Henning Mankell : L’Homme qui souriait
02/08/2013
Henning Mankell est un écrivain suédois né en 1948 à Stockholm. Très vite abandonné par sa mère, il est élevé par son père, juge d'instance. Il est le gendre d'Ingmar Bergman dont il a épousé en secondes noces la fille Eva. Il partage sa vie entre la Suède et le Mozambique où il a monté une troupe de théâtre. Il est connu internationalement grâce à la série policière des enquêtes de Kurt Wallander. L’Homme qui souriait est paru chez nous en 2005.
Nous retrouvons Kurt Wallander à un tournant de sa carrière. Après dix-huit mois d’arrêt maladie pour dépression – il a tué un homme alors qu’il était en état de légitime défense – Wallander se prépare à donner sa démission de la police. Quand son vieil ami l'avocat Sten Torstensson vient lui demander de l'aide — son père Gustav vient de mourir dans des circonstances mystérieuses —, l'inspecteur refuse puisqu’il a décidé de quitter la police. Mais de retour à Ystad, lorsqu'il apprend que Sten Torstensson est mort, tué par balle, il change d'avis, déchire sa lettre de démission et demande à se charger de l'enquête sur la mort des deux avocats. Il découvre bientôt que Gustav Torstensson s'occupait presque exclusivement des affaires d'Alfred Harderberg, richissime propriétaire de sociétés dans le monde entier.
Comme d’habitude je vais vous donner mon avis personnel sur ce roman mais je reconnais qu’avec Henning Mankell je suis souvent dubitatif. L’écrivain est encensé dans le monde entier pour sa série de polars, or je trouve que c’est le mauvais angle pour le présenter. Si vous n’avez jamais lu un bouquin dont Wallander est le héros, vous risquez en tant qu’amateur de polars d’être déçu et je le comprendrais très bien. En fait, l’écrivain écrit de bons romans dont la toile de fond est du domaine du polar. Nuance.
Ici encore, si on ne considère que l’aspect polar du livre, l’intrigue n’est pas remarquable et l’on pourrait y dénicher des invraisemblances et des faiblesses en tous genres : un policier qui tombe dans les pommes parce qu’il voit un homme armé entrer dans un aéroport ! Ou bien notre héros qui « pour une raison mystérieuse, avait encore son pistolet à la main » ce qui arrange bien l’écrivain pour redresser la situation ! S’il n’y avait qu’une enquête ou une histoire policière dans les romans de Mankell, ça serait un peu court.
Heureusement, il y a tout le reste. Kurt Wallander est un anti-héros profondément attachant car il n’est fait que de faiblesses bien humaines. Solitaire et ne vivant que pour son boulot, il se désespère de n’avoir jamais le temps de s’occuper de son vieux père ou de sa fille qui s’est éloignée. A l’aube de la cinquantaine, il se demande ce qu’il a fait de sa vie et le bilan entrevu n’arrange guère son état dépressif quasi chronique. Aux aspects psychologiques de son héros récurrent, Henning Mankell met dans la bouche de Wallander, ses réflexions sur l’état de la justice, de la police, de la Suède son pays et du monde en général. Là encore, le constat est amer, « Le monde est peut-être le même. Mais son image, non. » A cette grisaille mentale, ajoutez la météo locale où bourrasques, froid, brouillard et neige sont le courant des autochtones et un rythme le plus souvent lent.
Rassurez-vous, tout ceci n’interdit pas d’avoir un bon roman entre les mains, mais de là à dire que c’est un bon polar, il y a une marge. En tout cas moi j’aime beaucoup la série des Kurt Wallander et comme il m’en reste encore quelques uns à lire, nous en reparlerons tôt ou tard.
« La femme au chien et l’homme au pardessus noir continuèrent donc à se croiser comme deux navires pendant une semaine encore. Mais un jour – le 24 octobre 1993 -, elle fut témoin d’un évènement qu’elle mettrait par la suite en relation avec la disparition subite du promeneur solitaire. C’était par exception un jour de calme plat où le brouillard pesait immobile sur la plage et sur la mer. Les cornes de brume mugissaient au loin comme du bétail abandonné. Le singulier paysage tout entier retenait son souffle. Soudain, en apercevant le type au pardessus, elle se figea. »
Henning Mankell L’Homme qui souriait Seuil
Traduit du suédois par Anna Gibson
2 commentaires
Bonsoir, c'est vrai que Wallander est un personnage suffisamment intéressant pour qu'on suive ses enquêtes avec passion. Je n'ai plus que l'homme inquiet à lire. Je me le garde car je vais être triste de ne plus revoir Wallander. Bonne soirée.
Moi aussi Dasola il me reste quelques romans à lire pour clore la série. Je prends mon temps car il ne faut jamais enchainer plusieurs livres d’un même auteur à la suite, l’intérêt se diluant au fur et à mesure en règle générale. De plus, savoir qu’un plaisir est à venir, rajoute au bonheur de la lecture.
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