photographique au musée de l'Elysée à Lausanne (20 000 négatifs et 10 000 positifs) et ses films à la Cinémathèque suisse de Lausanne.
Ma philosophie du voyage, ouvrage qui vient de paraître, est un recueil de 17 textes inédits ou introuvables, écrits entre 1937 et 1969. Ils se partagent entre deux groupes, ceux sous forme de récits de voyages en format court et ceux dans lesquels Ella Maillart nous donne sa définition du voyage, ses motivation, sa philosophie du périple.
Du premier groupe, évocation de ses aventures au Turkestan, au Népal ou au Tibet etc. Ce qu’il faut bien garder en tête c’est que ces voyages se déroulent à une époque où les moyens de transport n’étaient pas ceux d’aujourd’hui, les conditions du voyage non plus et qu’Ella Maillart est une femme (sic !) donc une réelle aventurière avec un « A » majuscule. La force des écrits de l’écrivaine tient dans son art pour nous décrire avec facilité ce qu’elle voit ou pense, le texte s’attardant tout autant sur l’histoire des pays traversés, les mœurs et coutumes, l’ethnologie, l’économie locale et la géopolitique d’une époque dont on a appris les soubresauts dans nos livres scolaires. Récits qui nous permettent de comparer l’hier et l’aujourd’hui comme avec son séjour en Afghanistan.
Le deuxième groupe de textes, peut-être le plus intéressant pour ceux qui ont déjà lu Maillart, nous livre ses réflexions sur l’explication qu’elle nous donne sur sa vocation de voyageuse, sa définition du voyageur (« Le vrai voyageur est celui que pousse à partir un besoin physique, esthétique, intellectuel tout autant que spirituel ») et ce qui pour elle est le vrai voyage : « chaque matin on charge ses chameaux, on selle son cheval ; et lentement, sans arrêt, pendant huit ou dix heures, on avance… »
Une femme animée d’une volonté farouche, « Dès le début, j’ai voulu vivre ma vie propre et, patiemment, contre vents et marées, j’ai affermi ce désir », ne reculant devant rien, jamais.
Une lecture recommandée et qui vous incitera à plonger dans son œuvre, si ce n’est déjà fait.
« Avec tout ce va-et-vient près du glacier du Khumbu, aucune chance de voir le sauvage yéti, ou abominable homme des neiges, dont des traces furent photographiées ici même par la première expédition suisse sur l’Everest. Il existe deux scalps de cette créature invisible : l’un à Khumjung, l’autre au monastère de Pangbotché à 4000 mètres d’altitude. Et c’est ce dernier que j’ai vu et touché : calotte de cuir durci couverte de rares poils épais et roux. Cette dépouille sans âge n’a rien de sacré ; on la traite comme une pièce de musée ainsi qu’un squelette de main déformée, qu’on garde dans un écrin. »
Ella Maillart Ma philosophie du voyage Petite Biblio Payot - 253 pages -
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