Yann Queffélec : Le Charme noir
08/06/2017
Yann Queffélec (de son vrai prénom Jean-Marie), né à Paris en 1949, est un écrivain français. Il est le fils de l'écrivain Henri Queffélec, le frère de la pianiste Anne Queffélec et du mathématicien Hervé Queffélec. Il a été marié à la pianiste Brigitte Engerer avec laquelle il a eu une fille, Léonore (1985). Amoureux de la mer et de sa Bretagne, il a pu naviguer avec Eric Tabarly. Il n'entame véritablement sa carrière d'écrivain qu'en publiant à 32 ans une biographie de Béla Bartók et quatre ans plus tard, il reçoit le prix Goncourt pour son roman Les Noces barbares. Il est l'auteur de nombreux romans et d'un recueil de poèmes. Le Charme noir, son premier roman, est paru en 1983.
C’est l’histoire d’un mec. Marc. Enfant, il n’a pour ainsi dire pas connu sa mère partie vivre sa vie ailleurs. Plus tard un de ses frères se suicidera, et entre son père pharmacien et son autre frangin, l’embryon de famille ne lui voue pas un grand amour. Il faut aussi reconnaitre, qu’il n’y met pas du sien, quand il ne court pas la gueuse ou ne biberonne pas ses pastis, il passe ses journées à glander. Envoyé en Algérie, pendant la guerre du même nom, il va en baver des ronds de chapeau et quand il reviendra en France, c’est une Sylvia qui va beaucoup souffrir d’avoir eu le malheur de le rencontrer.
Disons le tout net, Marc, le héros de ce roman est du genre sale mec ! Un personnage assez épouvantable dont je n’ai pas réussi à isoler la moindre qualité qui pourrait sauver son personnage. Du coup j’ai passé tout mon temps de lecture à trépigner d’agacement devant ses faits et gestes.
Le roman est en trois parties. La première revient sur son enfance et adolescence dans l’Eure, dressant le portrait de l’homme en devenir : l’alcool et les femmes pour l’action, le glandage pour occuper ses temps libres. Ambiance. La seconde partie est très dure. La guerre d’Algérie avec tout ce que cela induit, la guerre sale par excellence, tortures, viols, humiliation des populations par les soldats, humiliation des soldats par leurs officiers. Dans la troisième section, vingt ans après son retour d’Afrique du nord, Marc croise le chemin de Sylvia laquelle va entretenir avec lui des rapports tenant du sadomasochisme, traitée comme une moins que rien, il vit à ses crochets comme un vulgaire gigolo tandis qu’elle s’accroche néanmoins à lui par amour… le cœur a ses raisons que la raison ignore comme dit l’autre.
Un roman avec un héros particulièrement détestable mais un bon roman pour deux raisons : il est très bien écrit, un peu à l’ancienne, avec des néologismes euphoniquement très réussis et du vocabulaire d’époque, mais surtout il fait réagir le lecteur tant il est dur et révoltant, or n’est-ce pas là le but de la littérature ?
« Il portait une gourmette : Gérald. Un prénom mou comme sa lèvre inférieure. A la naissance on vous enregistrait, à l’école on vous enregistrait, à l’église on vous enregistrait, à l’armée on vous enregistrait, vivre c’était signer, coucher son nom partout, sous des visas, sous des tampons, alors basta, pas de gourmette, une identité de papier ça suffisait, nul besoin de la couler dans l’argent massif. »
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