Louise Erdrich : La Sentence
06/11/2023
Karen Louise Erdrich, née en 1954 à Little Falls dans le Minnesota, est une écrivaine américaine, auteure de romans, de poésies et de littérature d'enfance et de jeunesse. Elle est une des figures les plus emblématiques de la littérature indienne et appartient au mouvement de la Renaissance amérindienne. Après une vie personnelle chaotique et difficile, elle vit désormais dans le Minnesota avec ses filles et est la propriétaire d'une petite librairie indépendante qui sert de décor à son nouveau roman, La Sentence.
Etats-Unis, Minneapolis. Libérée après dix ans de prison, Tookie, la narratrice, ojibwée d’une quarantaine d’années, est embauchée dans une librairie indépendante tenue par Louise (!!) et spécialisée dans les ouvrages autochtones. Un jour, Flora, une cliente régulière du magasin décède, semble-t-il tandis qu’elle lisait les mémoires d’une indienne captive d’une mère maquerelle au XIXème siècle, et son esprit vient hanter la boutique, visant plus particulièrement Tookie. Pourquoi ? Et comment se débarrasser de cette présence embarrassante ?...
Sans être génial, voici un bon roman extrêmement agréable à lire.
Vous connaissez le fil rouge du roman, s’y grefferont l’épidémie naissante du Covid dont on ne sait rien encore, ni ce qu’il faut faire (« - Que faire ? – Le contraire de ce que fait Orangino »), puis les émeutes après le meurtre de George Floyd tué par un policier, décors d’ambiance de l’intrigue.
Louise Erdrich marie les contrastes avec bonheur, après un premier chapitre désopilant lié à l’arrestation de Tookie pour avoir transporté un cadavre, les sentiments du lecteur passeront du sourire, le plus souvent, à l’émotion la plus poignante quand par exemple, Pollux, mari de Tookie sera atteint du Covid, ou encore par l’intrigant mystère de ce fantôme. Les morts d’hier, peuples autochtones, s’allient à ceux d’aujourd’hui, victimes des violences policières à répétition, en une litanie tristement connue faite de racisme et d’éradication de la culture Amérindienne.
Rassurez-vous, le plus souvent le texte est moins morose, que ce soit à travers les rituels tribaux, la nourriture très présente dans ce roman, et surtout parce que ce livre est un hommage puissant à la littérature et aux livres où une ribambelle d’ouvrages de qualité sont conseillés (voir appendice en fin du livre) et font envie… Il y a aussi beaucoup d’amour.
Et puis n’oublions pas l’écriture de Louise Erdrich, très alerte et facile à lire, ses personnages carrément inoubliables (du sage aux « originaux »)
« Flora est décédée le 2 novembre, le jour de la fête des Morts, quand l’étoffe qui sépare les mondes est fine comme du papier de soie et se déchire facilement. Depuis, elle vient tous les matins. La mort d’une fidèle cliente est perturbante en soi, mais l’obstination avec laquelle Flora refusait de disparaître a commencé à m’agacer. Ca n’y changeait rien. Elle était décidée à hanter le magasin. L’ardente lectrice qu’elle avait été collectionnait les livres avec passion. Nous sommes spécialisés dans les ouvrages autochtones, bien sûr, son principal centre d’intérêt. Mais voilà ce qui m’exaspérait : Flora était une sangsue – de toutes choses amérindiennes. Sangsue était peut-être un mot trop dur. Disons plutôt que c’était une indécrottable wannabe. »
Louise Erdrich La Sentence Albin Michel - 433 pages -
Traduit de l’américain par Sarah Gurcel
« … je me préparais à faire le paquet quand a commencé une chanson dont je savais qu’elle n’était pas dans ma playlist. Flora a poussé le volume ; c’était « Ain’t No Grave » de Johnny Cash. (…) Si vous avez déjà entendu Johnny chanter ça, alors vous comprendrez. Mes jambes se sont liquéfiées. »
11 commentaires
Je n'ai encore lu aucun roman de Louise Erdrich ! Pourtant, je suis persuadée qu'ils me plairont. J'en ai un dans ma PAL. Je prévois de le lire très bientôt.
Si tu as l’un de ses livres à portée de main, n’hésite pas, ce sera un bon moment de lecture assuré.
J'ai noté ce titre, tranquillement, il sera bien disponible à la bibli un jour ou l'autre
Oh, c’est certain, Louise Erdrich est très présente en bibliothèques…
Je n'ai lu que La chorale des maîtres bouchers, que j'ai beaucoup aimé, il faudrait que je m'y remette ! Mais ce ne sera pas avec celui-là, j'ai cru comprendre que ce n'était pas son meilleur en effet..
Ah, et je récupère ton lien pour l'activité sur les minorités ethniques !
Je ne suis pas un grand connaisseur de l’œuvre de cette écrivaine et de ce que j’ai lu (cf. billets antérieurs) si le niveau général est très honorable, du bon au moins bien, je ne suis un pas inconditionnel.
PS : merci pour le lien et cette LC dont je n’avais pas connaissance.
C'est une activité que je propose depuis décembre 2022, jusqu'à fin 2023 : https://bookin-ingannmic.blogspot.com/2021/12/lire-sur-les-minorites-ethniques-le.html
J'aime beaucoup l'écriture de Louise Erdrich, je n'ai calé que sur un de ses romans (pour une raison mystérieuse !).
Je lirai celui-ci, c'est sûr !
C’est vrai que c’est son point fort. Même quand un de ses romans est moyen, la lecture en est tout de même agréable, l’écriture est vive et tout semble couler de source, s’enchainant très facilement.
je n'ai pas encore lu cette écrivaine qui pourtant a beaucoup publié
Il va falloir faire quelque chose.... non ? Elle est présente en bibliothèques donc il te sera facile de trouver l'un de ses romans.
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