Henri Bosco : Bargabot
09/03/2020
Après m’être gavé de romans américains, il était temps de faire une pause, l’heure était venue de revenir à mes fondamentaux, la littérature française, mais celle d’un autre siècle, quand la langue était riche, onctueuse, tout comme l’était la cuisine d’alors, riche en beurre et en crème. Prenez place, nouez votre serviette autour de votre cou, j’envoie le premier plat…
Fernand Marius Bosco, dit Henri Bosco (1888-1976) est un romancier français issu d'une famille Provençale dont les origines les mieux identifiées se trouvent près de Gènes. Pensionnaire au lycée d'Avignon, il poursuit en parallèle pendant huit ans des études de musique au Conservatoire de la ville. Bosco obtient, en 1909, sa licence de lettres et son diplôme d'études supérieures à l'université de Grenoble. Devenu musicien de talent, il occupe ses loisirs à jouer et même écrire de la musique. Pendant la Grande Guerre de 1914-18 il fait campagne en Macédoine et en Grèce, puis la paix revenue, il passera dix ans à Naples à l’Institut Français avant de partir en 1931 au Maroc comme professeur de lycée à Rabat. C’est d’ailleurs au Maroc qu’il écrira le plus gros de son œuvre. Publié en 1937, L’Âne culotte, lui vaut l’intérêt du public et Le Mas Théotime lui offrira le Prix Renaudot en 1948. Revenu en France en 1955, il partage sa vie entre Nice, où il décèdera et Lourmarin souvent cité dans ses romans. Bargabot date de 1958.
La cloche de l’internat a sonné, Pascalet, notre jeune héros de treize ans est de retour au Mas-du-Gage pour les vacances d’été. Beaucoup de choses ont changé, Tante Martine et son chien Barboche sont morts et ses amis, compagnons d’aventures extraordinaires, sont partis, Bargabot le braconnier et Gatzo, le jeune Gitan. Par contre, un vieil homme s’est installé dans une hutte près de la rivière avec son clebs Risque-tout. La nuit, Pascalet le rejoint discrètement et le vieux berger lui raconte des histoires dont les acteurs sont des troupeaux, des étoiles, de la neige, des montagnes et des herbes… mais plus encore, car Béranger connaît les secrets de Bargabot et grâce à lui Pascalet peut revoir celui-ci et transmettre son dernier message à Gatzo. Tout cela s'accomplit dans le plus grand mystère…
L’ouvrage contient deux textes, Bargabot suivi de Pascalet qui se déroule trois ans plus tard et tous deux poursuivent le même thème, une histoire sans fin, que les lecteurs d’Henri Bosco ont déjà pu savourer dans des romans antérieurs, Hyacinthe (1940) et L’Enfant et la rivière (1945) : l’âme d’une jeune fille (Hyacinthe) a été enlevée par un vieux sorcier gitan et Gatzo, un Bohémien de l’âge de Pascalet tente de délivrer la malheureuse de ce maléfice, avec l’aide de Bargabot et Pascalet.
Les deux textes mêlent les mystères et les sorties nocturnes, le drame avec la mort du braconnier et les disparitions mais aussi la vie quotidienne menée par Pascalet ; que ce soit à l’internat où il végète mais où il croise un magnifique professeur de Français et de Langues mortes (« Nous adorions Aristide de Cabriolles. Il nous trouvait à tous des qualités majeures, quelquefois même du talent. Peut-être en avions-nous, tellement il nous exaltait. »), ou bien au Mas quand il y reviendra, y vivre seul, après s’être évadé de l’internat avec l’aide de son ancienne nourrice et de son fils.
De la littérature à l’ancienne, très belle par les images suggérées comme par les sentiments naïfs qui s’en dégagent ; mystère, onirisme et poésie se côtoient pour créer une ambiance particulièrement délicieuse, quant à la langue d’Henri Bosco, en particulier dans le second texte, on s’en régale tant elle est chiadée.
« - Tiens ! il y a trois mois, j’y ai entendu des coups de pétoire. J’ai reconnu sa canardière. Et après, dans un barquichon, deux hommes ont filé à toutes rames… Et puis, un a tiré… Et j’ai vu Bargabot sortir d’une broussaille… Il a rechargé son fusil et a envoyé une belle volée de plombs contre la barque… Mais elle était déjà trop loin et les plombs n’ont troué que l’eau… Pour Bargabot, il est parti, le lendemain, avec armes et bagages. Et il m’a dit : « Je m’en vas essayer de les rattraper en Camargue… Tu surveilleras ma maison, mon bon Béranger, jusqu’à mon retour… » Et j’ai surveillé la cabane… Et bien, tu sais ? j’y ai eu peur… On y vient… Je ne sais pas qui… Mais on rôde autour. Et des gens qui arrivent là par la rivière… On voit leurs pieds. (…) Je ne veux pas dire qui… Mais si je le disais… »
Henri Bosco Bargabot suivi de Pascalet Gallimard – 171 pages –
Illustrations de Jean Palayer
2 commentaires
Tout à fait d'accord, un peu de langue correcte et de bien écrit, ça fait du bien
Les bonnes histoires c’est bien mais les bouquins bien écrits c’est mieux encore et c’est ce qui me donne envie de lire….
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