Richard Byrd : Seul
16/06/2017
Richard Evelyn Byrd (1888 - 1957) est un explorateur polaire et aviateur américain de l'US Navy ayant le grade de contre-amiral. Byrd tente le survol du pôle Nord quelques jours avant le survol du pôle par Amundsen avec le dirigeable Norge. Il reçoit alors la médaille du Congrès. Le 29 juin 1927, il réalise un vol transatlantique de New York à Ver-sur-Mer (France). C'est en 1928 qu'il lance sa première expédition dans l'Antarctique avec deux navires et trois avions spécialement équipés. Un équipement radio permit le suivi mondial de l'expédition. Durant l'été 1928, un camp de base est construit sur la grande barrière de Ross, dénommé Ver-sur-Mer, en souvenir de l'accueil qu'il avait reçu lors de son amerrissage pour sa traversée de l'Atlantique en juin 1927. Le 29 novembre 1929, Byrd tente le survol du Pôle Sud qu'il réussit après un vol périlleux de 18 heures à basse altitude. Il lancera encore trois expéditions en Antarctique : En 1933-1935, en 1939-1941 et en 1946-1947. Seul qui vient tout juste d’être réédité, relate la première expédition qui faillit lui être fatale.
En 1934, Richard Byrd, chef d’une expédition dans l’Antarctique, quitte les cinquante membres du groupe et leur base, pour s’installer seul, dans un abri construit à une dizaine de jours de marche de là. Il est chargé de faire des relevés scientifiques et météorologiques. L’expérience, va durer de mars à août mais ce n’est que quatre ans plus tard, une fois digérée la terrible épreuve où il faillit laisser la vie que Byrd va en coucher le déroulé sur le papier.
Nous avons tous eu froid, un jour ou l’autre, panne de chauffage ou équipement trop léger lors d’une randonnée mais tout cela n’est que gnognotte comparé à ce qu’à vécu Richard Byrd, lui va subir des températures variant entre –50 et -70 degrés ! Personnellement j’ai du mal à réellement imaginer à quoi cela ressemble.
On peut dire que les ennuis ont commencé dès les premiers jours. La réclusion était prévue pour trois hommes mais l’exiguïté du lieu contraint Byrd à n’envoyer qu’un homme et ce sera lui. A peine installé, il se luxe une épaule et quand on voit comme la vie est dure dans ce milieu hostile, où le moindre geste réclame des efforts, le handicap n’arrange pas ses affaires. Le chauffage de son abri n’est pas suffisant pour empêcher que tout gèle sur place, la neige et la glace vont condamner la porte de l’abri, une première fois il ne pourra pas sortir mais pire encore, une autre fois il ne pourra pas rentrer ! Si ce n’est au prix d’efforts herculéens. Je passe sur tous les incidents, la radio qui déconne et jusqu’au drame, les tuyauteries du chauffage dérouillent par ce froid sans nom, conséquence Byrd manque mourir asphyxié par le monoxyde de carbone ; il en trainera les séquelles et un épuisement généralisé très longtemps et devra se passer de chauffage le plus possible, « La nuit dernière, une de mes oreilles s’est gelée tandis que je reposais. »
Le texte, écrit longtemps après cette expédition, est une réécriture de son journal de bord et des notes qu’il y avait consignées. L’écriture est très précise dans les faits rapportés mais ce qui fait tout l’intérêt de ce livre, c’est son analyse ou ce que nous en déduisons, de la solitude. Une solitude voulue certes, mais absolue, car il ne peut compter sur personne pour venir le secourir rapidement en cas de danger. Il va connaitre la peur et frôler la mort. Mais malgré cette situation insupportable, au bout du bout des forces qu’un homme puisse endurer, toujours Byrd pensera à la sécurité de ses hommes, jamais il ne leur dira ce qu’il souffre pour éviter qu’ils ne se ruent à son secours et risquent d’y perdre leur propre vie dans cette nature redoutablement mortelle. Animé aussi par une sorte de pudeur, « Je n’aime pas beaucoup évoquer les détails de mon effondrement (…) C’est un sujet que je préfère ne pas étaler au grand jour, car il sied que les douleurs de l’homme, comme ses amours, restent cachées. »
On nous annonce un été chaud, avec ce bouquin glissé dans votre sac de plage, vous êtes parés pour les canicules les plus sévères !
« Je tentais de ne pas regarder vers le nord pour ne pas être déçu ; mais je le fis néanmoins, car peut-être au loin les feux du tracteur apparaissaient-ils. Une lueur vacillante me fit sursauter : ce n’était qu’une étoile à l’horizon. Le ciel était entièrement clair, sauf un pâle croissant d’aurore dans le quart de cercle nord-est. Cela me satisfit ; au moins ceux du tracteur pourraient-ils le voir, mais où qu’ils soient, me dis-je, aucun mortel ne peut voyager longtemps par un tel froid. Mes poumons paraissaient se resserrer à chaque souffle, et l’air que j’exhalais par l’ouverture du masque gelait et craquait. »
Richard Byrd Seul Libretto – 268 pages –
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Henry Muller
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