Gaston Leroux : La Machine à assassiner
02/04/2021
Gaston Leroux (1868-1927) est un romancier français. Gaston-Alfred-Louis Leroux grandit en Normandie et après avoir obtenu le baccalauréat de lettres au lycée de Caen, il s'installe à Paris en octobre 1886 où il s'inscrit à la faculté de droit. Devenu avocat en 1890, il exerce cette profession jusqu'en 1893. Pour arrondir ses fins de mois, il écrit des comptes rendus de procès pour le journal L'Écho de Paris. A partir de 1901, devenu grand reporter, il effectue de nombreux voyages en France et à l'étranger, notamment en Espagne et au Maroc. Sa renommée s’appuie sur la série des romans avec Joseph Rouletabille ou ses chefs-d’œuvre comme Le Mystère de la chambre jaune (1907), Le Parfum de la dame en noir (1908) et Le Fantôme de l’Opéra (1910).
La Machine à assassiner est la suite de La Poupée sanglante, tous deux romans de 1923. Si les deux ne font qu’un, à mon grand étonnement ces deux ouvrages sont diamétralement opposés ou, si le terme est exagéré, complètement différents l’un de l’autre. Et ce billet ne pouvant traiter de manière isolée ce second volet sans le comparer au premier, je préviens ceux qui seraient tentés de lire ce diptyque que je risque de déflorer le mystère…
L’intrigue de La Poupée sanglante se résumait grosso modo à l’enchevêtrement de trois mystérieuses affaires : un personnage étrange nommé Gabriel, tenu au secret chez un horloger de l’île Saint-Louis à Paris et finalement assassiné ( ?) par l’orfèvre et son neveu Jacques Cotentin étudiant en anatomie, au grand désespoir de Christine, sa fille ; un relieur d’art, Bénédict Masson, voisin de ceux-ci, amoureux transi de Christine et guillotiné en fin d’ouvrage, reconnu coupable d’assassinat de jeunes femmes dans sa résidence secondaire en grande banlieue ; d’un comte qui semble immortel grâce à la vie qu’il suce en sa femme… Ce premier volet s’achevait en nous laissant en plan, rien de ces mystères n’était certifié avéré et peut-être n’était-ce que notre imagination qui courait à sa guise ? Tout était étrange, le fantastique rôdait dans toutes les pages, le suspense était haletant et l’épilogue incertain attisait une frustration qui faisait de cette Poupée sanglante (titre inapproprié alors) un excellent roman.
Une suite s’imposait, La Machine à assassiner était là pour répondre à toutes nos interrogations. Et oui, nous avons une explication « logique » à ces trois affaires liées – de ce genre de logique qu’on accepte pour ce type de roman, bien entendu. Réponses qui auront leurs origines dans les progrès de la science et les fantasmes induits chers aux écrivains et, pour ajouter une touche d’extravagance exotique comme on l’appréciait à cette époque, l’entrée en scène, bien que modeste, des Thugs !
Alors en quoi cet ouvrage est-il si différent du premier ? Le premier, c’était comme assister à un merveilleux spectacle de prestidigitation qui vous laisse pantois et ravi, le second c’est d’apprendre comment l’artiste à procédé ! La Machine à assassiner est un vrai polar un peu désuet. Gabriel, « la chose », a enlevé Christine et perpétuerait de nouveaux crimes à l’identique de ceux de Bénédict Masson (déjà guillotiné), la police lui court après et de leur côté, Jacques et l’horloger, qui savent tout, tente de récupérer Gabriel les premiers… Le mystère n’est plus aussi prégnant, la tonalité générale est même à la rigolade ( ?) : des scènes burlesques, des dialogues avec un directeur de la police qui m’ont faire penser à De Funès dans Fantômas etc. Les portraits/croquis de personnages secondaires tous issus des classes populaires (retraités, petits commerçants…) sont très amusants et l’épilogue se clôt sur une note d’humour.
Aussi suis-je bien ennuyé pour conclure. Autant j’ai adoré le premier tome, autant je suis un peu/beaucoup désappointé avec celui-ci : La Machine à assassiner n’est pas un mauvais roman mais il est tellement différent de l’autre, plus vieilli aussi tout en étant plus amusant que je ne sais quoi penser de l’ensemble ?
PS : j’ai parlé de diptyque – mot qui m’est venu tout seul sous la plume – pour évoquer ces ouvrages, or en recherchant la définition exacte de ce mot dans le Larousse, je lis : « Œuvre composée de deux parties qui s’opposent ou se mettent en valeur par contraste. » Tout est dit.
« Disons tout de suite que cet événement était « un enlèvement », mais quel enlèvement ! D’abord, Mme Langlois : « Je vais tout vous dire, monsieur le commissaire… Faut jamais faire un vœu ni un souhait parce que, c’est comme dans la fable, ça peut vous sauter au nez !… Mlle Barescat, qui nous avait priées à sa camomille, venait à peine de dire : « Je voudrais bien le voir de près, votre Gabriel »… que le voilà justement qui entre, comme un démon de la tempête, tout couvert de sang avec ça… et portant Mlle Norbert, la demoiselle de l’horloger, évanouie sur son bras comme si elle ne pesait pas plus qu’un fichu de dentelle… à elle aussi le sang lui coulait de la figure… Nous avons tous poussé un cri comme vous pensez bien… un cri horrible ! Moi, j’ai crié : « C’est lui, Gabriel !… » « Ah ! Seigneur !… je vivrais cent ans !… Nous étions comme des statues de la terreur, quoi ! devant une invasion pareille !… Cette neige, ce sang !… et cet homme qui nous menaçait de son revolver !… La première fois que j’avais vu cet homme-là chez l’horloger, il m’avait paru beau ! mais maintenant je ne pourrais plus dire ! Je ne vois plus que ses yeux qui étaient épouvantables !… des yeux d’assassin !… »
Exceptionnellement je ne précise pas l’édition de ce livre car je l’ai lu dans une sorte de fichier PDF imprimé à la va-comme-je-te-pousse, carrément minable mais néanmoins vendu sur internet !!! La photo de l’ouvrage devrait vous permettre d’éviter ce choix, si vous êtes tentés par cette lecture.
Par contre voici où trouver gratuitement ces deux livres : La poupée sanglante et La Machine à assassiner
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