Pascal Quignard : Mourir de penser
18/10/2014
Pascal Quignard, né en 1948 à Verneuil-sur-Avre dans l'Eure, est un écrivain français. Il a été lauréat du prix Goncourt 2002 pour Les Ombres errantes. Violoncelliste, il a fondé le Festival d'opéra et de théâtre baroques de Versailles. L'un de ses livres les plus connus est certainement le court roman Tous les matins du monde, dont le succès est lié à la version cinématographique réalisée par Alain Corneau. Son dernier ouvrage paru il y a peu, Mourir de penser, s’inscrit dans le cycle du Dernier royaume et en constitue le neuvième volume.
Cet ouvrage qui n’est pas un roman, s’attache à comprendre ce qu’est la pensée et tend à démontrer une proximité entre elle et, la mort, la mélancolie, et les traumatismes.
Le bouquin est extrêmement savant, écrit d’une plume trempée dans l’érudition classique qui transpire de citations ou références latines et grecques mais autant vous l’avouer tout de suite, je n’ai rien compris, ou presque, de ce que j’ai lu. De ci, de là, une esquisse d’idée m’a intrigué, j’ai deviné d’astucieux raisonnements découlant de l’étymologie des mots et des sens multiples engendrés par l’usage. Et c’est à peu près tout.
Normalement, je ne devrais pas ( ?) chroniquer ce livre puisque je ne l’ai pas compris, si je le fais néanmoins c’est que je n’en ressors pas indemne. J’ai d’abord j’ai été étonné de pouvoir aller jusqu’au bout, alors qu’il m’était complètement incompréhensible quand je tombais, par exemple, sur ce genre de phrase typique du style de l’écrivain : « L’inversion, du moins la rétroversion, l’énantiodromie, est à l’origine de la noèse. » J’étais fasciné par l’écriture et ces mots jamais inscrits dans mon vocabulaire. Moi qui n’hésite pas à critiquer les bouquins mal écrits, j’étais là devant un livre tellement bien rédigé et instruit qu’il me paraissait écrit dans une langue étrangère. Sauf qu’il n’était pas traduit. Je touchais du doigt l’humilité. J’étais en présence d’un livre écrit pour l’élite intellectuelle, tenu à distance par le pouvoir des mots et là, j’ai connu l’humiliation. Se colleter avec son ignorance, ce n’est pas rien.
Au final j’en viens à m’interroger, un bouquin auquel je n’ai absolument rien compris mais qui s’avère néanmoins par un effet collatéral m’avoir profondément ébranlé, n’est-ce pas « quelque part » la preuve que c’est un grand livre ? La preuve par l’absurde ou bien une grosse daube ?
« L’âme des humains comme les goûts alimentaires de tous les animaux sont dominés par la figure de la régression. Tout désir retourne au préféré. La compulsion de répétition n’est pas intrinsèquement mauvaise. Méta-phore en grec dit la même chose que trans-fert en latin. Le retour à l’identique c’est le conatus lui-même. Il est vital de retourner sur ses pas. Il est bon de dévorer avec délice ce qu’on mangea avec bonheur. La retrogressio est acquise en même temps que la migratio, parce que c’est le même mouvement ex utero qui vient fonder l’ellipse (aussi spatiale que temporelle) de la régression (aussi temporelle que spatiale)."
Pascal Quignard Mourir de penser Grasset – 222 pages –
2 commentaires
Pascal Quignard : j'aime ces romans et comme vous, je peine à sortir indemne de ses essais
Un bouquin qui m'a mis en rage et dont je garde encore un souvenir cuisant qui n'est pas prêt de s'effacer !
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