Gustav Meyrink et Prague
10/11/2012
Gustav Meyrink est autrichien (1868-1932) et l’un des principaux écrivains de littérature fantastique en langue allemande. Ses œuvres sont fortement inspirées des sciences occultes dont il était un adepte. Si j’associe Meyrink et Prague (en Tchéquie) c’est que l’écrivain y vécu durant une vingtaine d’années et l’a beaucoup utilisée dans ses romans, je pense particulièrement à ses bouquins les plus connus, Le Golem et La Nuit de Walpurgis.
C'est en 1915 que Meyrink publia son premier roman, Le Golem. Le livre fut un succès énorme, il fut souvent réédité et fit l'objet de plusieurs adaptations cinématographiques par la suite. Un bouquin qui marqua tellement mon imagination jadis que lorsque je suis allé visiter Prague il y a deux ans, j’avais sans cesse à l’esprit ce Golem dont l’ombre me suivait partout dans les ruelles de la vieille ville et particulièrement dans l’ancien ghetto Juif. Revenons sur cette créature étrange…
« C’est alors que resurgit secrètement en moi la légende du Golem, cet être artificiel qu’un rabbin cabaliste a créé autrefois à partir de l’élément, ici même, dans ce ghetto, l’appelant à une existence machinale, sans pensée, grâce à un mot magique qu’il lui avait glissé derrière les dents. »
Il y eut des golems partout en Europe Centrale, mais seul celui de Prague devint célèbre. C’est rabbi Löw (1520-1609) qui en serait le créateur. Fabriqué avec de la glaise de la Vltava, le fleuve qui traverse Prague, et lui donnant l’apparence humaine, « la chose » s’animait quand le rabbi lui plaçait dans la bouche un chem, un morceau de parchemin sur lequel était inscrit le nom de Dieu car dans la tradition juive les lettres hébraïques sont dotées d’une puissance créatrice « qui attire les forces sidérales libres de l’univers ». Le golem était utilisé comme un serviteur possédant de supers pouvoirs « pour sonner les cloches de la synagogue et faire les gros travaux » ainsi que protéger la communauté juive contre les pogroms.
Un jour à la veille du sabbat, le rabbi parti à la prière oublia de retirer le chem de la bouche de l’être de glaise. Golem pris de folie furieuse, mis le ghetto à feu et à sang. Le rabbi Löw réussit à le calmer et le réduire en la poussière dont il était issu, en procédant ainsi : sur le chem était inscrit le mot « Emeth » qui signifie vérité en hébreu mais est aussi un des noms de Dieu. En effaçant le « E » il obtint « Meth » qui veut dire mort. D’après la légende, les restes du Golem reposeraient dans le grenier de la synagogue Vieille-Nouvelle qui est la plus vieille d’Europe, construite en 1270 ses premières pierres proviendraient du Temple de Jérusalem. Quant au rabbi Löw (Juda Liva ben Betsalel, dit rabbi Löw) il est enterré dans le Vieux cimetière juif fondé dans la première moitié du XVe siècle.
« Qui peut dire qu’il sait quelque chose sur le Golem ? On le relègue dans le domaine des légendes jusqu’au jour où un évènement survient dans les ruelles qui lui redonne brusquement vie. Alors pendant un certain temps tout le monde parle de lui, les rumeurs prennent des proportions monstrueuses et elles finissent par devenir si exagérées qu’elles sombrent du fait même de leur invraisemblance. »
Quant à Gustav Meyrink, après le suicide de son fils Fortunat à l’âge de 24 ans – signe du destin auquel il n’a pas dû rester insensible, c’est l’âge auquel Gustav avait failli se suicider lui-même – il survécu six mois avant de s’éteindre le 4 décembre 1932.
* Toutes les phrases entre guillemets sont extraites de mon édition du roman de Gustav Meyrink Le Golem paru chez Marabout (1969).
Source des photos : Le Bouquineur
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