Oscar Wilde au Petit Palais
05/10/2016
Paris offre enfin sa grande exposition à l’écrivain Oscar Wilde, au Petit Palais. Ce sont plus de deux-cents pièces, dont des inédits, qui sont proposés au public : manuscrits, dessins, tableaux, photographies… permettent de mieux cerner et d’entrer dans l’univers de ce francophone et ardent francophile, à la vie mouvementée.
Oscar Wilde, pour ceux qui le connaissent le moins, ce sont ces petites phrases et aphorismes dont tous les recueils de citations font mention et pour ceux qui ont déjà ouvert un livre de l’écrivain, très certainement le célèbre Portrait de Dorian Gray.
Oscar Wilde, dont le nom complet est Oscar Fingal O'Flahertie Wills Wilde, est un écrivain irlandais, né à Dublin le 16 octobre 1854 et mort à Paris le 30 novembre 1900. Né dans la bourgeoisie irlandaise et protestante de Dublin, Oscar Wilde se distingue par un parcours scolaire brillant et c’est à l'université d'Oxford qu’il se construit un personnage d’esthète et de dandy, sous l’influence des préraphaélites et des théories de « L'art pour l'art » de Walter Pater, John Ruskin ou Whistler. A l’issue de ses études, Wilde s’installe à Londres, où il parvient à s'insérer dans la bonne société et les cercles cultivés, s’illustrant dans plusieurs genres littéraires, son œuvre recouvrant le roman la poésie et le théâtre.
Dans son roman Le Portrait de Dorian Gray (1890) il explore les liens entre la beauté, la décadence et la duplicité. Sa pièce Salomé (1891), rédigée en français à Paris l’année suivante, ne peut être jouée en Angleterre, faute d’avoir obtenu la licence d’autorisation, au motif qu’elle met en scène des personnages bibliques. Wilde enchaîne avec plusieurs comédies de mœurs, qui font de lui l’un des dramaturges les plus en vue de Londres. Indissociables de son talent littéraire, sa personnalité hors du commun, le mordant de son esprit, le brillant de sa conversation et de ses costumes assuraient sa renommée.
Au faîte de sa gloire, alors que sa pièce maîtresse L'Importance d'être Constant (1895) triomphe à Londres, Oscar Wilde poursuit le père de son amant Alfred Douglas pour diffamation, après que celui-ci a entrepris de faire scandale de son homosexualité. Après une série de trois procès retentissants, Wilde est condamné pour « grave immoralité » à deux ans de travaux forcés. Ruiné par ses différents procès, condamné à la banqueroute, il écrit en prison De Profundis, une longue lettre adressée à son amant dont la noirceur forme un contraste saisissant avec sa première philosophie du plaisir. Dès sa libération en mai 1897, il quitte définitivement la Grande-Bretagne pour la France. C’est dans ce pays d’accueil qu’il met un point final à son œuvre avec La Ballade de la geôle de Reading (1898), un long poème commémorant l’expérience éprouvante de la vie en prison. Il meurt à Paris en 1900, dans le dénuement, à l'âge de quarante-six ans.
L’exposition permet donc de voir des manuscrits autographes : des sonnets, une lettre adressée à sa mère en 1868 quand il était au pensionnat, une à son père en 1875 avec des croquis d’œuvres Etrusques vues dans un musée de Florence. D’autres lettres, plus tard quand il sera en France, à Mallarmé, Edmond de Goncourt ou Henri de Régnier. Mais bien sûr, on peut aussi voir les manuscrits de L’Importance d’être constant, du Portrait de Dorian Gray ainsi que d’une édition de ce roman de 1891 dédicacée.
Une pièce de l’exposition est consacrée à Salomé, pièce écrite en français en 1891, avec les illustrations d'Aubrey Beardsley qui l'ont rendue célèbre, des affiches présentant le mythe de Salomé, et une projection de son adaptation en film par Charles Bryant (1923).
De nombreuses photographies aussi, celles prises par Napoleon Sarony (dont celle illustrant ce billet) lors de son voyage aux Etats-Unis en 1882 pour un cycle de conférences sur l’art. Ou bien ces photos avec Lord Alfred Douglas de Queensberry, son amant rencontré en 1891. Tous deux mèneront une vie débridée en affichant en public leur homosexualité ce qui entraînera le scandale Queensberry et un procès, le père du jeune homme provoquant Wilde plusieurs fois, comme avec cette carte de visite exposée ici, où pour se faire présentée à Wilde dans un club sélect, est inscrit au dos « sodomite ».
De nombreux tableaux d’artistes de l’époque sont accrochés aux murs, avec un commentaire de Wilde en regard ; par exemple, pour « La dernière heure du crépuscule » de William Holden Hunt, cette remarque « Comme étude de couleur c’est superbe mais il est difficile de s’intéresser humainement à cette paysanne Egyptienne. »
Enfin le parcours s’achève avec des esquisses du sculpteur Jacob Epstein prévues pour orner la tombe d’Oscar Wilde. C'est d'ailleurs à Paris, au Père-Lachaise, qu'est enterré ce francophile, qui avait écrit dans une lettre à Edmond de Goncourt : « Français de sympathie, je suis irlandais de race, et les Anglais m'ont condamné à parler le langage de Shakespeare. »
Pour conclure, je retiendrai cette formule bien typique de Wilde : « Il n’existe pas de livre moral ou immoral. Un livre est bien écrit ou mal écrit : un point c’est tout. »
Les photos étant interdites, je n’ai rien pu faire pour ornementer ce billet de documents intéressants… désolé !
Exposition : Oscar Wilde, l'impertinent absolu, du 28 septembre au 15 janvier 2017, au Petit Palais, avenue Winston-Churchill, Paris (VIIIe).
Photo : Le Bouquineur Sources : le fascicule offert à l’entrée de l’expo, Wikipédia et les notes du volume de la Pléiade consacré à l’auteur
3 commentaires
Je partage absolument cette excellente conclusion : « Il n’existe pas de livre moral ou immoral. Un livre est bien écrit ou mal écrit : un point c’est tout. »
Une expo que j'irai voir… Enfin s'il ne faut pas passer deux heures dans une file d'attente…
En tout cas, merci pour ce billet très intéressant !
Comme vous vous en doutez je partage complètement l’avis de Wilde sur les livres… Concernant la file d’attente, rassurez-vous, il n’y en a pas !!! Moi, ces longues files me désespèrent et j’ai raté nombre d’expos à cause de cela, mais pour celle-ci, si il y avait un monde raisonnable de gens dans l’exposition, il n’y avait par contre absolument personne à l’entrée quand j’y suis allé ce mercredi en fin de matinée.
Ah merci, je vais peut-être tenter le coup alors, si le boulot me laisse un peu de temps… La dernière en date que j'ai loupée à cause du monde, c'était "David Bowie is." Je l'ai un peu regretté, vous l'imaginez, mais je ne supporte pas les files d'attente et les salles pleines de monde.
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