Paul Auster : Revenants
15/09/2022
Paul Auster est un écrivain américain né en 1947 à Newark, New Jersey, aux Etats-Unis. Une partie de son œuvre évoque la ville de New York, notamment le quartier de Brooklyn où il vit. D'abord traducteur de poètes français, il écrit des poésies avant de se tourner vers le roman et à partir des années 1990 de réaliser aussi quelques films. Marié puis séparé de l'écrivaine Lydia Davis, il s'est remarié en 1981 avec une autre romancière, Siri Hustvedt. Il a deux enfants également artistes, le photographe Daniel Auster et la chanteuse Sophie Auster.
Revenants (1988) est le second volet de la Trilogie new-yorkaise qui comprend Cité de verre (1985) et La Chambre dérobée (1988).
Brooklyn, New York, en 1947. Bleu, détective en mal de clients, est engagé par Blanc pour suivre Noir et rédiger un rapport hebdomadaire complet de ses activités. Pour quelle raison, Bleu ne le sait pas mais contre la promesse de chèques bien venus il prend l’affaire. Bien vite cette mission s’avère étrange, d’un appartement loué par Blanc en face de celui de Noir, Bleu passe ses journée à l’observer écrire à l’encre rouge dans un cahier. Et c’est tout !
Ceux qui connaissent Paul Auster savent que même si ce bouquin commence comme un polar classique, ce ne pourra pas en être un. D’ailleurs, si le roman s’appuie sur ces bases dans ses premières pages, l’écrivain en réduit à néant cette voie une fois l’intrigue posée, en gelant toute action éventuelle, tout en maintenant une sorte de suspense prenant tout du long et ce n’est pas rien !
Devant cette situation qui n’évolue pas, Bleu va s’interroger : que fait Noir exactement ? Quelle est ma mission finalement ? Derrière tout ceci n’y aurait-il pas un plan subtil où ce serait moi qui serais la proie d’on ne sait quelle manigance ? A quoi pense Noir ? Alors Bleu va tenter de s’immiscer par la bande, dans la vie de Noir, en empruntant de fausses identités, il l’approche. Plus il en est près, plus il lui semble que l’autre l’attend. Mais le plus troublant c’est qu’à mesure que la personnalité de Noir se dessine, Bleu y voit comme un reflet de miroir lui renvoyant son image.
Cette « excursion dans la zone intérieure » pour reprendre le titre d’un ouvrage d’Auster, amène Bleu et le lecteur à s’interroger sur la notion d’identité et le roman prend un tour métaphysique. Si Bleu et Noir se ressemblent, c’est bonnet blanc et blanc bonnet ? Et si on pousse le raisonnement un peu plus loin, ces personnages qui au départ avaient en théorie une vie propre, s’ils deviennent fusionnels au gré de la narration de l’écrivain, ne seraient-ils pas une part des multiples facettes de l’auteur au travail ? Très souvent les écrivains se projettent plus ou moins inconsciemment dans leurs personnages.
Au final, un roman qui nous tire vers les zones grises de l’esprit où conscient/inconscient se mêlent, où un regard sur les autres peut renvoyer une image de soi-même. Un roman nébuleux autant que fabuleux.
« Blanc a tenu sa part du contrat : les chèques sont arrivés à l’heure toutes les semaines, et se retourner contre lui maintenant – Bleu le sait bien – serait mordre la main qui le nourrit. C’est bien pourtant Blanc qui a lancé ce cas, jetant Bleu dans une pièce vide, en quelque sorte, puis éteignant la lumière et verrouillant la porte. Depuis lors, Bleu tâtonne dans l’obscurité, cherchant à l’aveuglette l’interrupteur, et il se trouve prisonnier de l’affaire. (…) Son cerveau s’arrête de fonctionner, il n’est pas capable d’aller plus loin. »
Paul Auster Revenants Trilogie new-yorkaise 2 Le Livre de Poche - 119 pages -
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Pierre Furlan
6 commentaires
J'ai lu la trilogie il y a longtemps (je crois d'ailleurs que ce sont les premiers titres d'Auster que j'ai lus) et j'avais beaucoup aimé l'atmosphère, oui, c'est exactement ça : nébuleuse...
Merci pour ta participation.
J’ai moi aussi lu la trilogie à l’époque de sa parution, il y a longtemps, et j’ai immédiatement adoré cet écrivain. Ta proposition de lecture commune était une bonne occasion de replonger dans un Auster, j’ai pris ce roman au hasard et surtout parce que je ne m’en souvenais plus dans le détail. Un très agréable moment de lecture.
Lu aussi, forcément, mais là j'ai raté l'occasion, trop à penser!
Quand on connait Paul Auster et je me doute bien que tu l’as lu (!), on a lu sa « Trilogie new-yorkaise », ça me paraît obligatoire/évident…
Bonjour, je n'ai pas trop accroché à «Moon Palace», mais Goran m'avait parlé aussi de la trilogie new-yorkaise. En lisant votre article, je crois que si je dois lire encore du Auster, je sortirai la trilogie de mes étagères. 4321 ne me tente pas du tout (le jeu du recommencement, ce n'est pas pour moi). En ce sens, votre article a confirmé ma prochaine lecture de cet écrivain. Au plaisir!
Je n’ai pas lu « 4321 » car je déteste les livres trop longs… La « Trilogie new-yorkaise » me semble une lecture idéale pour entrer dans l’univers de Paul Auster, ce fût le cas pour moi il y a longtemps. Donc, oui, n’hésitez pas à l’ouvrir !
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