Sempé : La Grande panique
16/12/2021
Jean-Jacques Sempé, né en 1932 à Pessac près de Bordeaux, est un dessinateur humoriste français. Ses dessins ont été publiés entre autres dans Sud-Ouest, L'Express, Le Figaro, Le Nouvel Observateur, Télérama, The New Yorker, Ici Paris, Paris Match etc. Jean-Jacques Sempé quitte l'école à un peu plus de quatorze ans, étant resté deux ans sans y aller, pendant la Seconde Guerre mondiale, alors qu'il était dans les Pyrénées. Il trouve un emploi de livreur à bicyclette pendant un an et demi et est en 1950 représentant en dentifrice en poudre puis courtier en vin. Il commence à cette époque sa carrière de dessinateur humoristique dans la presse en plaçant quelques dessins en 1950 dans Sud-Ouest qu'il signe d'abord « DRO », de l'anglais « to draw » (dessiner). En 1954 il fait une rencontre décisive, celle de René Goscinny dans les bureaux d’une agence de presse belge située sur les Champs-Elysées, prélude à une longue amitié et le lancement de sa carrière quand ces deux-là créeront Le Petit Nicolas.
La Grande panique, album paru en 1966, n’est qu’un prétexte (et le seul livre que j’avais à portée de main) pour illustrer ce billet qui se veut avant tout, un hommage à cet énorme artiste.
Si de jeunes lecteurs ne connaissent pas Sempé, je leur recommande fortement de le lire dans ses albums en grands formats pour mieux en apprécier la richesse. A première vue, pour celui qui découvre pour la première fois ses dessins, ça semble simpliste et vite torché, en noir et blanc qui plus est, ça fait pauvre : un petit bonhomme en bas d’une grande page presque blanche par exemple. Mais regardez bien attentivement ce personnage, son œil ou sa bouche, la courte ligne de texte accompagnant le dessin, et soudain tout s’illumine, ce qui n’était qu’un croquis anodin devient un magnifique instant de vie et de réalisme. Sempé va directement à l’essentiel, rien n’est superflu ; d’autres, très bons aussi dans leur style, mettrait des couleurs à leurs dessins hyperréalistes et très représentatifs, le lecteur en prendrait plein les mirettes, subjugués par les apparences reléguant le dit en arrière-plan. Sempé fait l’inverse, il offre un petit croquis de rien du tout à vos yeux mais quand vous l’examinez de près (parfois une loupe n’est pas inutile), il vous terrasse par sa justesse et vous arrache un sourire.
Dans ces conditions, un album doit se lire très lentement, chaque relecture proposant une nouvelle perspective source d’autres sourires et joies. Sempé, c’est l’observateur attentif de nos vies simples, le petit commerçant, les passants dans la rue, le café de quartier, les gamins dans les squares etc. Il voit tout, il connait nos travers, nos naïvetés, notre bêtise, il a bien vue que notre société évoluait éloignant l’homme de ses basiques, le réduisant à n’être qu’un pion sur un échiquier. Un personnage seul (ou presque) dans un dessin, ou seul au milieu d’une foule.
Et ses foules, parlons-en. Des personnages palots, à peine esquissés, mais observés de près on relève de petits détails insignifiants qui différencient chacun, quant au personnage central du dessin, il est certainement dans un coin, mais dans un trait plus gras donnant l’impression qu’un projecteur de cinéma le met en lumière, lui permettant de lâcher la réplique qui tue.
Les dessins de Sempé sont des miroirs dans lesquels on ne peut que se reconnaitre. Ce pourrait être douloureux parfois, mais l’artiste est d’une rare élégance et nous dit en dessins : regardez-vous, vous n’êtes que de petites fourmis un peu ridicules mais je vous aime comme ça, alors souriez-en !
Du très grand art.
On approche de la période des fêtes, offrez des albums de Sempé, faites-le connaitre aux jeunes générations ; quant aux autres, rouvrez ses livres, goutez quelques planches, du bonheur facile.
Sempé La grande panique Denoël
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