Caryl Férey : Les Nuits de San Francisco
09/11/2017
Caryl Férey, né en 1967 à Caen, est un écrivain français spécialisé dans le roman policier. Après avoir grandit en Bretagne près de Rennes, il parcourt l'Europe à moto, puis fait un tour du monde à 20 ans. Il travaille notamment pour le Guide du routard. Un premier roman en 1994 avant que d’autres suivent. Les Nuits de San Francisco qui date de 2014 vient d’être réédité en poche. Pas vraiment un roman, plutôt une novella.
Sam est un Sioux qui a pas mal bourlingué. Après avoir connu la misère dans sa réserve il a tenté sa chance à droite et à gauche, comme un boulot dans le bâtiment à Las Vegas mais la crise l’a exilé plus à l’Ouest et il se retrouve à San Francisco, noyant dans l’alcool sa détresse. Un soir, il croise une femme avec une prothèse à une jambe, Jane, elle aussi en a bavé. Ils auront droit à une nuit d’errances pour s’accorder quelques heures d’une sorte de bonheur… ?
Le texte étant très court, mon billet se doit de l’être aussi. L’histoire semble connue, voire banale et ce n’est pas faux. Pourtant, Caryl Férey réussit à la magnifier ; je ne sais pas trop comment à vrai dire, l’écriture ne m’a pas paru exceptionnelle, les misères de Sam et de Jane sont du domaine du déjà lu, l’alcool pour l’un, viol, enceinte, accident de voiture et maintenant dope... pour elle.
Pour autant, j’ai trouvé tout cela très beau, si je peux dire. Nous assistons au destin tragique de deux âmes en peine qui partageront une nuit, non pas d’amour dans le sens sexuel du terme, mais de réconfort mutuel dans les bras l’un de l’autre. Pour d’autres ce ne serait pas grand-chose, mais pour nos deux cabossés de la vie, Sam et Jane c’est énorme. « Nos destins sont liés : c’est la nuit qui nous a réunis » déclare Jane à Sam. Liés à la vie à la mort.
Un bien beau petit roman qui a su me toucher.
« Le Sioux ruminait sur le sort des petits cailloux perdus au fond de lui, quand une silhouette apparut dans son angle mort. Elle passa à sa hauteur, et Sam ressentit comme une décharge dans le cœur. La table voisine l’empêcha de la voir en entier : le temps de relever la tête elle était déjà de profil, chaloupant sa croupe au fil de l’air et du temps qui courait à sa suite. Une silhouette féminine, émouvante, qui l’espace d’un instant le ramenait à des plaies heureuses. Sam se revit enfant, regardant sa mère se baigner, son père encore fier à ses côtés, ado sautant plus tard dans la même rivière, amoureux – Shirley « Petit Nuage », une fille de la bande… Des larmes oubliées lui montèrent aux yeux, qui déjà n’y voyaient à moitié plus rien : d’où sortait cette apparition ? »
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