30/11/2020
Dave Eggers : Les Héros de la Frontière
Dave Eggers, né en 1970 à Boston (Massachusetts), est un écrivain et scénariste américain. Il est aussi fondateur de magazines littéraires, de la maison d’édition McSweeney's et de l'école 826 Valencia de San Francisco, un organisme sans but lucratif, qui promeut l'écriture auprès des jeunes et des enseignants. Les Héros de la Frontière (2018) son dernier roman, vient d’être réédité en poche.
Josie, la quarantaine, va mal. Dentiste, elle est ruinée par une procédure judiciaire intentée par une patiente cancéreuse et vit séparée de Carl le père irresponsable de ses deux gamins, désespérée elle décide de quitter son Ohio pour un voyage en camping-car en Alaska. Un road-trip avec comme point de chute prévu, rejoindre Sam sa demi-sœur établie là-bas.
Le périple va s’avérer assez bordélique à l’image de Josie. Notre héroïne est une brave femme mais du genre impulsive, pas très carrée dans sa tête, sans plan de vie bien arrêté mais avec une seule certitude, elle doit abandonner cette vie qui l’étouffe, cet entourage trop middle of the road et surtout fuir, le plus loin possible, ses ennuis qui la rongent, son job perdu et ce poids moral trop lourd : elle s’estime responsable de la mort d’un jeune homme qu’elle a encouragé à partir en mission humanitaire avec l’armée en Afghanistan, et puis Carl qu’elle imaginera plus tard à ses trousses…
La petite troupe embarque dans un vieux camping-car brinqueballant, la mère et ses deux gosses, Ana cinq ans, extraordinairement douée pour toujours casser quelque chose même quand ça paraît impossible et Paul, huit ans, sage et sérieux comme un pape, à cheval sur les règlements et les lois, veillant sans relâche sur sa cadette qui l’adore. Je passe rapidement sur les étapes de ce voyage, imprévues ou pas comme ce spectacle de magiciens sur un navire, un mariage mennonite, les nuits dans des cabanes squattées, la rencontre avec Sam décevante, l’incendie de forêt etc. J’avoue que souvent Josie m’a agacé par ses actes irréfléchis, usant ma complaisance mais j’ai adoré ses gamins en particulier Paul, contraste saisissant entre son caractère très mûr pour son âge face à celui de sa mère.
Le roman est correct mais sans plus pour moi. Il est surtout trop long, tous les évènements sont sympathiques, mêlés à une critique de la société américaine et de consommation, mais comment dire ? Ca fait un peu patchwork, l’écrivain les enfile les uns après les autres, on se demande où il veut en venir et il faut de la patience pour que se dessine l’idée maîtresse : être une femme libérée c’est pas si facile surtout quand on veut éduquer ses enfants d’une façon légèrement marginale basée sur le credo que « sans mouvement il n’y a pas de lutte, et sans lutte il n’y a pas de but, et sans but il n’y a rien du tout. »
Le dénouement, restant ouvert, est très beau : nos trois acteurs réchappent d’un orage épouvantable en montagne, la mère et ses enfants, nus comme aux premiers jours de l’humanité mais saufs… et après ?
« « Je ne sais pas », dit-elle à Paul. Elle ne pouvait pas promettre qu’elle ne le ferait plus jamais. Elle n’en savait rien. La musique ne lui était plus nécessaire, mais elle avait besoin de faire autre chose, de voir autre chose, et de rendre ses enfants plus courageux et plus forts en allant ailleurs. Elle ne pouvait rien promettre de ce qu’elle voudrait faire ou voir à l’avenir, et elle espérait que ses enfants lui pardonneraient cette absence de certitude, cette question jamais réglée dans leur vie, ce ciel sans limites qui avait le pouvoir de les rendre intrépides, totalement invincibles, ou de les paralyser de peur. »
Dave Eggers Les Héros de la Frontière Folio – 497 pages –
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Juliette Bourdin
07:00 Publié dans Etrangers | Tags : dave eggers | Lien permanent | Commentaires (4) | Facebook |
Commentaires
Coucou,
J'ai bien reçu ton mail, mais impossible d'y répondre (j'avais un message de rejet), alors je le fais ici... Donc non, en effet, je ne l'ai pas lu. J'avais en revanche noté ce titre suite à un avis très enthousiaste de Marie-Claude, et c'est donc avec intérêt que je découvre aujourd'hui le tien. Je n'avais pas fait de cette lecture une priorité, j'attendrai sans doute encore un peu, vu ta tiédeur.
Rien à voir mais j'ai commencé Le chant de la mutilation, et je peine beaucoup, alors que je n'en suis qu'à une petite cinquantaine de pages ; j'hésite même à jeter l'éponge. Je ne sais pas si tu l'as commencé de ton côté, mais c'est très particulier (cela ressemble pas mal à du Evenson, mais le Evenson que je n'aime pas, avec une écriture beaucoup plus soignée..).
Bon début de semaine !
Écrit par : Ingannmic | 30/11/2020
J’ai lu et écrit mon billet pour le « Chant de la mutilation » et j’attendais avec une ENORME impatience ta réaction ! Si tu veux abandonner cette lecture commune, préviens-moi que je fasse paraître mon billet. PS : je comprends très bien ta réaction !!!!!
PPS : teasing d’enfer pour ceux qui lisent nos 2 commentaires
A bientôt.
Écrit par : Le Bouquineur | 30/11/2020
J'ai essayé de continuer mais le cœur n'y est pas (et il faut dire qu'entre-temps j'ai commencé un autre livre qui me happe bien davantage), donc j'arrête, désolée de te faire faux bond...
Je suis impatiente de lire ton avis...
Écrit par : Ingannmic | 30/11/2020
Il n’y a pas de problème….. Par contre je maintiendrai la date convenue entre nous pour la parution de mon billet car j’en ai plusieurs autres déjà prêts.
Écrit par : Le Bouquineur | 01/12/2020
Les commentaires sont fermés.