Luke Rhinehart : Vent blanc, noir cavalier
15/11/2021
George Powers Cockcroft (1932-2020) est un écrivain américain écrivant sous le pseudonyme de Luke Rhinehart. Eduqué dans une académie militaire, il débute comme professeur de littérature américaine à Long Island. Dans les années 1960, il part avec sa femme vivre au Mexique et dans d'autres pays d'Amérique du sud puis à Majorque en Espagne. L’écrivain nous laisse neuf romans dont ce Vent blanc, noir cavalier (1975) qui vient de paraître.
Attention, roman « normal » ! Si comme moi vous avez lu L’Homme-dé ou Invasion, vous vous attendez à un roman « spécial » dirons-nous, or pas du tout, ce Vent blanc, noir cavalier, est de la veine la plus classique qui soit, d’ailleurs il est inspiré d’une histoire vraie.
Japon, XVIIIe siècle. Oboko, jeune moine et poète, entame un pèlerinage pour retrouver maître Eno, son guide spirituel. Pris dans une tempête de neige, il se réfugie dans un temple bouddhiste abandonné et tombe sur un ami, Izzi, poète à la cour de Kyoto, gentiment paillard et picolant sec. Durant la nuit, une autre personne vient se réfugier là, Matari, une jeune et ravissante jeune femme qui fuit Arishi, un redoutable seigneur, lancé à ses trousses avec ses samouraïs, pour la tuer et venger son honneur…
Pastiche des vieux romans japonais, ambiance vue dans les films des grands maitres nippons du septième art, Luke Rhinehart séduit et passionne avec ce très beau roman. On sourit un peu, on s’inquiète souvent, on est ému tout du long par cette magnifique histoire qui mêle amour et honneur avec la mort au bout du chemin, peut-être ?
Les trois personnages déjà cités seront bientôt quatre, avec Arishi devenu leur prisonnier mais tous ses sbires, sabre à la main, rôdent autour d’eux. Il s’agit d’un roman psychologique où s’affrontent deux conceptions du monde ou de la vie, d’un côté Oboko le gentil garçon pour qui une vie humaine prévaut sur toute autre considération, de l’autre Arishi pour qui le code de l’honneur ne doit déroger à aucune exception. Arishi aime Matari, mais pour lui et selon les règles de l’époque et de son rang, elle n’a pas su tenir sa place, il se doit de la tuer de ses propres mains.
Oboko tombé sous le charme de la jeune femme pourra-t-il la sauver ou faire fléchir Arishi ? Arishi qui ne manque pas de noblesse malgré son funeste projet, cédera-t-il ? A moins que Matari, qui n’est pas une si faible femme qu’on pourrait l’imaginer, pleine de courage, ne trouve une astuce pour ménager la fierté de son époux ?
L’écriture simple mais soignée, sur un rythme collant parfaitement au thème et à l’époque de l’intrigue, séduit le lecteur tout autant que son sujet philosophique.
« - Matari a peut-être cessé d’être Matari, mais Arishi ne cesse pas d’être Arishi pour autant. Tant qu’elle vit, l’honneur et les serments n’ont plus aucun sens. Les fondations sur lesquelles mon univers repose tombent et s’écroulent. Je ne la tuerai pas parce qu’elle n’a pas d’importance pour moi (…) mais parce que si je ne la tue pas, cela signifiera que le seigneur Arishi est mort et indifférent. Matari est la pomme d’or du soleil, et si on ne la cueille pas aussitôt, elle pourrira et dégagera la pire puanteur de viscères empoisonnées qu’homme ait jamais humée. »
Luke Rhinehart Vent blanc, noir cavalier Aux Forges de Vulcain - 265 pages -
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Francis Guévremont
3 commentaires
Bien aimé "l'homme-dé" et "Invasion" n'est plus très loin dans ma PAL, nous en parlerons donc bientôt. Les livres "normaux" vont moins m'intéresser...
Quoique...
« Quoi que… » quoi que même un roman simple puisse être très bien ! Et c’est le cas, ici. Et comme tu ne seras pas surprise par sa forme, tu l’apprécieras sans cette petite « contrariété » qui m’a gêné au début.
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