compteur de visite

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Rechercher : suaudeau le français

La littérature étrangère à la peine ?

Un billet assez particulier puisque je n’en suis pas l’auteur, juste le passeur. Peut-être avez-vous loupé le grand article publié hier par Le Monde des Livres, titré « Littérature étrangère : une mauvaise passe », pour y remédier en voici un résumé dont j’espère ne pas en déformer le fond et si je n’utilise pas les guillemets c’est pour en simplifier la lecture.

Le constat de départ c’est qu’en 2023, dans un contexte économique morose pour l’édition, les romans étrangers ont été plus touchés que les francophones. Le marché français du livre a globalement progressé de 1% en valeur (Etude GFK) mais cette augmentation est due à une forte hausse des prix (+5%), alors que le nombre d’exemplaires vendus, lui, a fléchi de 4% en un an. Un recul lié à une chute de 10% de la littérature étrangère contemporaine (hors « romance » et sentimentaux qui marchent bien).

En dix ans, les ventes de fiction modernes étrangères ont diminué de 25% en volume (GFK) alors que celles de littérature française ont augmenté de 20%. Et si l’on se réfère au classement des 100 meilleures ventes en librairie en 2023, le nombre de romans étrangers présents, qui a longtemps oscillé entre 35 et 45 par an, est tombé à 12 !

Parmi les explications à ce phénomène : les éditeurs doivent payer les traductions mais il devient impossible de faire passer les auteurs dans les médias (radios et télés), dans ces conditions les éditeurs relèvent les prix, diminuent les tirages et réduisent les invitations des auteurs (frais de voyage et d’hébergement économisés), conséquence évidente, visibilité réduite des ouvrages !

La qualité littéraire des ouvrages étrangers n’est pas en cause, elle serait même « plutôt supérieure à celle des livres français » déclare Francis Geffard (Albin Michel), d’ailleurs vu les frais de traduction, les éditeurs sont plus sélectifs dans leurs choix. Pour information, la répartition des langues a peu varié, l’anglais restant largement dominant, le nombre de langues est passé de 33 en 2014 à 39 en 2023.

Pour résumer, il semblerait que ce recul de la littérature étrangère soit lié à l’absence de ses écrivains dans les médias, que les sujets de leurs romans soient moins familiers aux potentiels lecteurs et que le prix des livres freine les ventes, à 23 euros la nouveauté, le lecteur préfère aller vers les écrivains connus que ceux qu’il ne connait pas. D’ailleurs les collection de poche sont en plein boum.  

Réflexion personnelle : comme souvent dans la presse écrite, les articles déroulent de longs articles positifs ou négatifs sur un sujet donné, avant de se conclure sur une note inverse qui laisse le lecteur interrogatif et c’est le cas ici encore : tout le monde ne partage pas le pessimisme des chiffres, les éditions Métailié ou la librairie Ombre Blanche à Toulouse se félicitent de leurs bons résultats de ventes d’auteurs étrangers… alors ?

Lire la suite

Piotr Rawicz : Le Sang du ciel

Piotr RawiczPiotr Rawicz est né en 1919 à Lvov, alors en Pologne (aujourd'hui Lviv en Ukraine) dans une famille juive aisée et plutôt assimilée. Son père, avocat, est très actif dans les différentes organisations de la communauté juive de la ville. Piotr, le plus jeune d'une fratrie de trois enfants étudie le droit et les langues orientales à l'université de la ville. Il y fait la connaissance d'Anna qu'il épousera après la guerre. En 1939, Lvov est annexé par les Soviétiques et après l'invasion allemande en 1941, il s'enfuit avec Anna. Il parvient à se cacher pendant un an mais finit par être arrêté durant une rafle à Zakopane, une ville polonaise. Il est torturé par la Gestapo mais ne livre aucun nom. Grâce à un faux certificat médical, il parvient à expliquer sa circoncision. C'est donc en tant que « prisonnier politique ukrainien » qu'il est déporté à  Auschwitz pendant deux ans. En 1944, il est transféré au camp de Leitmeritz, près de Terezin. Il est libéré en mai 1945. Après la guerre, Rawicz s'installe en Pologne. Il travaille comme journaliste et écrit aussi des poèmes. Piotr et Anna Rawicz émigrent en France en 1947 pour étudier les langues orientales. Entre 1949 et 1953 il est correspondant français de plusieurs journaux étrangers, mais cela ne suffit pas à subvenir à ses besoins et il est obligé de vivre de petits boulots comme chauffeur, traducteur.

Piotr Rawicz sera l’un des premiers à faire connaître l'œuvre d'Alexandre Soljénitsyne. Naturalisé français en 1966, son passeport français lui permet de retourner en Pologne à Auschwitz, et de revoir son père qui a survécu à la Shoah. Après la mort de sa femme en 1982 il se suicide, à l'âge de 63 ans. Il laisse derrière lui de nombreux écrits non-publiés.

En 1961, il publie Le sang du ciel, son seul roman, rédigé directement en français, basé en partie sur son expérience concentrationnaire. Le livre connait un succès immédiat en France. Il est considéré comme le premier roman de la Shoah en langue française. Le livre vient d’être réédité dans la collection L’Imaginaire chez Gallimard.

Une longue introduction biographique, car elle constitue le cœur du texte de ce livre qui n’est pourtant ni une autobiographie, ni même un témoignage, mais un roman basé sur des faits réels.

Le narrateur découvre un manuscrit autobiographique, « ce genre de « journal intime », c’est comme du linge sale ou le linge d’autrui… » qu’il entreprend de relater à un auditeur qui n’est pas nommé - c'est-à-dire nous lecteurs - dans un café parisien. L'action se situe à l'est de la Galicie sous l'occupation allemande, au moment où les nazis ordonnent aux habitants d'un petit ghetto ukrainien de se rassembler, « Le douze juillet 194… on nous ordonna de prendre nos bagages – vingt kilos par tête – de laisser ouvertes les portes de nos demeures et de nous rassembler sur la grande place que bordait le fleuve ». Boris, le héros, est un intellectuel juif assimilé, qui mis à part la circoncision, peut tout à fait passer pour un polonais. Il prend la fuite avec sa compagne Noémi et tout du long de leur errance, ils survivent grâce à  sa maitrise de l'allemand et de l'ukrainien, son argent et ses relations. Après avoir échappé plusieurs fois aux nazis, il est enfermé dans les camps dont il subit la terreur et la violence mais il parviendra cependant à survivre.

Le roman n’est pas facile à lire et s’adresse à un public exigeant. Outre une structure complexe, on peine à suivre parfois, un peu comme un puzzle dont les pièces auraient des sources diverses, bouts de récits, petits poèmes, il y a ce qui est dit et ce qui ne l’est pas – mais qui est peut-être le plus important. Par exemple le mot Juif est rarement employé, sauf vers la fin du roman, ou bien les horreurs des camps ne sont quasiment jamais décrites, mais parce que nous savons qu’elles sont là, tapies derrière les mots qui ne sont pas prononcés, elles mettent mal à l’aise le lecteur. D’autant plus que l’écrivain parvient à faire parfois de l’humour, noir bien entendu, quand un vieil ami de Boris suppose que leur prochaine rencontre se fera sur une étagère du marchand de savon… ! Ou, plus léger ( ?), quand il devra exhiber plusieurs fois sa verge « Quand on met la main sur un gars suspect avec une queue comme la vôtre, on le fusille sur-le-champ. »

Un très grand roman, c’est certain, mais difficile à appréhender par sa forme, ce qui le réserve à un public averti.

 

« Striglitz s’arrête devant le premier lit. Il examine la courbe de température, sort discrètement son browning et en approche le canon du front du malade : - Voilà qui est fait. Tu ne souffriras plus, petit frère – prononce-t-il avec une tendresse qui n’est pas feinte. Il continue sa promenade, suivi du sergent. Un jardinier massif, et son aide, frêle, élancé, plein de confiance en son maître. Tous deux semblent accomplir un rite muet. Les déclics sont à peine perceptibles. Les malades attendent, longues poupées emplâtrées et blanches. Leurs yeux – des hannetons lourds, noirs et brillants, s’envolent vers le plafond et retombent, plus bas, toujours plus bas, les ailes coupées. »

 

Piotr RawiczPiotr Rawicz  Le Sang du ciel  Gallimard dans la collection  L’Imaginaire – 333 pages -

 

Pour en savoir plus : Anny Dayan Roseman, maître de conférences en littérature à l’université Paris VII est interrogée sur RCJ ici

Lire la suite

06/02/2014 | Lien permanent

J.K. Huysmans à Paris

huysmansJoris-Karl Huysmans de son vrai nom Charles Marie Georges Huysmans, est un écrivain et critique d'art français (1848-1907). Huysmans était le descendant par son père, d'une lignée d'artistes peintres hollandais. Certains tableaux du plus célèbre de ses ancêtres, Cornelius Huysmans, peintre à Anvers au XVIIe siècle, figurent aujourd’hui au Louvre et c’est pour mieux évoquer ses origines hollandaises, que Huysmans adopta le prénom de Joris-Karl.

A partir de 1876, Huysmans collabore en tant que chroniqueur d’art, à différents journaux pour lesquels il rédige des comptes rendus des Salons de peinture. Il prend la tête du combat visant à imposer l’Impressionnisme au public. Après sa conversion au catholicisme vers 1895 et relatée dans son roman En Route, il publie en 1898 La Cathédrale. Mais on ne peut ignorer d’autres romans tels que A rebours (1884) avec son personnage principal Jean des Esseintes ou bien Là-bas (1891) où il est question de satanisme…

Un écrivain que je vous recommande particulièrement.

Joris-Karl Huysmans est donc né à Paris, le 5 février 1848, au numéro 11 (actuellement le 9) de la rue Suger dans le 6e arrondissement. Une toute petite et étroite rue aboutissant place Saint-André des Arts qui a conservé son caractère très ancien, puisque cette rue qui remonte au moins au XIIème siècle, aurait été ouverte en 1179 sur un vignoble qui s'étendait alors dans le bourg de Saint-Germain.

L’écrivain passa toute son enfance dans cette maison, entre son père néerlandais du nom de Godfried Huysmans, lithographe de profession et sa mère française, Malvina Badin, maîtresse d'école.

 

huysmans

huysmans

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Photos : Le Bouquineur   Sources : Wikipédia – « Promenades littéraires dans Paris » de Gilles Schlesser (2017) –

Lire la suite

Paul Beatty : American prophet

paul beattyPaul Beatty, né en 1962 à Los Angeles, est un écrivain afro-américain. Diplômé d'un Master of Fine Arts du Brooklyn College en écriture créative, il a également obtenu une maîtrise en psychologie à l'université de Boston. En 1990, il est couronné Grand champion de slam du café des poètes de Nuyoricana et gagne à cette occasion un contrat d'édition pour la publication de son premier recueil de poésie, Big Bank Takes Little Banka. Son deuxième livre de poésie, Joker, Joker, Deuce, suit trois ans plus tard. Son premier roman, American Prophet, date de 1996 et vient d’être traduit en français.

Parenthèse liminaire, le titre original de l’ouvrage The White Boy Shuffle a été traduit en français ( ?) par American Prophet ! Non seulement le ridicule ne tue pas mais il a encore de beaux jours devant lui.

Quand le roman débute, Gunnar Kaufman son jeune héros, est le dernier descendant d’une longue lignée de Noirs américains dont il nous rappelle les grotesques mésaventures, comme cet aïeul qui migra vers le Sud en pleine période d’esclavagisme ou cet autre qui courut s’enrôler dans les troupes des Etats Confédérés durant la guerre de Sécession, bref une famille jamais du bon côté du manche de l’Histoire en marche. Et il faut que croire que la malédiction les poursuit puisque Gunnar, sa mère et ses deux sœurs, déménagent de Santa Monica quartier chic et Blanc vers Hillside, ghetto de Los Angeles.

Dans cet environnement difficile dont les codes lui sont inconnus, le jeune Gunnar va devoir se faire une place au milieu des gangs entre Bloods et Cripps. Lui qui ne rêve que de poésie, se révèlera aussi basketteur de talent, s’ouvrant les portes des Universités mais aussi les cœurs des petites frappes de son quartier. Entre ses deux potes, Nicholas Scoby, fan de jazz et Psycho Loco leader d’un gang, Gunnar va tenter de se trouver une place dans ce monde. Contre sa volonté il va se retrouver porte-voix, prophète donc, « d’une ethnie à l’abandon » après avoir pris conscience de sa condition à l’annonce du verdict dans le procès de Rodney King, « ce jour-là, pour la première fois de ma vie, je me suis senti comme un moins-que-rien. ».     

Un bien beau et bon roman en vérité. Passées les toutes premières pages qui assomment un peu le lecteur surpris par le style de l’écrivain, le reste du livre se dévore avec une hâte retenue. Hâte, car poussé par la tchatche et la faconde de Paul Beatty vous êtes embarqué par une lame de fond dont l’origine remonterait au jazz pour se poursuivre avec le rap ; retenue, car il vous faudra ingurgiter les nombreuses références au vécu des Noirs américains, références historiques ou culturelles, obligeant à ralentir la lecture pour mieux en appréhender le sens.

Mais rassurez-vous, Paul Beatty sait y faire. Rien n’est lourd ou chargé d’un bien-pensant convenu, au contraire. L’écrivain qui a également publié dans le passé une anthologie de l'humour afro-américain l’utilise ici plus souvent qu’à son tour, en faisant de l’autodérision cette arme typique des minorités pour retourner en leur faveur des situations défavorables. On rit souvent devant ses propos peu enclins au politiquement correct, ses réflexions incongrues.

Drôle, vachard mais lucide avec sa communauté « l’Amérique noire a renoncé à ses besoins dans un monde où les espérances ne sont qu’illusions », instruit aussi, le roman fourmille de détails ou informations historiques et au-delà l’humour, l’auteur sait utiliser les mots et la langue pour nous donner un texte de très grande qualité.    

 

« Chez les Noirs, d’habitude, on réserve les lamentos pour les funérailles. J’ai vu des gosses se prendre sans moufter des coups de matraque, des pare-chocs ou même des balles. Car seules deux occasions vous autorisent à verser une larme : manquer d’un seul petit numéro la grosse cagnotte du loto ou perdre un proche. Deux cas dans lesquels pleurer est acceptable, mais une fois et une fois seulement. Pas le temps de broyer du noir parce que le lendemain, le nègre, y doit retourner marner. »

 

paul beattyPaul Beatty  American prophet  Passage du Nord-Ouest

Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Nathalie Bru

 

 

 

 

Lire la suite

10/10/2013 | Lien permanent

Paul Nizan au Pecq

paul nizanPaul-Yves Nizan (1905-1940) est un romancier, essayiste, journaliste et traducteur français. Fils d’un ingénieur des chemins de fer, Paul Nizan fait ses études secondaires à Paris au lycée Henri-IV, où il a pour camarade Jean-Paul Sartre, qui devient rapidement son meilleur ami. Reçu à l’École normale supérieure en 1924, il se lie aussi d'amitié avec Raymond Aron.

Agrégé de philosophie, membre du Parti Communiste, il enseigne et milite à Bourg-en-Bresse. Il entre à L’Humanité puis à Ce Soir où il dirige la page de politique étrangère. En 1939 il quitte le Parti à propos du pacte germano-soviétique et il subit des attaques nombreuses et violentes de la part du parti, en mars 1940 Maurice Thorez signe, dans le journal Die Welt, l'édition allemande de l'organe de la Troisième Internationale, un article intitulé « Les traîtres au pilori », et qualifie Nizan « d'agent de la police ». Mobilisé, agent de liaison auprès de la XIVth Army Field Workshop, Nizan est tué près de Dunkerque le 23 mai 1940. Il est enterré à la Nécropole nationale française de la Targette à Neuville-Saint-Vaast (carré B rangée 9 tombe nº 8189).

« L’œuvre romanesque de Paul Nizan, assez brève, est l’une des plus remarquables de l’entre-deux-guerres. En 1960, dans sa préface à la réédition d’Aden, Arabie (1931), Sartre a essayé de tirer son ami de l’oubli dans lequel il était injustement tombé. (…) Antoine Bloyé (1933), Le Cheval de Troie (1935) et La Conspiration (1938), acerbes, lucides, passionnées, ces œuvres de Nizan  sont l’un des rares exemples en France, après Jules Vallès, de romans politiques de qualité. »

Paul Nizan est aussi l'un des premiers grands connaisseurs de la littérature anglaise, et il est l'un des premiers intellectuels français à avoir remarqué la jeune littérature américaine, dont Faulkner, Caldwell, Steinbeck, O'Neill.

En 1924 Paul Nizan rencontre Henriette Halphen, cousine de Claude Lévi-Strauss et il l’épouse à la mairie du 5ème à Paris, avec comme témoins Jean-Paul Sartre et Raymond Aron. Ils auront deux enfants, Anne-Marie (1928) future épouse d'Olivier Todd et Patrick (1930).

Les parents Halphen aiment l’architecture contemporaine. En 1930, un terrain est trouvé et ils font construire une maison par l’architecte Frantz Jourdain qui est le fils de leur décorateur, Francis Jourdain. C’est la première maison de Frantz, influencé par le style moderne du mouvement Bauhaus. Les Nizan s’installent Domaine de Grandchamp, 19 allée des Cèdres au Pecq (Yvelines). C’est dans cette demeure que Nizan écrira la plus grande partie de son œuvre et beaucoup d’amis, comme Sartre, Simone de Beauvoir, Aron, Berl et Jean Renoir n’hésitaient pas à leur rendre visite. Après sa mobilisation en 1940, Paul Nizan reviendra à Grandchamp pour de courtes permissions, avant de disparaître au combat.

Difficile d’apercevoir la maison de la rue, protégée par de hautes haies végétales, et ma pauvre photo n’en montre pas grand-chose. Si aujourd’hui le mot “Bauhaus” est souvent employé à toutes les sauces, ce que j’ai pu en entrevoir correspond peu ou prou à l’idée qu’on s’en fait, à savoir une maison à l’architecture épurée ou géométrique.

 

Sources : Wikipédia – Introduction de H. Berman pour Le Cheval de Troie (L’Imaginaire Gallimard)  Photo : Le Bouquineur


paul nizan

Lire la suite

13/10/2013 | Lien permanent

Céline Minard : Faillir être flingué

céline minardCéline Minard, née à Rouen en 1969, est un écrivain français. Après avoir étudié la philosophie elle se lance dans l’écriture. On lui doit déjà plusieurs romans comme Le Dernier Monde (2007), Bastard Battle (2008), Olimpia (2010) et So long Luise (2011). Faillir être flingué vient de paraître.

« Le chariot n’en finissait plus d’avancer. La grand-mère à l’arrière criait de toutes ses forces contre la terre et les cahots, contre l’air qui remplissait encore ses poumons. » Ainsi débute le dernier roman de Céline Minard, une épopée sauvage au cœur du Far-West, ce territoire immense propice au romanesque qu’on pensait propriété intellectuelle exclusive des écrivains américains. Le thème semblait casse-gueule pour un écrivain français et pourtant, la dame s’en sort avec les félicitations du jury.

Magistralement construit, le roman est à priori une succession de scènes ou d’histoires dépareillées où chacune met un scène un ou deux personnages différents, mais au fil de la lecture on s’aperçoit que tout se tient par des liens rendus évidents à postériori. Tous ces personnages agissent et interagissent dans un mouvement d’ensemble qui les mènent vers la petite ville qui se construit, première étape du monde moderne qui s’ébauche.   

Nous ferons ainsi connaissance avec Eau-qui-court-sur-la-plaine, une Indienne dont le clan a été décimé, et qui, depuis, exerce ses talents de guérisseuse auprès des Blancs comme des Indiens, les frères Jeff et Brad McPherson qui traversent la  plaine avec leur vieille mère mourante dans un chariot tiré par des bœufs, la très jeune  Xiao Niù, qui comprend le chant du coyote. Ou bien encore Elie poursuivi par Bird Boisverd, Arcadia Craig une contrebassiste et j’en passe !

Toutes les scènes de westerns vues au cinéma ou à la télévision sont ici compilées dans l’ouvrage et il s’en faut de peu que les visages de nos acteurs favoris, le Dustin Hoffman de Little Big Man par exemple, ne viennent se superposer aux héros imaginés par l’écrivain. Attaque de banque, scalps, bagarres de saloon et entraineuses, règlement de compte final, Indiens et chasseurs de primes, scène de barbier dans son échoppe, tout est présent dans ces plus de trois cents pages.

L’écriture très fluide de Céline Minard emballe l’affaire avec maestria et sait nous faire ressentir les émotions primitives de ses héros (Bird Boisverd seul dans une grotte et sans ressources, Eau-qui-court et ses rites chamaniques) ou leurs péripéties dans l’Ouest sauvage dignes des romans de Nature Writing des plus grands. Moi qui vénère ce genre, j’avoue avoir été bluffé par ce bouquin écrit par « une petite française » qui y ajoute sa patte, faite d’un humour subtile ou carrément cocasse.

Un grand roman d’évasion, un roman complètement épatant, un roman à lire évidemment.

 

« Quand il revint, Josh était allongé sur un lit de camp à peine taché et bordé jusqu’au menton dans une couverture de bonne laine. Il était pâle et agité. Cristophia informa Zébulon qu’il trouverait dans la grand-rue un barbier qui savait s’y prendre avec les plaies et qu’en cas d’échec, il ne lui resterait qu’à tenter le diable avec les herbes d’une métisse canadienne qui passait en ville les jours de marché. Zeb remercia et paya le supplément en se demandant pour quelles raisons au juste il s’était chargé de cet homme blessé aux trois quarts délirant alors qu’il n’aurait pas levé le petit doigt pour sauver la moitié du vieux continent. Et pendant qu’il y était, il se remit en route à la recherche du barbier. »

 

  

céline minardCéline Minard  Faillir être flingué  Rivages

 

 

 

 

 

 

 

 

Emission Les Bonnes feuilles sur France Culture :

 

Lire la suite

Mircea Eliade : La nuit bengali

Mircea Eliade (1907-1986) est historien des religions, philosophe et romancier roumain. A quatorze ans il publie son premier article et à vingt ans il parle déjà allemand, anglais, français et italien. Adulte, il parlait et écrivait couramment huit langues dont l’hébreu, le persan et le sanskrit. De 1933 à 1940 il enseigne la philosophie indienne à l‘Université de Bucarest.

Son roman La nuit bengali date de 1933 mais ne sera traduit en français pour Gallimard qu’en 1950. C’est cette édition que j’ai achetée dans une brocante, son premier ( ?) propriétaire l’avait faite relier, avec le nom de l’auteur et le titre du livre sur la tranche ainsi que ses initiales. A l’intérieur du bouquin, un premier cachet à l’encre bleue en partie délavée précise, me semble-t-il,  « Le lieutenant Corroyez – O.D. de la C.P.L.E. » tandis qu’un second sur la page suivante indique le nom et le prénom ainsi qu’une adresse à Draveil (91210). Rien qu’avec ces éléments on pourrait écrire un roman ou du moins une histoire passionnante. Mais aujourd’hui ce n’est pas mon propos.

Revenons à notre roman qui se déroule au Bengale dans les années 30. Allan, un jeune européen, ingénieur et dessinateur technique pour une entreprise de canalisation du delta du Gange, mène une vie de célibataire relativement agréable au sein de la petite communauté blanche qu’il fréquente. Le roman est écrit à la première personne, souvenirs d’Allan et extraits de son journal intime. L’ingénieur va rencontrer Maitreyi une jeune fille indienne fille de son patron, et a son plus grand étonnement – car lors de leurs premières rencontres elle ne l’avait pas particulièrement frappé - il va en tomber amoureux.

Dès lors, tout le roman va s’articuler autour cet amour qui doit rester secret, tant pour Allan vis-à-vis de ses compatriotes qui n’accepteraient pas cette relation entre un blanc et une quasi « négresse », que pour les parents de Maitreyi très à cheval sur les conventions liées à leur religion et leur système de classes typique de la société indienne. La situation est d’autant plus complexe, qu’Allan a été accueilli par les parents de la jeune fille et vit sous leur propre toit chaque jour un peu plus comme un fils. Ajoutez à cela, les jeux de l’amour dont les codes diffèrent selon les cultures et qui mettent les nerfs d’Allan à l’épreuve.

Sans dévoiler vraiment la fin du roman, on peut deviner que l’histoire se terminera tragiquement pour certains des acteurs quand la vérité éclatera, que des souffrances s’atténueront avec le temps pour d’autres, peut-être.

Un très beau livre, peut-être un peu désuet mais avec une très belle histoire d’amour dans un décor exotique et un choc des cultures.     

 

« Le dimanche, mes serviteurs partaient en train pour Shillong et ramenaient des provisions. Je dormais jusqu’à midi et me réveillais la tête lourde et la bouche pâteuse. Je restais au lit tout le jour à recopier mes notes sur mon journal. Je voulais publier plus tard un livre sur la vie réelle du blanc en Assam et je m’analysais moi-même avec le plus de précision possible. Mes jours de marasme et de neurasthénie avaient leur place auprès des jours, naturellement plus nombreux, où le pionnier se réveillait en moi plein d’orgueil et de puissance. »

 

Eliade  mircea_eliade.jpgMircea Eliade  La nuit bengali  Gallimard

Lire la suite

13/10/2012 | Lien permanent

Manchette : Morgue pleine

Manchette Livre 2.jpgJean-Patrick Manchette (1942-1995) est un écrivain français, auteur de romans policiers, critique littéraire et de cinéma, scénariste et dialoguiste de cinéma, traducteur. Reconnu comme l'un des auteurs les plus marquants du polar français des années 1970-1980, il est également connu pour ses opinions d'extrême-gauche. Morgue pleine, paru en 1973, est le quatrième roman de Jean-Patrick Manchette.

Le détective Eugène Tarpon est un ancien gendarme qui a quitté le métier après une sombre affaire de manifestant tué. Son cabinet, dans le quartier des Halles, n’est pas des plus florissants loin de là, d’ailleurs il se prépare à plier bagages pour retourner vivre avec sa mère dans un petit village de province quand il reçoit la visite d'un ex-collègue reconverti dans la formation d'agents de sécurité pour les entreprises confrontées à mouvements sociaux, qui lui propose de le rejoindre pour encadrer des équipes de briseurs de grèves. Ecœuré, Tarpon le met à la porte et commence à se saouler.

Il reçoit alors une seconde visite, un jeune musicien ayant ouvert une boîte de jazz et qui se trouve aux prises avec des racketteurs. Agacé par la naïveté du jeune homme, le détective l'expulse de son bureau et s’endort avant d’être réveillé par une très jolie jeune femme, « plutôt une minette comme ils disent », prétendant s'appeler Memphis Charles, venue lui réclamer son aide. Sa colocataire a été égorgée et elle refuse d'aller voir la police de peur d'être suspectée.

Tarpon mènera l'enquête contre son gré, aidé par un vieux journaliste à la retraite, Heymann. Comme le titre du polar l’indique, les cadavres vont commencer à pleuvoir. Ajoutons des tueurs américains, un commando merdique de barbus gauchistes et un producteur de films (« euh…suédois » pour employer la terminologie de l'époque) pour étayer cette glauque histoire de famille avec un vieux père maffieux revenu au pays pour connaître sa fille et un frère barjot sexuellement perturbé.

J’avais lu Manchette dans ma jeunesse, La position du tireur couché par exemple, mais je n’avais pas du tout aimé, m’étonnant des louanges de la critique pour cet écrivain que je trouvais particulièrement ennuyeux à lire. Quarante ans plus tard, ce Morgue pleine m’ouvre les yeux comme une révélation.

Une intrigue qui tient la route, une vraie écriture et tous les ingrédients du polar certifié. Le privé et le commissaire aux noms gratinés, Eugène Tarpon pour le premier et Coquelet pour le poulet ! Tout le bouquin ne manque pas d’humour d’ailleurs, que ce soient les situations ou les réflexions de l’Eugène, Manchette fait son Dashiell Hammett en y introduisant une touche de fantaisie ironique. Ironie à son encontre ou clin d’œil au lecteur ?

Autre plaisir de lecture, le bouquin date de 1973 et ça se voit, dans les marques des voitures, dans des réflexions comme « Il ressemblait à Jean Tissier » ou plus certainement encore dans l’évocation des gauchistes anti-impérialistes.

Un bon polar, tout à fait dans la tradition à l’ancienne, comme on dit pour les baguettes de pain. Pour information, le roman a été adapté au cinéma sous le titre Polar par Jacques Bral en 1983 avec Jean-François Balmer dans le rôle d'Eugène Tarpon.

 

« J’ai secoué la tête pour m’éclaircir les idées. Vivre dans le rêve, je ne sais pas si c’était à cause du manque de nourriture ou du manque de sommeil, mais ça commençait à être mon activité principale. Et la réalité des choses n’arrangeait rien. Bien sûr qu’elle ne tenait pas debout, son histoire, à Memphis Charles ; mais qu’est-ce qui tient debout, de nos jours ? Des mômes de vingt ans attaquent les commissariats avec des bouteilles d’essence, et moi, j’avais tué, d’une grenade en pleine figure, un gamin qui lançait des pavés. Le monde est fou. J’aurais dû me tirer chez maman, comme j’avais prévu. »

 

Manchette .jpgManchette  Morgue pleine  Carré noir

Lire la suite

21/11/2012 | Lien permanent

Où l’on s’interroge sur la traduction des romans

Le plus souvent on n’y fait pas très attention, on lit un bouquin, on l’aime ou on le déteste, louanges et critiques vont toutes à l’auteur. Pourtant, quand on lit un roman rédigé par un écrivain étranger, son ouvrage a fait l’objet d’une traduction dans notre langue. C’est justement ce passage de la langue d’écriture à celle du lecteur qui m’a toujours intrigué.

Et quand j’écris « intrigué » je suis loin de la vérité car en fait ça me laisse perplexe au plus haut point. Comment un texte écrit dans une langue peut-il être restitué à l’identique dans une autre ? Quelque part ça reste un mystère incompréhensible pour moi. Qu’un livre de recettes de cuisine soit retranscrit sans problème dans un autre idiome, je le comprends aisément. Mais un roman ? Les mots ne sont pas tout, il y a leur place dans la phrase, leur sens premier ou sous-entendu, la sonorité dégagée par leur proximité, les tournures de phrases. Bref, tout ce qui fait la richesse d’une langue écrite et quand cette matière est parfaitement maîtrisée par l’écrivain, ce qu’on nomme le talent. A partir de là, comment peut-on rendre cet ensemble aussi travaillé et aussi riche d’une langue à une autre, les règles de grammaire et syntaxe n’étant pas obligatoirement les mêmes ? 

« Comment avoir confiance, comment s’assurer qu’aucun mot n’est trahi, aucune répétition évitée par un faux souci d’élégance, aucune phrase raccourcie ni coupée ? Qui peut garantir une entière fidélité au texte ? A qui se fier, en fin de compte, alors que dans le passé traduction a pu signifier trahison ? » s’inquiète Christine Jordis*, éditrice de Philip Roth, à propos des craintes de l’écrivain. 

Quand on réfléchit à cela, on s’interroge obligatoirement sur le rôle du traducteur dans toute cette affaire. Car au final, le lecteur ne connaît d’un livre que la version traduite, c’est-à-dire celle donnée par le traducteur. En théorie, le texte en français peut donc être moins bon que l’original ou bien meilleur ! L’idéal devant être la copie conforme pour ne pas altérer, dans quelque sens que ce soit, le travail de l’écrivain. Dans ces conditions on peut en déduire que le rôle du traducteur est absolument fondamental.

A ce propos, voici ce que déclare Lazare Bitoun*, traducteur de deux ouvrages de Philip Roth, « Lorsqu’on traduit, la question n’est pas le sens des mots. Il faut comprendre d’emblée la phrase, le sens précis n’est qu’une deuxième étape. Il faut immédiatement saisir le rythme de la phrase, ce que dit sa petite musique, et ensuite, il faut essayer de le rendre en français. Et si on n’y arrive pas sur une phrase, on le fera sur la suivante. Même chose pour les jeux de mots ; si on échoue dans un paragraphe, on pourra sûrement en faire un dans le paragraphe suivant. Il faut au bout du compte, arriver à un ensemble qui ait la même saveur que l’original, la même sonorité. Il faut trouver les équivalences ; la littéralité, c’est l’ennemi. Tout est dans le rythme. Dans un texte littéraire, tout est dans la brièveté, dans la finesse, la légèreté, les nuances. »

Etrangement, il n’y a que très peu d’articles dans la presse spécialisée (du moins celle que je lis) sur ce métier hautement estimable qu’est la traduction. D’ailleurs les traducteurs eux-mêmes, sont carrément ignorés quand on parle d’un bouquin à la télévision ou à la radio. On n’en parle réellement qu’à l’occasion d’une nouvelle traduction d’un ouvrage très connu.

 

   

* Hors-série du Monde (février-Mars 2013) consacré à l’écrivain américain Philip Roth.

 

 

Lire la suite

François Taillandier : Balzac

François Taillandier, François Taillandier, né en 1955 à Clermont-Ferrand, est un écrivain français. Après des études de lettres, il enseigne le français à Nantes. Il quitte l'Éducation nationale, s'installe à Paris, travaille comme journaliste à Livres Hebdo, devient président de la SGDL dont il démissionne en 2006, puis se consacre entièrement à l'écriture. Son ouvrage, Balzac, est paru en 2005.

Je ne suis pas amateur de biographies en général et si j’ai fait une exception avec ce Balzac, c’est d’abord parce que le livre est très court – un paradoxe pour une vie si remplie ! – et qu’après quelques pages j’ai agréablement été pris par l’écriture au rythme soutenu faisant de cette étude un quasi roman.

Quel homme ce Balzac ! Provincial tourangeau né en 1799, Honoré de Balzac n’est ni noble, ni réellement Balzac, c’est son père né Balssa qui se bricolera cette nouvelle identité. L’enfant n’est pas très choyé par ses parents et son manque de mère le marquera pour la vie, « Je n’ai jamais eu de mère » écrit-il à Mme Hanska, par contre les maîtresses, il ne s’en prive pas. D’ailleurs il ne se prive de rien. Gros appétit pour tout, la table, les femmes et surtout le travail.

Il écrit comme un furieux, La Comédie humaine, ce sont deux milles personnages dont environ six cents reparaissent au moins une fois, dans une centaine de romans ou nouvelles. A côté du travail d’écriture, il se lance dans diverses entreprises commerciales qui toutes échouent, il doit faire face à des dettes mirobolantes, empruntant à droite et à gauche et s’acharnant plus encore au travail. On notera que Balzac a toujours été animé par le désir d’écrire dans le but de se faire de l’argent et vivre sur un grand train. Ca remet les pendules à l’heure dans le fameux débat sur les écrivains ne se consacrant à leur art que pour la beauté de la chose…

On constate aussi que Balzac a beaucoup voyagé à l’étranger mais que pour ainsi dire, seuls la province et Paris ont servi de décors à ses romans. On apprend qu’il détestait la presse mais chercha à devenir patron de journal et que ses idées politiques le portent vers « l’ordre, l’autorité, la tradition » et que « son œuvre est une critique générale de tout ce en quoi il voit l’héritage de la Révolution de 1789 ».    

Et je ne peux passer sur ses amours avec Mme Hanska. Une liaison digne d’un roman, débutée en 1834 à Genève alors qu’elle est mariée et vit en Ukraine polonaise, ils ne se voient que rarement mais il finira par l’épouser – devenue veuve - en mars 1850 avant que lui-même ne décède d’épuisement (hypertrophie du cœur, hydropisie, bronchite, ophtalmie…) dans la nuit du 18 au 19 août de la même année. Dans un dernier courrier adressé à son ami Théophile Gautier au début de l’été, il écrit « Je ne puis plus lire, ni écrire », ces quelques mots contiennent toute la douleur du monde pour celui qui aura consacré toute sa vie à l’écriture.  

 

« Il n’avait guère le temps de réfléchir. Il écrivait, pressé par le besoin d’argent, les délais des journaux, l’impatience des imprimeurs. Une centaine de romans, deux mille cinq cents personnages. Encore n’est-ce là que La Comédie humaine. Ajoutons la correspondance et ce qu’on appelle « œuvres diverses », articles, pamphlets, œuvres de jeunesse, et l’on a presque doublé la quantité. Et il trouvait le temps de voyager, de déménager pour fuir ses créanciers, de collectionner les aventures : Mme Hanska fut assurément la femme de sa vie, mais elle était à l’autre bout de l’Europe… Il lui écrivait des lettres de collégien amoureux, avant d’emmener dans son lit une nommée Breugniot qui était sa servante-maîtresse. Il mourut à cinquante et un ans, et l’on peut dire que ce fut d’épuisement. »

 

 

François Taillandier, François Taillandier   Balzac   Folio  - 190 pages –

Petit cahier photos inclus

 

 

 

 

 

 

 

 


François Taillandier : Balzac par ina

Lire la suite

Page : 1 2 3 4 5 6 7 8