Nicolas Fargues : Tu verras
30/08/2015
Nicolas Fargues est un écrivain français né en 1972 à Meulan. Après une enfance au Cameroun, au Liban, puis en Corse, il entame des Etudes de Lettres à la Sorbonne et rédige un mémoire de DEA portant sur la vie et l’œuvre de l’écrivain égyptien Georges Henein. Suivront deux ans de coopération en Indonésie avant de revenir à Paris, où, entre 1998 et 2002, il est tour à tour agent d'accueil à la Bibliothèque historique de la ville de Paris, lecteur chez Gallimard, pigiste à Nova Magazine et au quotidien québécois Le Devoir, concepteur-rédacteur de bandes annonces pour France 2. Après deux romans, Le Tour du propriétaire (2000) et Demain si vous le voulez bien (2001), il rencontre le succès public et critique avec One Man Show en 2002. Tu verras, est paru en 2011.
Colin, le narrateur, vient de perdre son fils Clément, âgé de douze ans, dont il avait obtenu la garde depuis son divorce d’avec Hélène. Ce décès particulièrement tragique et soudain, remet en cause et donne un nouvel éclairage au passé de parent de Colin.
Tout ce que ce père croyait savoir de son fils n’était qu’aveuglement. En se remémorant les temps récents avec Clément, Colin prend conscience que le monde a changé, le rap, les jeans baggy laissant voir la raie des fesses, tout cela est la réalité d’aujourd’hui, qu’il le veuille ou non. Tous les reproches adressés à son fils, tous ces « Plus tard, tu comprendras que c’est pour ton bien que je te disais ça, tu verras », comme il les regrette maintenant et sont la preuve de son incapacité à avoir compris son enfant. A travers le fils disparu, c’est le père qui se découvre et s’interroge sur sa propre vie, comment a-t-il mené sa barque jusqu’à maintenant, a-t-il fait les bons choix et pris les bonnes décisions ?
L’écrivain interpelle le lecteur, les rôles parents/enfants sont-ils rejoués à l’identique génération après génération. Aimer ses enfants n’est-ce pas aussi les étouffer, de quoi est fait le fameux amour parental ? Mais aussi les familles éclatées et recomposées, vie professionnelle et vie familiale etc. Des questions fondamentales qui viennent enrichir un texte superbe, l’écriture est soignée, la narration subtile et l’émotion très palpable mais très digne.
Dans la dernière partie du roman, Colin part rapidement en Afrique à Ouagadougou, à la rencontre d’une sorte de sorcier local, sensé le délivrer de la souffrance de son deuil. Même si on veut bien accepter ce voyage incongru, la fin ouverte – seul épilogue possible – laissant entendre qu’une nouvelle vie est possible pour Colin, reste un chouïa décevante dans ses dernières lignes. Ce léger bémol n’altère en rien la qualité globale du roman.
« « Est-ce que tu était au courant, pour le Facebook de Clément ? » elle m’a demandé d’une voix exsangue mais néanmoins déterminée à ne pas flancher en ma présence. « Facebook ? » Evidemment non, je n’étais pas au courant. De Facebook, d’abord, je ne connaissais à peu près que le mot. Contrairement à la plupart des gens de ma génération, je n’avais pas eu la curiosité de m’y inscrire dans le seul but d’éviter de devenir trop vite un vieux con, préférant m’en tenir avec Facebook, comme avec les MSN, MySpace et autre Twitter, aux mêmes préjugés que je nourrissais vis-à-vis du rap, des émissions de téléréalité et des baggies portés pas comme il faut. »
2 commentaires
J'aime le style de Nicolas Fargues. Lu il y a quelques années, je me souviens que la fin m'avait laissé sur ma faim...
Oui c’est vrai ! Ca se joue sur quelques lignes à peine, les toutes dernières du roman et j’avoue que pour moi elles ne sont pas très claires. C’est bien dommage car tout le reste du bouquin est réellement très bien…
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