Glendon Swarthout : Homesman
20/05/2014
Glendon Swarthout (1918-1992) est un écrivain américain, auteur de romans de westerns et de polars. Professeur d'anglais à l'Université Concordia Ann Arbour, dans le Michigan, il publie son premier roman en 1943. Il écrit ensuite pour le théâtre. En 1958, Ceux de Cordura lui vaut la notoriété quand ce roman est adapté au cinéma l'année suivante, sous le titre éponyme, par Robert Rossen. En 1975, Glendon Swarthout fait paraître Une gâchette (The Shootist) adapté au cinéma par Don Siegel sous le titre Le Dernier des géants. Son roman, Homesman, est paru en 1988 et vient d'être réédité.
Au cœur des grandes plaines de l'Ouest, au milieu du XIXe siècle, Mary Bee Cuddy est une ancienne institutrice solitaire qui a appris à cultiver sa terre et à toujours laisser sa porte ouverte. Cette année-là, quatre femmes, brisées par les conditions de vie extrêmes en hiver et un choc psychologique dramatique ont perdu la raison, « L’une a assassiné son bébé. La deuxième a eu tellement la frousse des loups qu’elle est devenue timbrée. Une autre a essayé de descendre son gars. La plus jeune, elle a perdu trois gamins en deux jours. De la diphtérie. ». A l’initiative du pasteur qui a déjà testé la méthode l’année précédente, la solution consiste à rapatrier les démentes vers l'Est, vers leurs familles et leurs terres d'origine. Mary Bee accepte d'effectuer ce voyage de plusieurs semaines à travers le continent américain. Pour la seconder, Briggs, un bon à rien, voleur de concession voué à la pendaison, devra endosser le rôle de « rapatrieur » (Homesman, néologisme inventé par l’auteur) et l'accompagner dans son périple de cinq semaines à travers le Missouri.
Tout le roman tourne autour des rapports entre Mary Bee et Briggs. Elle, c’est l’honnête femme attachée aux règles d’humanité et à la compassion chrétienne ; lui, sauvé de la pendaison in extremis, est un vieux loup solitaire qui ne se fixe jamais, a beaucoup roulé sa bosse et connait tous les trucs de survie dans ces grands espaces, « C’était un homme sûr de lui. Il n’avait peur de rien, pas même des mots. Et il puisait sa force à la source de l’ignorance. » La seule arme que possède Mary Bee pour s’assurer que Briggs remplira sa mission, la promesse qu’il lui a faite après que sa vie ait été sauvée et une somme d’argent versée à l’arrivée. Mais que vaudront ces arguments quand la petite troupe devra affronter les mauvaises rencontres et la folie dangereuse des convoyées ?
Ecriture sèche et rythme enlevé, de nombreuses séquences très visuelles d’où son adaptation cinématographique. Mais aussi des situations prévisibles ou limite nunuches contrebalancées par des rebondissements (dont un magistral à l’approche de la fin que je vous laisse découvrir) inattendus. On pourra aussi s’interroger sur la psychologie des personnages, un peu datée pour le lecteur d’aujourd’hui. Un bon roman c’est certain, mais dont j’attendais mieux encore au vu de son scénario.
« C’était une complainte d’un tel désespoir qu’elle déchirait le cœur et enfonçait ses crocs au plus profond de l’âme. Mary Bee porta les mains à ses oreilles. Des larmes lui dévalaient le long de ses joues, les larmes qu’elle avait retenues et accumulées la veille et au cours de la journée. C’était comme si les créatures tragiques à l’intérieur du chariot comprenaient enfin ce qui leur arrivait : qu’on les arrachait à tous ceux qu’elles aimaient, à leurs hommes, à leurs enfants, vivants ou morts ; à tout ce qu’elles aimaient, à leurs graines de fleurs, à leurs bonnets et à leurs alliances – pour ne plus jamais revenir. Le chariot grondait. Mary Bee sanglotait. Briggs poussait les mules. Les femmes continuaient à gémir. A gémir. »
Glendon Swarthout Homesman Gallmeister – 281 pages
Nouvelle traduction de l’américain par Laura Derajinski (Première publication française en 1992 aux Presses de la Cité sous le titre Le Chariot des damnées)
L'adaptation cinématographique de ce roman par Tommy Lee Jones, qui joue aux côtés d'Hilary Swank et de Meryl Streep, vient d’être présentée au Festival de Cannes et sort demain en salles.
12 commentaires
Je le note, pas de doute qu'il me plaira. Et après, je regarderai le film, je n'aime pas voir les adaptations avant de me faire ma propre vision d'une histoire, d'un style.
D’accord avec vous Sandrine, je préfère lire le roman avant d’en voir son adaptation cinématographique. Le roman est la source, les images que j’en retire mon interprétation de l’œuvre, seul ce couple roman/moi est important. Le film ne peut pas être le reflet de mes propres images… même s’il est réussi.
Je soupire très fort (c'est l'auteur de Le tireur, paru chez totem)
J’imagine que ce soupir est un soupir de gratitude envers l’auteur ? Je note « Le Tireur » dans mon calepin, vos conseils étant souvent précieux.
Ce type de roman me plait particulièrement, vrai aussi que l'écriture peut datée un peu mais tant pis je ferai avec
Comme Sandrine le film sera pour après
Le roman est bon. Si j’émets une légère réserve c’est que je suis moins enthousiaste que la quatrième de couverture, comme d’habitude ! Et que d’autres écrivains en auraient fait un roman beaucoup plus poignant…
Bonjour Le bouquineur, j'espère arriver à le trouver d'occasion assez vite pour l'offrir à mon ami (qui veut le lire) (23,10 euros neuf, c'est cher). Sinon, le film est vraiment très très bien. Bonne journée.
C’est vrai que les livres sont chers, j’y pense toujours quand j’écris un billet pour que les lecteurs de ce blog puissent se faire une bonne idée du roman avant d’investir dans son achat. Certes il y a les bibliothèques, mais chez moi les bonnes nouveautés sont assez rares… J’ai prévu de voir le film dans les prochains jours, non pas en raison du roman mais parce que j’aime beaucoup Tommy Lee Jones….. !
Un roman que j'ai trouvé très fort et sans doute inoubliable !
Je suis moins enthousiaste que vous Hélène. Le roman est bon mais je pense qu’il pouvait être meilleur encore. Les points forts, des situations intrinsèquement dures (décès d’enfants etc.) oui, mais qui ne sont pas magnifiées par l’écriture un peu trop sobre. Donc, un très bon scénario mais qui ne propulse pas le roman aussi haut que souhaité. J’ai dans l’idée que des écrivains comme Lance Weller ou Bruce Machard en auraient fait un chef d’œuvre poignant… le roman n’en ayant que le potentiel, en l’état.
J'ai vraiment adoré ce livre, il est extrêmement émouvant et j'ai trouvé ce protagoniste féminin central très impressionnant :)
Je crois que tout le monde a aimé ce roman, du moins je n'ai pas connaissance d'avis contraires. Que ceux qui ne l'ont pas encore lu, n'hésitent pas...
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