Benjamin Whitmer : Pike
12/08/2013
Benjamin Whitmer est né en 1972 et a grandi dans le sud de l'Ohio et au nord de l'État de New York. Il a publié des articles et des récits dans divers magazines et anthologies avant que ne soit publié en 2010 son premier roman, Pike, (2012 pour la traduction française). Il vit aujourd’hui avec sa femme et ses deux enfants dans le Colorado, où il passe la plus grande partie de son temps libre en quête d'histoires locales, à hanter les librairies, les bureaux de tabac et les stands de tir des mauvais quartiers de Denver.
Douglas Pike, ancien truand rangé, est de retour dans sa ville natale des Appalaches proche de Cincinnati. Il vit de petits boulots avec son jeune comparse Rory, par ailleurs boxeur en devenir. Lorsque sa fille Sarah disparue de longue date, meurt d’une overdose, Pike se retrouve en charge de sa petite-fille de douze ans, Wendy. Pike et la gamine commencent à s'apprivoiser lorsqu’un flic brutal et véreux, Derrick Kreiger, entre dans le jeu. Tandis que Douglas Pike et Rory cherchent à en apprendre davantage sur la mort de Sarah, Derrick nettoie autour de lui les traces le reliant à la morte.
Le roman de Benjamin Whitmer est paru dans la collection « Noire » de Gallmeister mais pour l’occasion ils auraient pu en créer une nouvelle, « Noire de chez noire ». Car attention lecteur de polars, si tu t’aventures dans ce bouquin, tu entres en Enfer. Mauviettes et âmes sensibles passez votre chemin.
Si l’intrigue proprement dite n’est pas exceptionnelle, comme le prouve le rapide résumé ci-dessus, le roman dégage des vapeurs délétères qui mettent mal à l’aise. Ici des enfants d’alcooliques sont violés par des junkies, des crimes sont commis sans états d’âme et le lecteur est entraîné dans un marécage fait de sang, de sperme et de vomi, territoire d’une fange de population où même la police a sombré depuis bien longtemps.
Des chapitres très courts qui accélèrent le rythme de la narration, des détails horribles (« La lame accroche, déchire, arrache la chair en ouvrant une béance qui le décapite presque complètement ») et des scènes très dures, la violence est omniprésente. Benjamin Whitmer a trouvé un ton original qui marie action statique et violence permanente, car la froideur des acteurs de ces scènes épouvantables crée une sensation étrange à la longue. Comme un film au ralenti. Aucun des personnages du roman n’est propre, tous utilisent la force, no one is innocent, les cadavres jonchent le sol et la caravane passe.
Un roman très noir, très dur et très impressionnant. Un premier roman qui nous oblige à garder un œil sur les prochaines parutions de cet écrivain nouvellement né.
« Mais ensuite le gosse fit deux erreurs. La première fut de s’engager dans la ruelle. C’était la plus évidente. Mais la seconde était une en réalité une erreur de jugement qu’il avait commise beaucoup plus tôt, probablement le matin, à l’instant où il avait choisi quelles chaussures mettre. Il en portait une paire aux lacets démesurément longs qu’il trainait derrière lui comme des queues de rats. Et il avait trébuché dessus. Fashion victim. Derrick s’était figé, avait visé, puis avait fait feu à deux reprises. Son pistolet avait tressauté dans sa main comme une chose vivante, et les deux grosses balles de .45 avaient fait rouler le gosse comme un fagot de bois sec poussé par une bourrasque. »
Benjamin Whitmer Pike Gallmeister
Traduit de l’américain par Jacques Mailhos
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