Jim Harrison : Grand Maître
09/10/2012
Jim Harrison, de son vrai nom James Harrison, est un écrivain américain, né le 11 décembre 1937 à Grayling dans le Michigan aux États-Unis. Ses premiers romans datent du début des années 70 et Grand Maître est son dernier ouvrage qui vient de paraître.
L’inspecteur Simon Sunderson se prépare à prendre sa retraite mais avant de rendre son arme et son insigne à la police du Michigan, il se lance dans la traque d’un guru pédophile se faisant appeler Grand Maître par les membres de sa secte. Son enquête le mènera de son Michigan chéri jusqu’en Arizona et dans le Nebraska. Flic à l’ancienne peu amateur des technologies modernes, il se fera aider par sa jeune voisine adolescente, Mona, une férue d’informatique nippée gothique.
Voici le résumé rapide de l’intrigue mais Jim Harrison nous a prévenu dès le sous-titre de son bouquin, il s’agit d’un « faux roman policier ». Certes, du strict point de vue « polar » on a déjà lu mieux, mais l’auteur est trop modeste, même sous cet angle son roman tiendrait la route s’il avait étoffé l’enquête de Sunderson.
Mais ce n’était pas son propos, l’intrigue n’est qu’un prétexte pour nous livrer sa vision de l’Amérique et les critiques pleuvent. Les effets de la mondialisation, la toute puissance de l’argent, les rapports enfants/parents y compris quand les enfants sont devenus adultes ; sont aussi abordés les grandes questions sur la vie et la fameuse trilogie sexe, religion, argent. L’écrivain sait y faire, ses réflexions et critiques sont habilement glissées dans le texte et le gros Jim n’est pas lourd, son écriture reste légère.
Jim Harrison reste fidèle à ses obsessions. Les femmes et le sexe, que ce soit son ex-femme Diane, Lucy une bourgeoise de rencontre, ou bien Melissa l’infirmière mexicaine, voire Carla une jeunette prise sur un tas de bois ou Mona qu’il reluque par sa fenêtre, le vieux Pan ne se refuse jamais une séance de zizi-pan-pan. A ce propos j’ai trouvé son approche du sexe plus digeste que dans son livre précédent Les jeux de la nuit. Après les femmes, il y a aussi les excès d’alcool, de Tabasco et de condiments combinés avec une alimentation terriblement calorique et grasse qui ruinent la santé de Sunderson et il ne faut pas être très malin pour deviner que Harrison sait très bien de quoi il parle.
Tous ces excès sciemment commis par les héros des livres de Jim Harrison, peuvent être vus comme le reflet d’un lent suicide de l’écrivain lui-même, un homme qui a beaucoup vécu et vu, las peut-être de ce monde qui ne lui ressemble plus. Ce qui laisse toujours un goût tragique derrière la truculence de ses derniers opus. Heureusement, il reste des plaisirs plus sages tels que la pêche à la truite et son amour immodéré pour la nature en général.
Ce Grand Maître s’avère un bon livre de Jim Harrison, un de plus, dirai-je.
« Une partie de lui-même avait deviné que c’était une espionne, mais la partie la plus forte de son esprit préféra l’ignorer, guidée par la vanité et l’anneau biologique qui lui perçait le nez, jusqu’à l’inévitable chute à plat ventre. Un camé de l’amour et un obsédé du cul, quelque chose de ce genre. Quelle absurdité ! En sombrant dans le sommeil, il entendit le hurlement des coyotes dans le canyon se muer en cris excités, ce qui signifiait qu’ils allaient bientôt tuer leu proie. Il pensa que dans son cas le jeu de la sexualité touchait sans doute à sa fin, mais ça n’avait jamais été vraiment un jeu, plutôt une intrusion mortelle. »
Jim Harrison Grand Maître Flammarion
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