Edward Abbey : Désert solitaire
08/10/2012
Une nouvelle fois nous retrouvons Edward Abbey dans un bouquin qui magnifie le désert, son désert, le désert américain au cœur de l’Utah. Dans les années cinquante, l’auteur prend un job saisonnier de ranger dans un parc national au sud-est de l’Etat d’avril à septembre. Plusieurs années de suite il renouvellera l’expérience, tenant un journal où il y consigne ce qu’il voit et fait. C’est à partir de ce matériau que ce livre a été écrit dix ans plus tard, en 1967, et dès la préface il prévient « la plus grande partie de ce sur quoi j’écris dans ce livre a déjà disparu ou est en train, rapidement, de disparaître ». D’où l’amertume qui sue parfois au détour de quelques phrases quand il constate que le paradis terrestre n’est plus ce qu’il était. A contrario, c’est aussi cette déception qui rend ces pages plus attachantes encore. Edward Abbey nous livre ce qui aurait pu être un texte écrit par Adam après son expulsion du Paradis. Ici la nature est dure et sauvage, sublime et immense, cachant des merveilles inaccessibles au fond des canyons où seules les prouesses physiques et la volonté de l’auteur lui permettent de les entrevoir. Pour le néophyte, désert semble rimer avec rien, pourtant le bouquin regorge de noms de plantes, de pierres et d’animaux souvent peu familiers, trahissant la grande culture de l’écrivain et de l’homme de terrain. A lire avec une bouteille fraîche à portée de la main.
« C’est une chose étrange que, dans le pays canyons, plus on s’approche du fleuve, qui est l’artère vivante de toute la région, plus la terre devient sèche et nue, moins elle devient habitable. De ce point de vue, le désert du Colorado est à l’opposé de celui du Nil, en Egypte, et de celui du Rio Grande, au Nouveau-Mexique, où la vie, les hommes et les villes se regroupent sur les rives. Le long du Colorado, il n’y a aucune ville entre Moab, en Utah, et Needles, en Californie, qui en est distante de plus de mille miles. »
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