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10/03/2025

Robert Coover : Mascarade

robert coover, Robert Lowell Coover (1932-2024) était un écrivain américain, professeur de littérature à l'Université Brown. Il a écrit de nombreux romans et nouvelles. Robert Coover est décédé quelques jours avant la parution de Mascarade.

Au dernier étage d’un building, un penthouse dont seuls les éclairages du lieu illuminent l’immeuble. Petit à petit, l’immense appartement va se remplir d’une foule de gens venus profiter d’une soirée où boissons et nourritures sont dispensées à gogo. Les premiers arrivés sont un cuistot tenancier d’un boui-boui, sa serveuse et un type chargé du bar, ils sont chargés du service, puis trois musiciens qui ne se connaissent pas mais devant assurer l’ambiance musicale. Ils ne comprennent pas trop pourquoi ils sont là, mais on leur à promis un bon salaire. Suivront bien vite, les invités, une floppée de personnages plus incongrus les uns que les autres, qui eux aussi ne savent pas pourquoi, ni comment ils se retrouvent en ces lieux. D’ailleurs, il semble n’y avoir aucun hôte pour les accueillir… Mais c’est une promesse de fête et tout est gratuit alors…

Un roman…. Comment dire ? ….. Etonnant !?

Toujours commencer par le commencement et les basiques. Le titre du roman, un mot courant et sans mystère mais dont on relira la définition dans Le Grand Robert, « divertissement dont les participants sont déguisés et masqués » et c’est bien de cela dont il s’agit ici. Tous les personnages du roman sont tellement étranges qu’ils pourraient être grimés ou costumés, jouant des rôles fictifs ou réels, on ne sait pas, mais il y a deux types avec des chapeaux de cow-boys, des musiciens drogués, une jeune nonne avec un scapulaire et l’œil dévergondé (« Peut-être même qu’il existe une secte de nonnes-stripteaseuses. Les voies pour servir le Divin sont multiples »), et quand la soirée sera bien avancée, un barjot qui « beugle d’une voix geignarde que son sexe a disparu et précise qu’il l’avait posé quelque part et que quelqu’un s’est fait la malle avec. » Nous avons donc un ramassis de cinglés ou approchants, du sexe à l’air mais aussi des morts, un qu’on balance dans le vide « Un des musiciens que vous avez embauchés a jeté un vieil aveugle par-dessus la rambarde de votre terrasse », un autre qui se suicide par le même moyen, un qui tombe dans la cage de l’ascenseur qui ne fonctionne plus et maintient tout le monde à l’étage et d’autres encore. Vous comprenez que c’est délirant et il se passe mille autres choses encore plus farfelues au fur et à mesure que la soirée avance et devient bacchanale courant au paroxysme.

Si je n’exagérerai pas l’intérêt que j’ai porté à ce livre, c’est néanmoins un bouquin intéressant. Son gros atout, la technique narrative utilisée par Robert Coover : le roman est d’une seule pièce, pas de chapitres ni sauts de lignes, juste une mise à la ligne pour aérer le texte et surtout, il s’agit tout du long, d’un quasi monologue mené par une foule d’intervenants sans qu’aucune ponctuation particulière indique le changement de récitant. Les premières pages sont donc assez déroutantes et même quand on a saisi le procédé, il faut rester attentif et ce n’est pas facile ! Ecrire ainsi quand on a quatre-vingt-dix balais, chapeau l’artiste !

Reste la question que se pose tout lecteur un peu expérimenté, qu’y-a-t-il réellement derrière ce récit hallucinatoire ? Quelques propos glissés ici et là dans la bouche des personnages offrent des pistes, « Tout dans ce monde part en couille – on est pas dans la merde, c’est la merde intégrale » ou encore « S’il s’agissait d’une de mes histoires, j’érigerais sans doute ce penthouse en cadre mélancolique d’une métaphore universelle, l’expérience du néant, une dérive sur ou dans le noir. » En somme pour l’écrivain, le monde est devenu un sacré bordel et je vous en ai résumé la folie avec mon petit bouquin testament en abordant par la bande, des thèmes comme les pouvoirs abusifs, voire despotiques, réalité et illusion, identité…

 

 

« Une main empoigne mes fesses mais je n’essaie même pas de voir qui c’est, me contentant de siroter mon vin et de penser à cette main pendant qu’elle est encore, oh, si fugacement posée là. J’ai pris pas mal de kilos et d’années, et plus personne ne me gratifie souvent de ce genre de choses. C’est un peu à ça que servent les soirées. Le contact humain. Le plaisir rare et aveugle que ça vous procure. Je n’en loupe aucune, si je peux, sachant pertinemment que j’en ressortirai déçue, mais, c’est dans ma nature, je garde toujours espoir – espoir de quoi, cela dit, je n’en sais trop rien. »

 

 

robert coover, Robert Coover   Mascarade   Quidam éditeur  - 168 pages -  

Préfacé et traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Stéphane Vanderhaeghe

 

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