Haruki Murakami : La Fin des temps
06/07/2017
Haruki Murakami né à Kyoto en 1949, est un écrivain japonais. Fils d'un enseignant de littérature japonaise en collège, il opte pour les arts théâtraux et souhaite devenir scénariste de cinéma. Après ses études à l'université il est pendant huit ans, responsable d'un bar de jazz à Tokyo, l’une de ses passions avec les chats. Après un premier ouvrage publié au Japon en 1979 et sa renommée établie après plusieurs romans à succès, il part vivre à l'étranger, en Europe (Italie et Grèce), puis aux Etats-Unis. Il revient vivre au Japon en 1995, marqué par le tremblement de terre de Kobe et l'attentat au gaz sarin de la secte Aum dans le métro de Tokyo. Haruki Murakami est également traducteur en japonais de plusieurs écrivains anglo-saxons parmi lesquels Scott Fitzgerald, John Irving ou encore Raymond Carver. La Fin des temps, quatrième roman de l’écrivain, date de 1992 pour la traduction française.
Quel roman ! Je précise immédiatement que j’ai adoré car ce qui va suivre sera peut-être moins explicite. Plus de six-cents pages (moi qui déteste les longs romans…) dont les deux-cents premières m’ont semblé incompréhensibles, incapable de saisir de quoi il retournait, mais sans que jamais ne me vienne à l’idée que je puisse abandonner ma lecture ; et même maintenant que je l’ai terminé, je ne suis pas certain de l’avoir compris. Tant pis, je me lance :
Le roman raconte deux histoires distinctes (en apparence), « Le pays des merveilles sans merci » et « La fin du monde », en chapitres alternant. Dans la première, le narrateur est programmeur dans le Tokyo des années 80, chargé d’une mission pour un vieux professeur spécialisé dans divers domaines et en particulier le cerveau. Deux organisations secrètes, System et Factory, vont venir mettre le chambard dans la vie de notre héros. Mais il faudra aussi lutter contre les répugnantes « ténébrides » vivant dans les souterrains de la ville, heureusement de charmantes jeunes filles viendront à son aide… Dans la seconde histoire, un autre narrateur, est chargé de « lire les vieux rêves » dans des crânes de licornes ; l’action se déroule dans une ville très étrange et close de murs, une prison ne disant pas son nom, où notre héros a dû se séparer de son ombre qui vit sa propre vie à l’écart ! Là aussi, une jeune fille va aider le brave garçon.
Tout ceci est la partie simple à comprendre du bouquin. J’entre maintenant dans l’interprétation personnelle. Très, très lentement et avec beaucoup de parcimonie, l’écrivain va semer des indices laissant entrevoir que les deux histoires n’en font qu’une, résultant d’une expérience scientifique sur le cerveau du premier narrateur. Et il se pourrait bien que ces deux histoires, ne soient que les pensées intimes d’une seule et unique personne au vu de quelques similitudes de faits entre les deux récits. Le roman serait donc comme une expédition à l’intérieur du cerveau d’un schizophrène…
Il n’y a que des points forts dans ce livre mais citons d’abord l’écriture : facile à lire dans la forme (car il ya aussi les passages scientifiques ou du moins vendus comme tels et sur lesquels repose le scénario, pas toujours aisés à suivre), douce avec un humour délicat, qui fait avaler tous ces mystères et incompréhensions. Le récit lui aussi est particulièrement gratiné, riches en évènements (expéditions risquées, poursuites etc.) qui s’enchainent les uns aux autres, non que le rythme soit réellement rapide, mais l’étrangeté des faits racontés scotchent le lecteur. Et que dire des personnages, tous sont particulièrement attachants et il y a même des histoires sentimentales attendrissantes.
Et le roman ne serait pas parfait s’il ne contenait des réflexions sur le sens de la vie ; de celles qu’on aime à souligner au crayon en cours de lecture, pour y revenir plus tard, « C’est parce qu’existent le désespoir, la désillusion, la tristesse, oui, c’est de là que naît la joie. Une béatitude sans désespoir n’existe nulle part. »
Impressionnant.
« Reprenons : à la demande d’un savant, je m’étais rendu dans son labo de recherches souterrain pour y traiter des données. A cette occasion, il m’avait offert quelque chose qui ressemblait à un crâne de licorne, que j’avais ramené chez moi. Au bout d’un moment, un employé du gaz, apparemment soudoyé par les pirateurs, s’était présenté pour essayer de me voler ce crâne. Le lendemain matin, coup de téléphone de la petite-fille de mon commanditaire, pour me demander de venir au secours de son grand-père qui avait été attaqué par les ténébrides. Moi, je me précipitais sur les lieux du rendez-vous, elle, elle ne se manifestait même pas. Apparemment, j’étais en possession de deux précieuses marchandises. L’une étant le crâne, l’autre, les données du shuffling. Je les avais mises toutes deux à l’abri à la consigne temporaire de la gare de Shinjuku. »
Haruki Murakami La Fin des temps Points - 629 pages –
Traduit du japonais par Corinne Atlan
2 commentaires
Oh oui, impressionnant, j'avais adoré moi aussi !
Un roman que nous conseillons fortement même si, j'en conviens, il ne plaira pas à tous obligatoirement...
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