Jim Harrison : Les Jeux de la nuit
09/10/2012
Par des moyens légaux mais que je ne peux dévoiler ici, j’ai en ma possession le nouveau bouquin de Jim Harrison, Les Jeux de la nuit, qui ne sera en vente que le 1er septembre.
Chaque nouveauté de l’écrivain américain est attendue avec impatience par de nombreux lecteurs dont je fais partie. Ce nouveau livre est un recueil de trois nouvelles d’une centaine de pages chacune où à chaque fois, un personnage solitaire cherche à calmer une souffrance qui le ronge et trouver la rédemption.
La fille du fermier nous narre le désir de vengeance de Sarah, une très jeune adolescente violée par un fils d’éleveur après une fête bien arrosée. Sarah n’a pas d’amis, ou si peu, une copine Marcia beaucoup plus délurée qu’elle et un jeune gars affligé d’un pied-bot. « Son piano était littéralement sa parole, la seule conversation qu’elle entretenait avec le monde. Son père parlait peu, et sa mère, tout occupée à trouver ce qu’elle allait répondre, n’écoutait pas. »
Chien Brun, le retour, comme son nom l’indique nous retrouvons ici Chien Brun, l’ami Indien de l’auteur qui va et vient au gré de l’inspiration de Jim Harrison à travers son œuvre forte aujourd’hui de près de vingt-cinq livres. Aujourd’hui Chien Brun, célibataire endurci, est sorti illégalement des Etats-Unis vers le Canada avec sa nièce que les autorités veulent placer dans un foyer pour jeunes handicapés. Une épopée paillarde où l’Indien nous livre quelques secrets sur sa vie passée tout en étant à l’affût de la moindre occasion pour satisfaire sa libido débordante alors que son amie Gretchen abonnée aux plaisirs saphiques exclusivement, a jeté son dévolu sur lui pour une insémination artificielle !
La dernière nouvelle qui donne son titre à l’ouvrage, Les jeux de la nuit est une variante du mythe du loup-garou. En voulant sauver un louveteau orphelin, un jeune garçon est mordu accidentellement par l’animal et chaque mois quand survient la pleine lune, une puissante force intérieure le ronge et le pousse dans des excès de gloutonnerie et de sexe. La solitude semble inexorable, l’obligeant à ces époques à fuir vers les grands espaces déserts des forêts et montagnes.
Sans entrer dans les détails pour ne pas vous gâcher la lecture, disons que Jim Harrison ménage une porte de sortie plutôt optimiste à ses personnages même si l’avenir de certains ne s’annonce pas vraiment rose. Les trois textes ne sont pas du même niveau d’écriture qui va du très bon (Les Jeux de la nuit) au moyen (Chien Brun, le retour), on trouve des répétitions étranges entre les textes où par exemple tout le monde écoute la même chanson de Patsy Cline, mais on se régale toujours des paysages de cette Amérique chère à l’écrivain et à notre cœur, du Montana au Texas, la nature toute puissante, la faune et la flore, les parties de pêche, les bivouacs au bords des rivières. Les préoccupations basiques de Jim Harrison sont toujours les mêmes, boire de bons coups, bien bouffer mais, et c’est là le bémol que je mettrai à ce livre, ses délires sexuels égrillards d’autrefois semblent prendre une part plus importante et frôler la pornographie, une facilité moins intéressante trahissant les fantasmes d’un vieil homme (73 ans) en difficulté de ce côté-là ? A cette heure le luron est toujours vivant et il nous offre un très bon bouquin, c’est tout ce qui compte pour nous au pays des lecteurs.
« Ce premier automne, nous faisions de longues virées parmi les collines des environs, cachant nos vélos avant de poursuivre à pied dans les canyons, tuant des serpents à sonnette avec la Remington de calibre .22 à un coup de Lawrence. Il achetait des cartouches bourrées de chevrotine et dégommait des cailles qu’Emelia cuisait ensuite avec habileté sur une pierre plate entourée de braises. Petit Dicky avait toujours du sel sur lui, dans une bourse fixée à sa ceinture. »
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