Ron Carlson : Retour à Oakpine
23/02/2016
Ron Carlson est né en 1947, en Utah. Il est l'auteur de plusieurs recueils de nouvelles et de romans qui ont reçu de nombreuses distinctions aux États-Unis. Il enseigne la littérature à l'Université de Californie, à Irvine, et vit à Huntington Beach.
Oakpine est une petite ville paisible du Wyoming. Jimmy, écrivain bien connu à New York, proche de la cinquantaine aujourd’hui, mais ruiné et atteint d’une maladie ne lui laissant plus que quelques mois à vivre, retrouve sa ville natale et ses parents pour y finir ses jours. Mason lui, avocat à Denver, revient aussi à Oakpine mais pour mettre en vente la maison familiale désertée par des locataires en fuite. Trente ans après, la bande de copains d’alors est de nouveau réunie, Jimmy, Mason, Frank qui tient un bar dans la ville et Craig la quincaillerie. Chacun a évolué dans sa sphère, les adolescents d’hier sont devenus des hommes adultes et ils arrivent à un tournant de leur vie.
J’en vois déjà qui font la moue, ouais des mecs qui se retrouvent devenus adultes et qui se remémorent leurs souvenirs de jeunesse, on connait, on a lu cela cent fois et le cinéma n’est pas en reste sur le coup. Oui, vous avez en partie raison, le sujet est connu et pour ainsi dire rabâché. Mais, comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire quand je m’adresse à de jeunes écrivains me soumettant leurs œuvres, les sujets de romans ne sont pas si nombreux que l’on croît, seul le traitement que l’on en fait mérite réellement notre attention. Et là, Ron Carlson fait très fort, se hissant largement au-dessus de ses deux ouvrages précédents (Le Signal et Cinq ciels).
L’écriture est précise et très détaillée sans être jamais bavarde. Tout fait sens pour donner du corps au roman mais surtout de l’âme. De l’âme, de l’émotion, le bouquin en est chargé jusqu’à la gueule car tout sonne juste. Vous ne pourrez que vous régaler à lire ces belles pages touchantes ou ces passages bouleversants à vous embuer les yeux comme par exemple quand Jimmy que son père ne veut plus voir (je vous laisse découvrir pourquoi), logera dans le garage réaménagé par ses potes sous la bienveillance aimante de sa mère.
Le récit alterne le passé et le présent, cet espace-temps formant une boucle : le décès accidentel de Matt hier et celui de Jimmy, son frère, aujourd’hui ; à moins que ce ne soient les départs du toit familial pour Jimmy et Mason quand ils étaient jeunes et leur retour en ces mêmes murs à l’âge adulte ; ou encore ce groupe de rock éphémère qu’ils reformeront pour une ultime prestation hommage. Le rock tenant une place assez importante, finalement, dans cet ouvrage, comme un symbole fort, le groupe fait la force, le groupe c’est la concrétisation visible de leur amitié éternelle. D’où ce message, l’amitié est plus forte que l’amour et c’est elle qui nous sauve.
Un excellent roman qui tout du long m’a parlé, je me suis glissé sans problème dans la peau de ces amis, recevant cinq sur cinq leurs émotions, leurs joies et leurs peines.
« Ils avaient fait leur vie. La chasse et le foot à l’automne. Le magasin. Noël en ville avec les parents de Marci, maintenant que les siens n’étaient plus là. Le nettoyage de printemps et les soldes au magasin. La pêche. Les années. Il ne s’était jamais senti vieux, jamais, sauf à deux moments. Lorsqu’ils étaient revenus de Clearwater et qu’il avait commencé au magasin, mais il s’en était remis. Et maintenant, il se sentait vieux une nouvelle fois, en entendant prononcer le nom de Jimmy Brand et en apprenant son retour à Oakpine. »
Ron Carlson Retour à Oakpine Gallmeister - 282 pages –
Traduit de l’américain par Sophie Aslanides
4 commentaires
J'étais déjà convaincue, j'ai lu les deux précédents, qui montent en gamme dans la qualité, d'ailleurs.
C'est bien vrai pour les sujets, je ne sais plus où j'ai lu ça, on a 'un étranger arrive en ville' et ? je ne sais plus.
D’accord avec vous Keisha pour la montée en puissance de cet écrivain au fil de ses romans. D’autant plus appréciable que ça donne envie de lire le prochain ! Par contre, je se saisis pas le sens de la fin de votre commentaire « on a 'un étranger arrive en ville »…. Il n’y a pas d’étranger dans ce roman, tous les personnages se connaissent puisqu’ils sont tous amis, parents ou relations d’enfance…
Je regrette de ne pas avoir trouvé la citation, qui disait qu'en fait il y a deux genres d'histoires, 'un étranger arrive en ville' ou 'quelqu'un quitte sa ville'. Peut être à propos de cinéma, je ne sais plus.
Bref, tout ça pour dire que le nombre de vrais sujets bien différents est réduit;
Ok ! Je comprends mieux....... et je suis d'accord avec cette affirmation !
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