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17/05/2019

Toine Heijmans : En mer

Heijmans Livre.jpgToine Heijmans, né en 1969 à Nimègue aux Pays-Bas, est un journaliste et écrivain néerlandais. En mer, son premier roman, a obtenu le prix Médicis étranger en 2013.

Donald a pris un congé sabbatique et part seul, à bord de son voilier, pour un voyage de trois mois dans l’Atlantique et la Mer du Nord. Sa dernière étape, entre le Danemark et les Pays-Bas, il la fera avec Maria sa fille de sept ans. Un trajet de quarante-huit heures, Hagar la mère, les attendant au port. La traversée devrait bien se passer, pourtant la petite fille disparaît….

Je suis toujours admiratif quand je tombe, comme ici, sur un très bon roman aussi peu long. Pas de gras, pas de longueurs ajoutées, rien que du fruit, heu ! rien que l’essentiel mais qui touche du début jusqu’à la fin.

Dès la première phrase, le ton est donné : « Je n’avais pas vu les nuages ». Ces quelques mots nous préviennent d’un danger potentiel à l’approche mais aussi que le narrateur n’est peut-être pas un homme très prudent ou attentif. Une légère angoisse s’installe et ne va plus vraiment vous lâcher, car même si le roman ne suit pas un ordre chronologique avec des retours en arrière nombreux et apaisants, le lecteur devine et attend le drame, d’où une tension permanente.

Donald est las de sa vie de bureau, pas très friand d’une vie sociale trop envahissante, évitant les gens et critique de cette société où son job lui paraît vain. Lui-même se reconnait des faiblesses, « Je ne réfléchis jamais bien aux choses ». S’il part en mer pour s’aérer la tête, seule sa petite famille, Maria et Hagar, compte réellement pour lui. Le voyage avec sa fille, il l’a tant espéré et souhaité, craignant une opposition de sa femme. Pères et mères n’aiment ou ne comprennent pas leurs enfants de la même manière, « Les mères ne veulent pas que leurs enfants grandissent, les pères si. Les pères sont impatients que leurs enfants aient enfin l’âge de faire avec eux des trucs de pères. »

Un orage qui approche, l’enfant dort dans la cale, le père veille, ne pas dormir ou tout juste un quart d’heure. Réveil en sursaut, Maria n’est plus dans son lit, Donald inspecte tout le bateau. Il n’appelle pas les secours, mettant un point d’honneur à la retrouver tout seul – là, le lecteur s’agace, pas certain des capacités du père. Je ne vous en dis pas plus, si ce n’est que la fin est très belle avec coup de théâtre et émotions garanties.

Les acteurs sont très attachants, Donald n’est pas un héros, rien qu’un homme ordinaire avec ses faiblesses et son trop plein d’amour ; Maria une gamine débrouillarde. L’écriture est très simple mais extrêmement plaisante à lire, et mon tout donne un excellent roman !

 

« Elle a dû disparaitre pendant que je dormais. Entre trois et cinq, durant mon second quart. Elle a peut-être grimpé hors de la petite cale parce qu’elle a été effrayée par un mauvais rêve. Ca lui arrive, de faire des mauvais rêves. Elle a dû sortir de la cabine, elle a dû m’appeler, mais je n’ai pas répondu. J’étais peut-être trop occupé par la circulation maritime autour de moi. Ou par les nuages. Je dormais peut-être. Mais si elle m’a appelé, j’ai dû me réveiller. Mon sommeil n’a pas pu être profond à ce point. Je me frotte la tête des deux mains ; penser est pénible. La seule chose que je parvienne à faire, c’est délibérer avec moi-même. Je suis si fatigué ; je voudrais partir d’ici, fermer les yeux, un court instant. Ensuite ce sera fini. Tout ira bien. »

 

Heijmans.jpgToine Heijmans   En mer   Christian Bourgois Editeur – 156 pages –

Traduit du néerlandais par Danielle Losman