Stéphane Héaume : Le Clos Lothar
09/05/2018
Stéphane Héaume, né à Paris en 1971, est un romancier français. Il écrit également des textes pour des compositeurs de musique classique. Après plusieurs années passées en Afrique et à New York, il vit aujourd'hui entre Paris et Trouville-sur-Mer. Il a huit romans à son actif, dont ce Clos Lothar, son premier, paru en 2002.
Dans un pays indéterminé, à une époque non précisée, un coup d’état a donné le pouvoir à un régime totalitaire qui interdit aux artistes de s’exprimer et les traque. Baptiste, le narrateur, est un jeune écrivain mais privé d’encre, il ne peut écrire. Les circonstances font se retrouver le jeune homme et Lothar, danseur dont les jambes ont été brisées ; celui-ci guide sa fuite et l’entraine vers son refuge en province, le Clos Lothar et ses vignes, « le dernier bastion, sans doute, d’un monde englouti (…) en attente de l’ultime asphyxie. »
De l’intrigue je ne dirai que peu de choses pour deux raisons, d’abord parce qu’il ne s’agit pas de ce genre de roman où tout est au carré avec un début et une fin claire et nette, ensuite parce qu’il y a néanmoins de nombreux rebondissements et qu’il vous sera plus plaisant de les découvrir par vous-même. Sachant pourtant que je ne peux en rester là, en vrac, voici ce que vous y trouverez : des souterrains, des passages secrets et des réunions dans des caves, une fuite en calèche, des gitans mystérieux et des loups qui sauvent des hommes ; tout cela nous rappelle fortement l’ambiance des romans d’aventure du XIXe siècle avec du baroque et du fantastique et c’est pour moi un bon point.
Quant aux personnages, outre Baptiste jeune héros balloté par les uns et les autres, tout comme le lecteur qui peine en vain à tout comprendre mais s’en régale néanmoins, il ya Lothar qui vit avec Cloïs, une femme étrange avec ses secrets, sans oublier madame de Frontval, femme du monde et épouse répudiée du dictateur au pouvoir…
Un roman extrêmement littéraire, dans le sens que je lui donne, à savoir qu’il est servi par une remarquable écriture, où l’intrigue n’est pas le but premier mais qui déverse sur le lecteur des vagues d’émotions (inquiétude, surprise, incompréhension, empathie etc.) alors qu’il suit ces destins et ces passions contrariés sur un fond plus sérieux, la défense des arts et des artistes.
Si vous avez manqué ce roman à l’époque, il n’est jamais trop tard pour rectifier le tir…
« Un énorme hoquet se bloqua dans mes oreilles. Je demeurai au centre de la chambre, un peu vacillant, à fixer soudain la bibliothèque et la carapace cuivrée des livres que j’allais lui abandonner. Saisissant l’un d’eux, je l’ouvris à la première page. Mon nom y figurait en lettres gothiques, larges et carrées, et, au-dessus, le titre de l’ouvrage – le septième, dernier de ma plume, testament de mes rêves. J’aimais l’élégant caractère, les gracieux ornements choisis par l’éditeur, ainsi que le format minuscule : cela tenait à la fois du vitrail et de l’enluminure. Le pauvre homme, en imprimant ce conte, ignorait qu’un mois après sa parution, lui et ses employés seraient exécutés. »
Stéphane Héaume Le Clos Lothar Zulma – 234 pages –
La musique du roman :
Les commentaires sont fermés.