Abir Mukherjee : Les Princes de Sambalpur
11/10/2021
Abir Mukherjee, né en 1974 à Londres, est un romancier britannique d'origine indienne. Diplômé de la London School of Economics il s’est lancé dans le monde de la finance avant d’entamer en 2017 une carrière d’écrivain de polars avec une série mettant en scène le capitaine Sam Wyndham, ancien inspecteur de Scotland Yard qui faisait partie de la police impériale et le sergent Surendranath Banerjee. Le premier volet, L’Attaque du Calcutta-Darjeeling, m’ayant beaucoup plu il n’y avait aucune raison pour ne pas lire ce nouvel ouvrage qui vient de paraître.
Calcutta en 1920. Le prince héritier Adhir, fils du maharajah de Sambalpur, cinquième fortune d’Inde, traverse la ville dans sa Rolls Royce quand il est assassiné par une sorte de fou halluciné qui s’enfuit. Où ça la fiche vraiment mal, c’est qu’à ses côtés dans la voiture se trouvaient Sam Wyndham et son adjoint Sat Banerjee, chargés de sa protection ! Le second connaissant bien le prince, ils avaient côtoyé la même université. Chargés de l’enquête, nos deux amis partent pour le petit royaume au sud-ouest du Bengale…
La construction du roman tend à rendre le suspense de l’enquête insoutenable, ajoutant page après page un mobile du crime à un autre : raison politique et lutte de pouvoir, cause religieuse, motif économique quand il apparait que les mines de diamants du royaume seraient en vente à un consortium étranger, dépit amoureux etc. chacun proposant un nouveau coupable éventuel. Le final est trépidant, enchainant les chutes multiples jusqu’à l’ultime éclaircie.
Avec ce deuxième et toujours excellent polar, les grandes lignes du style de l’écrivain sont bien définies. Le ton est léger, Sam ne manque pas d’humour (anglais ?) et les intrigues doivent être lues à cette aune, gentilles et de bon goût, sans sexe ou violence. Pour faire une comparaison hasardeuse, certes, ça me donne autant de plaisir qu’une enquête de Tintin, d’autant qu’ils sont deux comme dans la BD avec Milou…
S’il n’y avait que l’intrigue policière ça pourrait être un peu court, mais on sait que le polar historique est un bon filon et Abir Mukherjee sait nous faire revivre cette époque où l’Angleterre sent que sa colonie frétille d’un désir d’émancipation, ici la mise en place d’une Chambre des Princes (genre Chambre des Lords) pour calmer la montée des autonomistes, ce qui pourrait expliquer l’attentat.
On ajoutera une belle dose d’exotisme (avec un petit glossaire en fin d’ouvrage pour faire bonne mesure) avec ce qu’il est convenu de voir en Inde, le harem du sultan et ses secrets, les fumeries d’opium dont Sam est client, les rites religieux complexes et la chasse au tigre à dos d’éléphant…
Le lecteur enfin, se régale des caractères des acteurs, Sam amoureux transi d’Annie Grant, l’anglo-indienne déjà croisée dans l’épisode précédent, Sat l’adjoint doté d’un sage bon sens mâtiné de sa connaissance des mœurs et coutumes de son pays.
Je résume : moi, j’adore cette série qui débute, mais je comprends très bien aussi que tout ce que je viens de dire – favorable à mon sens – peut être lu inversement comme la chronique d’un polar trop pépère. Chacun verra midi à sa porte, moi j’attends la suite avec impatience !
« Je me sens soudain d’humeur morose. Mon séjour à Sambalpur est terminé. Deux hommes massacrés, une maharané arrêtée, un maharajah frappé d’une attaque et une enquête ostensiblement résolue. Pendant un instant je prie avec ferveur pour qu’elle le soit réellement. Faute de quoi, le sang répandu hier soir et celui qui pourrait l’être plus tard seraient sur mes mains."
Abir Mukherjee Les Princes de Sambalpur Folio - 408 pages -
Traduit de l’anglais par Fanchita Gonzales Battle
4 commentaires
Mais oui, il faut une suite, tranquillement, mais o n apprend des choses sur ce coin et cette période, et puis il y a de l'humour.
Une suite oui, mais pas trop vite car je suis certain qu’un jour je vais m’en lasser… Dans l’immédiat profitons de ces bons moments de lecture, amusants autant qu’instructifs !
Bonsoir Le Bouquineur, j'aime beaucoup cette série. Je viens de terminer le troisième tome, Avec la permission de Gandhi qui se passe en décembre 1921. J'ai encore aimé et j'attends le quatrième. C'est d'autant plus étonnant que je ne suis pas du tout attirée par l'Inde. Bonne soirée.
C’est le propre des bons bouquins, nous faire aimer ce qui à priori n’est pas d’un domaine qui nous attire. Une très bonne série et j’espère bien lire d’autre volets dès que possible…
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