02/12/2024
William Lindsay Gresham : Nightmare Alley
William Lindsay Gresham (1909-1962) est un écrivain américain. Une vie marquée par la guerre, la maladie et l’alcoolisme. En quête d’apaisement spirituel, il s’est notamment tourné vers le marxisme, la psychanalyse, le tarot et le bouddhisme. Il est l’auteur de deux romans, Limbo Tower, d’un court texte sur les Gitans, Le peuple du grand chariot, et de trois essais, dont un sur Houdini. Son premier roman, Nightmare Alley (1946) qui vient d’être réédité en poche dans une nouvelle traduction, aussi connu sous le titre Le Charlatan, a fait l’objet de deux adaptations au cinéma, en 1947, avec Tyrone Power tenant le rôle principal et en 2021, réalisé par Guillermo Del Toro avec Bradley Cooper. William Lindsay Gresham s’est suicidé à New York en 1962.
Le jeune Stan Carlisle travaille dans une tournée foraine où il assiste un "geek" qui décapite en public des poulets avec ses dents. Ambitieux et décidé à ne jamais descendre aussi bas, Stan quitte la tournée et se lance dans une carrière de médium psychique, d’abord en compagnie de Molly, une jeune fille simple et naïve, puis avec le Dr Lilith, une psychologue rouée, et ensemble, ils commencent à manipuler les riches en prétendant pouvoir entrer en contact avec leurs proches disparus.
Un très bon roman.
Stan n’a qu’une idée en tête, « Je tiens à gagner de l’argent par n’importe quel moyen », et ce n’est pas avec son job de forain devant les ploucs des campagnes du Sud des Etats-Unis qu’il va y parvenir. Il va donc commencer doucement, avec Molly débauchée de la troupe, un numéro de voyance qui fonctionne assez bien, mais lui cherche le coup ultime, le gogo magnifique et plein aux as auquel il pourra pomper tout le fric nécessaire qui lui paiera une belle vie au soleil. L’étape suivante, il devient pasteur et crée l’Eglise du Divin Message qui lui ouvre les portes d’un public d’un niveau supérieur et de fil en aiguille remonte dans l’échelle sociale. Et quand son chemin croise le Dr Lilith, une psychologue aux dents longues, tous deux vont monter un scénario pour éponger un riche et puissant industriel, Grindel, torturé par un drame très ancien et qui voudrait expier son péché.
Un roman où la psychologie des uns et des autres est au cœur de l’intrigue. Tous, Stan, Molly, Grindel, sont habités par des actes anciens qui les ont perturbés psychologiquement, des actes où la sexualité a joué un rôle prépondérant. Ces troubles sont les moteurs qui font des uns des gogos et des autres des arnaqueurs. Manipulation, arnaque, Stan utilise ses compétences en psychologie pour manipuler les gens et les tromper, motivé par son désir de pouvoir et de succès, ce qui le pousse à commettre des actes répréhensibles. Et si Molly, très modeste dans ses désirs est rongée par les scrupules, de son côté, Lilith représente une force supérieure manipulant le manipulateur ! L’ascension de Stan ne pourra aboutir qu’à sa chute et sa déchéance, sa dépravation et le retour à la case départ.
Psychologie, sexualité, questions existentielles… un roman torturé qui fait écho avec la vie de son auteur.
« Les gens ont toujours envie qu’on leur prédise l’avenir et, bon Dieu, pourquoi pas. Ca les encourage, leur donne quelque chose à souhaiter, à espérer. Au fond, le prédicateur, chaque dimanche, ne fait pas autre chose. Personnellement, je ne vois guère de différence entre un prédicateur et une diseuse de bonne aventure. Nous espérons tous pour le mieux et redoutons le pire et, malheureusement, c’est le pire qui arrive le plus souvent, pourtant ça ne nous empêche pas de continuer à espérer. Quand on n’a plus d’espoir, on est bien mal barré. »
William Lindsay Gresham Nightmare Alley Folio - 458 pages -
Traduction de l’anglais (Etats-Unis) de Denise Nast, révisée par Marie-Caroline Aubert. Introduction de Nick Toshes.
« Le révérend Carlisle s’éclaircit la voix. « Madame, je me demande si vous vous rappelez ce vieil hymne splendide : « On The Other Side Of Jordan ». C’était le préféré de ma sainte mère et je serais heureux de l’entendre maintenant. – Mais certainement, je m’en souviens très bien. Il doit se trouver dans le recueil d’hymnes. » »
06:00 Publié dans Etrangers, ROMANS | Tags : william lindsay gresham | Lien permanent | Commentaires (2) | Facebook |