29/08/2022
Javier Cercas : Indépendance
Javier Cercas Mena, né en 1962 à Ibahernando, dans la province de Cáceres, est un écrivain et traducteur espagnol. Il est également chroniqueur du journal El País. Indépendance, son dernier roman sorti au printemps est le deuxième volet après Terra Alta de la série Melchor Marin.
Quand la maire de Barcelone est victime d’un chantage à la sextape, son ami de la police de Barcelone vient quémander l’aide de Melchor Marin qui pensait vivre peinard dans sa région isolée de la Terra Alta. Il commence par refuser puis se laisse convaincre à contre-cœur. Commence une descente répugnante dans les poubelles du pouvoir et de l’âme humaine…
Un très bon roman mais qui, pour les amateurs de polars basiques, est extrêmement bavard. D’ailleurs avec Cercas je ne pense pas qu’il faille parler d’auteur de polars, mais d’un écrivain d’un bon niveau écrivant de la littérature teintée des couleurs du roman policier. L’écriture ne souffre d’aucun défaut et j’ai apprécié les conversations mêlées sur quelques pages en fin d’épilogue, le texte est dense, touffu, plein de détails et digressions qui pourront agacer certains mais qui font néanmoins la qualité du roman.
Je ne vais pas entrer dans les sinuosités de l’intrigue, disons pour faire simple que le plan général adopté par l’auteur peut se résumer ainsi : un premier cercle étroit, au centre, correspond au polar avec son enquête, ses suspects etc. ; le second cercle plus large concerne la situation politique en Catalogne et les évènements de ces dernières années poussant à l’indépendance ; un troisième cercle dit tout le « bien » (euphémisme) que pense Cercas de la politique en général ; et le dernier cercle, chapeautant le tout, dénonce les travers humains, ici les fils à papa de la bourgeoisie, la vengeance, la soif de pouvoir. Vous commencez à comprendre pourquoi le livre est dense.
Incorrigible bavard, Javier Cercas n’en reste pas là ! Parmi les faits les plus notables, il y a son amour pour la littérature qu’il nous fait partager par Melchor interposé, références aux classiques et plus gonflé, il cite maintes fois dans ce bouquin, son titre précédent Terra Alta ! Une délicieuse mise en abîme.
Le livre a fait grincer des dents à sa sortie en Catalogne et on le comprend aisément quand on lit : « Des indépendantistes, en Catalogne, il y en a depuis un siècle : des gens avec beaucoup de cœur et peu de tête » ou encore, « Puigdemont, un moins que rien de province, qui n’avait rien à faire là… ». A ce propos, s’il n’est pas nécessaire d’être un fin connaisseur des évènements politiques qui se sont passés en Catalogne il y a une dizaine d’années pour lire ce roman, il y a des subtilités qui échapperont certainement à certains d’entre nous.
Enfin, pour ceux qui ont lu le premier volet, l’assassinat non élucidé de la mère prostituée de Melchor parait avoir trouvé son épilogue.
« Mon père disait que la Catalogne a toujours été entre les mains d’une poignée de familles. Ce sont elles qui décidaient de tout avant le franquisme, qui ont décidé de tout pendant le franquisme, qui ont décidé de tout après le franquisme, et qui décideront de tout quand toi et moi on sera morts et enterrés… L’argent, c’est une chose magique, une chose immortelle et transcendante. L’argent c’est dément. C’est quelque chose de plus fort que le pouvoir, parce que le pouvoir en dépend. »
Javier Cercas Indépendance Actes Sud - 340 pages -
Traduit de l’espagnol par Aleksandar Grujičić et Karine Louesdon
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