Jean-Paul Didierlaurent : Le Liseur du 6h27
08/07/2015
Jean-Paul Didierlaurent est un écrivain français né en 1962 à la Bresse dans le département des Vosges. Après des études à Nancy (D.U.T de publicité), il travaille quelques temps à Paris avant de retourner dans les Vosges. Il découvre le monde de la nouvelle en 1997 avec déjà un premier prix. Son premier roman, paru en 2014, Le Liseur du 6h27, a rencontré immédiatement un franc succès.
Guylain Vignolles (vilain guignol, disent les mauvaises langues) est un employé plutôt discret, chargé du fonctionnement d’une broyeuse au sein d’une entreprise de destruction des livres invendus. Un boulot pratiqué à contrecœur, mais il faut bien vivre, entre le désespoir de voir mourir tous ces livres, son patron le gros Kowalski toujours sur son dos et ne raisonnant qu’en termes de résultats ou son adjoint exaspérant, le grand Brunner. Et puis cette machine, La Chose, comme il la nomme, une bête à la voracité insoupçonnée et mystérieuse autant que dangereuse, régulièrement on découvre des cadavres de rats au sein de ses entrailles sans compter que dans le passé, elle a arraché les deux jambes de son ami Giuseppe Carminetti, désormais invalide. Pour se sortir de ce quotidien terne, Guylain s’est trouvé une échappatoire, tous les matins dans le wagon du RER, il lit à haute voix pour les passagers, des feuillets récupérés intactes du pilon.
Quel joli petit livre ! Tout y est charmant, je crois que c’est le mot qui résume le mieux cet ouvrage. C’est joliment écrit, d’une écriture douce sans être molle qui laisse supposer que l’écrivain serait incapable de dire du mal des gens ou du monde dans lequel évoluent ses personnages, mêmes les « méchants » sont présentés comme de pauvres êtres finalement risibles.
Le roman raconte une double quête. Guylain tombé amoureux et partant à la recherche d’une inconnue rencontrée par le biais d’une clé USB trouvée dans le RER, contenant des textes, sorte de journal où elle narre ses journées de dame-pipi dans un centre commercial (talent de l’écrivain pour rendre jubilant des passages scatologiques). Autre recherche, celle de Giuseppe, pour ses deux jambes perdues, dont je ne vous dirai rien car elle relève du grand art de l’imagination narrative de l’écrivain.
Ce roman est un petit bijou d’humour tendre et délicat, sans message ou interrogations existentielles ; une gentille histoire pleine de poésie, un délicieux roman.
« Non, tout ne va pas si bien que ça, eut envie de rétorquer Guylain. J’attends le retour d’un père mort depuis vingt-huit ans, ma mère me croit cadre dans une société d’édition. Tous les soirs, je raconte ma journée à un poisson, mon boulot me dégoûte à tel point qu’il m’arrive de dégueuler tripes et boyaux, et enfin pour couronner le tout, je suis en train de tomber sous le charme d’une fille que je n’ai jamais vue. En résumé, donc, pas de problème, sauf que je suis quand même dans tous les domaines un petit peu « à la limite inférieure de la courbe », si vous voyez ce que je veux dire. »
Jean-Paul Didierlaurent Le Liseur du 6h27 Au Diable Vauvert – 218 pages –
2 commentaires
J'aurais bien aimé que le roman soit plus long, en savoir plus sur certains personnages secondaires... Mais cela prouve que j'ai aimé, non?
Je crois comprendre ce que vous voulez dire mais je pense que ce sont ces points (roman court, manque de détails sur certains personnages, enchaînement de séquences pas toujours parfait) qui paradoxalement, font l’excellence de ce bouquin !
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