24/04/2023
Nicolas Gogol : Taras Boulba
Nicolas Vassilievitch Gogol (1809-1852) est un romancier, nouvelliste, dramaturge, poète et critique littéraire considéré comme l'un des écrivains classiques de la littérature russe.
Une première version de Taras Boulba est parue en janvier 1835, elle fait alors partie du recueil Mirgorod. La version beaucoup plus étoffée publiée seule en 1843 et proposée ici constitue le texte définitif. Un roman historique mais une Histoire avec laquelle Gogol prend néanmoins des libertés.
Taras Boulba est un colonel cosaque zaporogue. Les Cosaques zaporogues ou simplement Zaporogues sont des Cosaques qui vivaient au-delà des rapides du Dniepr, dans la région historique de l'Ukraine centrale dénommée Zaporoguie. Ses deux fils, Ostap l’ainé, le batailleur et André le plus doux, ont fait des études à Kiev et à leur retour, leur père souhaite compléter leur éducation par ce qu’il considère plus essentiel, le métier des armes. Ils partent tous les trois avec quelques hommes rejoindre le centre névralgique de l’état cosaque, sur les bords du Dniepr. Ces cosaques ont une mission divine, défendre leur foi orthodoxe et « battre les infidèles, Turcs et Tatars aussi bien ; et quand les Polonais voudront aussi s’en prendre à notre foi, qu’il vous accorde également de battre les Polonais ! »
En dépit d’accords de paix entre ces peuples, les Cosaques partent en guerre et Taras Boulba rêve de voir ses fils briller par leurs exploits. L’issue de cette épopée sera dramatique, André par amour pour une belle Polonaise va trahir les siens et périra de la main de son père, humilié ; Ostap, fait prisonnier et supplicié meurt sous les yeux de son géniteur ; Taras Boulba lui-même y laissera la vie sur un bûcher mais il meurt satisfait, les rescapés de son peuple de s’avouant pas vaincus, pronostiquant une vengeance à l’égard de ses ennemis : «Patience, le temps viendra, oui, il viendra, ce temps où vous apprendrez à connaître la foi russe orthodoxe ! (…) Il n’est pas de force au monde qui ne doive un jour lui apporter sa soumission ! »
Un très bon roman d’action, alerte et enlevé. On peut le lire d’une traite sans trop s’arrêter sur les détails historiques complexes liés à cette zone de l’Europe centrale qui a toujours été très « remuante » ou bien, si on est plus curieux, prolonger cette lecture par de rapides recherches sur Internet pour élargir sa culture.
Si l’écriture sonne très moderne (traduction ?) et en facilite la lecture, le lecteur d’aujourd’hui risque de tiquer devant les propos antisémites des protagonistes où tous les clichés du genre s’affichent (« Il rougit de sa cupidité et s’efforça d’étouffer en son cœur l’éternelle hantise de l’argent qui, comme un ver, ronge l’âme du Juif. » Roman troublant aussi car il semble y condenser une partie des problèmes internationaux actuels : violences ayant la religion pour base, zone géographique en ébullition (Ukraine)…
« Taras était un colonel de la vieille roche. Il était bâti pour le branle-bas de combat et se distinguait par la rude franchise de son naturel. C’était l’époque où les influences polonaises commençaient déjà à agir sur la noblesse russe. On imitait les usages polonais, on s’habituait à un train de vie luxueux, on entretenait une somptueuse domesticité, des faucons, des veneurs, on offrait des banquets, on s’entourait d’une cour. Taras, lui, voyait cela d’un mauvais œil. Il aimait la simplicité de la vie cosaque, et s’était brouillé avec à peu à peu avec tous ceux de ses compagnons qui penchaient du côté de Varsovie et qu’il traitait de valets des seigneurs polonais. Toujours sur la brèche, il se considérait comme le défenseur attitré de l’orthodoxie. »
Nicolas Gogol Taras Boulba Galimard La Pléiade Œuvres complètes - 137 pages -
Traduction par Michel Aucouturier
07:00 Publié dans Etrangers, ROMANS, XIXe siècle | Tags : gogol | Lien permanent | Commentaires (2) | Facebook |
Commentaires
Ah oui je l'ai lu celui-là, il n'y a pas si longtemps... voici ma conclusion :
"On peut reprocher à ce court récit un certain manque de subtilité, et un traitement un peu expéditif de certains aspects de son intrigue, l'auteur se focalisant sur la mise en évidence des traits les plus remarquables des cosaques, aux dépens d'épisodes secondaires qui, plus développés, aurait pu rendre son texte plus dense, et moins caricatural. "Tarass Boulba" est néanmoins l'occasion d'une incursion plaisante, car épique et aventureuse, au cœur de l'univers -personnellement méconnu pour moi-, des zaporogues.
Écrit par : Ingannmic | 24/04/2023
Rien à redire à ton commentaire !
Les défauts du récit peuvent s’expliquer en partie par le fait qu’au départ il s’agissait d’une nouvelle que Gogol a ensuite développée pour en faire un livre. En entrant plus dans les détails pour étoffer son ouvrage et combler ce qui semble manquer, le livre aurait peut-être été trop long et un peu « chiant » à lire…. Je préfère qu’il en soit resté à ce récit « caricatural ».
Écrit par : Le Bouquineur | 24/04/2023
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