Les prix littéraires
04/11/2012
La semaine prochaine s’annonce pénible pour les écrivains en lice pour un des nombreux prix littéraires décernés en France. Les verdicts vont être rendus, les bouquins couronnés et les vitrines des librairies mettre en valeur les heureux élus. A eux la gloire et éventuellement la fortune à venir.
Rapide historique de quelques uns des prix littéraires, parmi les plus connus chez nous. A tout seigneur, tout honneur, le plus prestigieux est sans conteste le prix Goncourt. Il a été créé le 21 décembre 1903 par le testament d’Edmond de Goncourt (décédé en 1896) en mémoire de son frère Jules (décédé en 1870). Le document nommait Alphonse Daudet exécuteur testamentaire « à la charge pour lui de constituer dans l’année de mon décès, à perpétuité, une société littéraire dont la fondation a été, tout le temps de notre vie d’hommes de lettres, la pensée de mon frère et la mienne, et qui a pour objet la création d’un prix annuel de 5000 francs (or), destiné à un ouvrage de littérature, d’une rente annuelle de 6000 francs au profit de chacun des membres de la société. » Au cas où ce projet ne se réaliserait pas, il destinait ses revenus posthumes à l’œuvre de la princesse Mathilde (Notre-Dame-des-Sept-Douleurs). Les héritiers naturels ayant attaqué le testament, furent déboutés en 1897 puis en appel.
Le montant du prix est surtout symbolique (10 euros aujourd’hui) mais son attribution assure une renommée certaine à l’écrivain et un tirage confortable. Le vote final a lieu à l’issue d’un déjeuner chez Drouant à Paris, place Gaillon. Le premier écrivain nommé fut John-Antoine Nau pour Force ennemie en 1903 et l’année dernière Alexis Jenni pour L’Art français de la guerre.
Le prix Théophraste Renaudot, plus couramment appelé prix Renaudot, est un prix littéraire qui a été créé en 1926 par dix journalistes et critiques littéraires, attendant les résultats de la délibération du jury du prix Goncourt. Il est attribué le même jour et au même endroit, que le Goncourt. Le vainqueur de la première édition, Armand Lunel avec Niccolo Peccavi en 1926 et l’an dernier Emmanuel Carrère avec Limonov.
Le prix Femina est un prix littéraire créé en 1904 par vingt-deux collaboratrices du magazine La Vie heureuse soutenu aussi par le magazine Femina, sous la direction de la poétesse Anna de Noailles afin de constituer une autre proposition au prix Goncourt qui consacrait de facto des hommes. Le prix est attribué chaque année par un jury exclusivement féminin le premier mercredi de novembre à l'hôtel de Crillon, Paris. Il récompense chaque année une œuvre de langue française écrite en prose ou en poésie. C’est Myriam Harry avec Pour la conquête de Jérusalem qui remporte le premier prix en 1904 et Simon Liberati avec Jane Mansfield 1967 la dernière édition en 2011.
Citons aussi le prix Interallié décerné chaque année depuis 1930 et qui récompense un roman écrit par un journaliste. Le prix a été fondé par une trentaine de journalistes qui déjeunaient au Cercle de l'Union interalliée à Paris en attendant les délibérations des dames du Femina. Il est amusant de constater la similitude d’origine du prix avec celle du Renaudot ! André Malraux remporta le prix en 1930 avec La Voie royale et c’est Morgan Sportes avec Tout, tout de suite le dernier lauréat de 2011.
Le prix Médicis est un prix littéraire fondé par Gala Barbisan, une Russe blanche qui tenait salon à la manière de ce qui se pratiquait dans les années 1950 et Jean-Pierre Giraudoux (fils de Jean Giraudoux) le 1er avril 1958 afin de couronner un roman, un récit, un recueil de nouvelles dont l'auteur débute ou n'a pas encore une notoriété correspondant à son talent. Il était auparavant attribué en même temps que le Prix Femina à l'hôtel de Crillon mais est maintenant décerné deux jours plus tard au restaurant La Méditerranée. Le premier élu, Claude Ollier avec La Mise en scène quant au dernier, en 2011, il s’agit de Mathieu Lindon avec Ce qu’aimer veut dire.
Je pourrais citer également les prix, des Libraires, de France-Inter, le Grand prix des lectrices de Elle ou du roman FNAC et tant d’autres encore. Au point qu’on peut imaginer qu’il soit particulièrement vexant pour un écrivain de n’être pas lauréat d’un prix, tellement il y a de récompenses sur le marché… Bien entendu, ces récompenses littéraires vont de paire avec les intérêts financiers des éditeurs et des auteurs, d’où polémiques diverses et modifications aux règlements pour que les membres des jurys ne soient pas affiliés à des maisons d’édition.
En fait, toutes ces petites salades ne m’intéressent guère, car je n’attache pas d’intérêt aux prix, aucun d’eux n’ayant motivé mon envie de lire un bouquin. Je rappellerai aussi que ces prix ne sont pas synonymes de qualité littéraire absolue, pour preuve, quand on reprend les listes des gagnants depuis les origines de chaque prix, combien sont tombés dans l’oubli le plus total ? Ou bien encore ce loupé célèbre avec « l'exemple le plus souvent cité, l'attribution du prix 1932 à Guy Mazeline pour son roman Les Loups, l'année de la publication de Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline évincé par 6 voix contre 4 ».
Que tout cela ne nous fasse pas perdre de vue que la littérature, ce ne sont pas que des prix et des honneurs, mais surtout d’excellents moments de lecture.
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