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13/06/2013

Jean Giono : Voyage en Italie

jean gionoJean Giono (1895 - 1970) est un écrivain et scénariste français, né et décédé à Manosque. Son œuvre comprend une trentaine de romans, des essais, des récits, des poèmes et des pièces de théâtre. Voyage en Italie est paru en 1954.

« Je ne suis pas voyageur, c’est un fait. » Ainsi débute, paradoxalement, cet essai de Jean Giono consacré à son voyage en Italie. Au cours de sa vie, Giono n’a quitté Manosque que pour de brefs séjours à Pris et quelques voyages à l’étranger dont celui-ci, entrepris en 1951. En compagnie de sa femme Elise, à bord de la 4CV Renault décapotable de ses amis Antoine et Germaine, Jean Giono se lance dans un périple qui les mènera tous les quatre à Florence en passant par Milan, Venise, Padoue et Bologne.

Quand on n’apprécie pas tellement voyager, il faut un bon motif pour partir, Jean Giono en a plusieurs. La littérature d’abord, « Il y a plus de vingt ans que je lis et relis Machiavel » et ce séjour va lui permettre de voir avec ses yeux, ce que son esprit a imaginé des lieux où vécut l’écrivain florentin. Ensuite il y a aussi ses origines familiales, son grand-père piémontais et carbonaro qu’il adorait. L’escapade a encore un autre but, plus diffus mais certain. Jean Giono est en train d’écrire son fameux roman Le Hussard sur le toit, les images et les lieux visités serviront de terreau à son imagination pour construire son héros Angelo Pardi dont le nom est inspiré de son ami Paolo Pardi, qu’il rencontrera à Padoue, « une ville propice à l’intrigue. »

Le Voyage en Italie, n’est pas à proprement parler un livre de voyage. Certes on traverse des paysages et des villes, des monuments et des lieux célèbres sont évoqués mais on sent l’écrivain réticent à s’étendre. Même Venise, à priori ne lui disait rien, « Au départ de France, je n’avais pas envie de venir à Venise : voyages de noces, gondoles, Wagner, D’Annunzio me rebutaient ainsi que les milles vues de cartes postales et de cinéma » ou encore « Je n’ai aucun goût pour les Napoule et les Capri. Le bleu exquis me fatigue ainsi que les rochers et les fleurs. »

Ce qui intéresse l’écrivain, ce sont les petites rues, les cafés, et surtout les gens qu’il y croise. L’auteur utilise le voyage comme prétexte à une sorte d’étude psychologique des Italiens et les remarques abondent, « On dit que les Italiens sont bruyants, gesticulent, c’est une calomnie anglaise » assène-t-il, péremptoire. Plus loin, « A l’inverse des peuples du Nord, quand l’Italien est heureux, il le sait. Il lui faut aussitôt faire du prosélytisme. »

Nous avons droit aussi à quelques descriptions de personnages qu’on dirait tirés de romans ou de films, le bellâtre frissonnant dès qu’une femme le frôle, le tenancier d’un petit hôtel qui cherche à l’arnaquer, le prêtre qui poursuit son sermon excité à l’extérieur de l’église, etc. Il y a là, comme des rôles secondaires vus dans ces films en noir et blanc de mon enfance, les Don Camillo ou la grande époque du cinéma italien avec Vittorio De Sica. C’est d’ailleurs là, l’un des aspects les plus intéressants de cet ouvrage pour moi.  

Jean Giono est un grand conteur mais il ne se laisse pas emballer pour autant par son sujet, loin de lui l’idée de bourrer le mou à ses lecteurs, « Que dire d’une ville qu’on a vue deux heures la nuit ? » en parlant de Bologne ou bien très humblement, dans cette région riches en œuvres picturales, « Je n’entends rien à la peinture comme d’ailleurs la plupart des gens qui ne l’avouent pas. » L’homme est simple, exceptionnellement sorti de Manosque, il ne se laisse pas éblouir pour autant. Il voyage à son rythme, « j’ai le temps ; tout mon plaisir est dans le temps que je perds », « Pour nous, l’auto n’est qu’une façon pratique d’aller à pied ».  

Le lecteur, pas pressé lui non plus, se laisse guider par ce conteur qui ne cherche pas à lui en mettre plein la vue.

 

« Il s’agit maintenant de trouver cette foire aux chevaux. Les rues qui avoisinent Sainte-Anastasie sont drôlement emboitées les unes dans les autres. Nous voilà partis en humant ; six milles bêtes doivent avoir une odeur. Rien de semblable : l’odeur d’une ville de Sud au soleil. Vérone sent le melon fait. Les seuls cavaliers qu’on rencontre sont ceux qui prennent le frais au seuil des portes en chevauchant des chaises. Finalement, nous demandons. « Il n’y a pas de foire automnale de chevaux, nous dit-on en souriant ; il n’y en a qu’une en mars ; l’autre n’est indiquée dans les gares, les hôtels, les dépliants et les affiches que pour le cas où il nous prendrait envie d’en faire deux. » »

 

 

jean gionoJean Giono  Voyage en Italie  Folio

 

13:30 Publié dans ESSAIS, VOYAGES | Tags : jean giono | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook |