30/06/2013
Dorothy M. Johnson : Contrée indienne
Dorothy Marie Johnson (1905-1984) est une écrivaine américaine. Durant une quinzaine d’années passées à travailler comme rédactrice dans des magazines féminins à New York, elle publie en parallèle des nouvelles. Après la Seconde Guerre Mondiale elle retourne vivre dans le Montana où elle avait vécu enfant, pour enseigner à l’école de journalisme de Missoula. Son œuvre a pour cadre la Conquête de l’Ouest avec ses Indiens et ses Blancs. En 1959 elle est faite membre honoraire de la tribu Blackfoot.
Recueil de onze nouvelles, Contrée indienne vient d’être réédité dans sa version complète avec les deux textes inédits jusqu’alors, L’Incroyant et Cicatrices d’honneur. Il est fort possible que vous ne connaissiez pas Dorothy M. Johnson, pourtant elle est l’auteure des nouvelles L’Homme qui tua Liberty Valence et Un homme nommé Cheval, qui nous donnèrent deux mémorables westerns éponymes. Le premier réalisé par John Ford en 1962 avec John Wayne, James Stewart et Lee Marvin, et le second réalisé par Elliot Silverstein en 1970 avec Richard Harris. Ces deux nouvelles sont incluses dans ce recueil et vous donnent une bonne idée du contenu de l’ouvrage.
Cow-boys et Indiens comme le proclamaient les comics de mon enfance, certes, mais Dorothy M. Johnson ne verse jamais dans la caricature, bien au contraire et c’est tout l’intérêt de ses textes. Indiens et Blancs ne vivent pas toujours dans l’harmonie mais l’écrivaine sait nous montrer les uns et les autres dans leur réalité « vraie » sans ostracisme ou empathie particulière. Au travers de ces nouvelles, vous pénétrerez au cœur de la vie indienne, comme ces Blancs, hommes ou femmes, capturés et faits prisonniers avant de vivre comme des indiens au sein de la tribu de leurs ravisseurs. Certains retourneront vivre avec les Blancs, d’autres resteront dans leur nouveau foyer d’accueil. Ce qui, en passant, nous vaut des passages très instructifs sur les us et coutumes de ces peuples. Ici Dorothy M. Johnson devient ethnologue et nous fait partager ses connaissances. Jamais elle ne juge ou ne s’appesantit.
Tous les textes sont extrêmement forts, reflétant la force de caractère nécessaire à ces hommes et ces femmes (ou enfants) pour vivre dans de telles conditions et le style de l’écrivaine, phrases courtes qui claquent dans le cadre court d’une nouvelle, inversement proportionnel à la puissance des sentiments exprimés, exacerbe l’émotion qui s’en dégage. Comme le dit Bertrand Tavernier « un écrivain majeur au style dense et laconique ».
Instinct de survie, courage extraordinaire pour reconstruire ce qui a été détruit, force pour aller de l’avant, des traits de caractère qui permettent de mieux cerner l’esprit de l’Américain d’aujourd’hui.
« Grand-mère chercha son souffle et murmura : - Je vais tout vous raconter. Je ne l’ai jamais dit à personne et il est temps que je le fasse. Sa bouche s’ouvrit, mais aucun son n’en sortit. Elle regarda devant elle de ses yeux embrumés et vit briller un rêve mort. Elle sut alors comment les choses auraient dû se passer, elle se rappela que ça s’était vraiment passé comme ça. Galoper la nuit, se cacher le jour, et toujours se moquer du danger. »
Dorothy M. Johnson Contrée indienne Gallmeister
Traduit de l’américain par Lili Sztajn
08:25 Publié dans NOUVELLES | Tags : dorothy m johnson | Lien permanent | Commentaires (6) | Facebook |