Bernard Ollivier : Longue marche (Le Vent des steppes)
03/02/2014
Bernard Ollivier est un journaliste et écrivain né en 1938 dans la Manche. Après une carrière de journaliste politique et économique, à la retraite et veuf, il décide de se consacrer à l'écriture et de marcher jusqu'à Saint Jacques de Compostelle avant d’entreprendre une longue marche sur la Route de la Soie. Comme écrivain, il publie des nouvelles dont un recueil sur les sans domicile fixe, des romans policiers, mais aussi des récits de ses voyages. Le succès de ses ouvrages lui permet de fonder plus tard l'association Seuil pour la réinsertion par la marche des jeunes en difficulté.
Longue Marche est un récit en trois volumes, relatant son voyage de 12 000 kilomètres à pied sur la Route de la Soie, d’Istanbul à Xian en Chine. Le premier tome était consacré au trajet effectué entre Istanbul en Turquie, jusqu’à la frontière avec l’Iran. Le second paru en 2001, se poursuit de l’Iran jusqu’à Samarcande en Ouzbékistan, en passant par le Turkménistan, c’est-à-dire sur près de 2100 kilomètres. Et voici le dernier volet de cette incroyable aventure, paru en 2003, qui emmène Bernard Ollivier et nous dans son sillage, de Samarcande jusqu’à sa destination finale, Xian en Chine.
Des plateaux du Pamir (3200m) aux déserts du Taklamakan ou de Gobi, quand on suit son parcours sur les cartes insérées dans l’ouvrage – que serait un livre de voyage sans cartes ?- on a le vertige devant l’ampleur de la tâche qui l’attend et qu’il accomplira. Si l’homme est modeste, il peut se targuer néanmoins d’être « en deux milles ans d’histoire, le seul homme qui ait accomplit intégralement, seul et à pied, la route de la Soie. » Arriver à pied par la Chine, il fallait le faire effectivement !
Car cet ultime trajet se déroule principalement en Chine où il crapahute durant 4500 km, soit le tiers du parcourt total. Si jusqu’alors depuis son départ de Turquie, grosso modo, quelques soient les pays traversés, les gens étaient aimables et accueillants (tradition musulmane), les Chinois vont s’avérer beaucoup moins aimables avec les Longs nez (étrangers occidentaux). Il lui sera beaucoup plus difficile de loger chez l’habitant, partout on cherchera à l’arnaquer avec des prix gonflés, résultat de la longue situation politique du pays recroquevillé sur lui-même d’abord, puis du mot d’ordre de Deng Xiaoping (1904-1997) « Enrichissez-vous ! » Ce n’est, le plus souvent, que lorsqu’il croisera des chinois musulmans, qu’il retrouvera la tradition des accueils chaleureux pour les voyageurs dans son genre. Mais avec l’inconvénient suprême de ne pas parler un mot de Chinois, alors qu’il avait emmagasiné quelques notions des langues utilisées par les autochtones des pays traversés précédemment, d’où un ressenti de solitude particulièrement éprouvant.
Un périple en demi-teinte donc, ponctué aussi d’incidents en tout genre, une grosse araignée dans sa tente, un cadavre momifié laissé depuis un an dans un fossé sans que quiconque ne s’en émeuve et toujours ces sempiternelles complications administratives aboutissant à des situations complètement ubuesques lors des passages de frontières ou contrôles policiers.
Conséquence, Ollivier avoue avoir hâte d’en finir et confronté à la problématique des visas qui imposent des temps de passages stricts et contraignants, l’homme pressé conforté par ces alibis traverse un peu la Chine à la vitesse maximum autorisée par ses mollets. Un bémol à cette trilogie baladeuse pour le lecteur, qui lui confortablement installé dans son fauteuil, aurait aimé traînasser un peu au pied de la Grande Muraille… Au bout du compte, Bernard Ollivier s’interroge encore sur le sens de cette longue marche, sans y trouver une explication particulièrement convaincante. Mais après tout, pourquoi devrait-il toujours y avoir des explications à nos actes ?
« Pour les toilettes, on a prévu grand et il y a six places, c’est-à-dire six trous dans une dalle de béton. Deux sont déjà occupés par des garçons qui fument une cigarette et devisent tranquillement comme s’ils étaient au salon. Je choisis le quatrième trou, peu soucieux de convivialité en ce lieu. Mais à peine suis-je accroupi qu’une meute d’adolescents vient prendre possession de l’espace, en face, à ma droite et à ma gauche. A quoi peut bien ressembler un Occidental déféquant ? Et les longs nez ont-ils un seul appendice long ou bien en ont-ils deux ? »
Bernard Ollivier : Longue marche (3- Le Vent des steppes) Phébus
2 commentaires
Les "chinois musulmans", si ce sont des ouigours, peuvent comprendre le turc (langues proches)
Quant aux toilettes pour plusieurs, j'ai testé (juste avec une française du groupe...)
Il s’agit effectivement des Ouïgours. L’extrait que je cite est facile et j’espérais bien que son aspect folklorique amuserait ( ?). Sans entrer dans les détails de votre expérience, j’imagine que c’est le genre de souvenir de voyage qui marque…
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