Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

28/04/2025

Gabrielle Wittkop : La Mort de C.

gabrielle wittkop, Gabrielle Wittkop née Gabrielle Ménardeau (1920-2002), est une femme de lettres française et traductrice. Elle est l'auteure d'une littérature dérangeante, macabre, bien souvent au-delà de toute morale. Son style, ainsi que ses centres d'intérêt (thanatos, sexe, identité de genre, étrangeté) apparentent son œuvre à celles du Marquis de Sade, de Villiers de L'Isle Adam, de Lautréamont ou d'Edgar Allan Poe. Elle rencontre dans le Paris sous occupation nazie un déserteur allemand homosexuel, essayiste, du nom de Justus Wittkop, âgé de vingt ans de plus qu'elle. Ils se marient à la fin de la guerre, union qu'elle qualifiera « d'alliance intellectuelle », elle-même affichant à diverses reprises son homosexualité. Le couple s'installe en Allemagne où Gabrielle Wittkop vivra jusqu'à sa mort « en homme libre » d’un probable suicide (?) atteinte d’un cancer au poumon.

Il y a de bons livres, voire de très bons, et puis il y a la Littérature, celle de Gabrielle Wittkop comme à nouveau avec ce livre, La Mort de C. suivi de Le Puritain passionné (1975) qui vient d’être réédité.

Le premier texte, La Mort de C. nous entraine à Bombay en Inde où Gabrielle Wittkop a vécu. C. est un anglais dans la force de l’âge, homosexuel et poète, « il faisait de sa vie une savante préparation à sa mort ». Et sa mort sera dramatique et sordide, de ce qu’on en saura il a été poignardé au foie et agonisera six jours à l’hôpital. Quant aux conditions de l’assassinat, l’écrivaine nous en donne plusieurs versions, des mendiants qui l’agressent sortant d’une soirée éméchée chez des amis, piégé par un jeune prostitué homosexuel et ses deux complices pour lui voler montre de prix et argent, victime d’un jaloux l’ayant surpris en situation compromettante avec son amant… Gabrielle Wittkop nous interroge, que sait-on de la mort de quelqu’un ? Et ce meurtre, ne serait-il pas une forme de suicide inconscient ? « C. pense à son assassin sans haine, sans amertume. Il pense à lui incidemment et presque avec bienveillance. Suicide par procuration. »

Avec Le Puritain passionné, Denis, « cet homme qui se croyait libre de toutes les sensualités sacrifiait constamment à la pire d’entre elles, celle de l’imagination ». Une éducation rigide lui a inculqué que tout était péché, une vie de solitude assumée et de chasteté « par raison et par penchant, jusqu’au jour où le dégoût du sexe se fut fermement installé en lui. » Et puis il va connaitre une passion dévorante… pour un tigre du zoo de Vincennes ! L’écrivaine nous propose un jeu de miroirs, Denis écrit un roman dont un certain Mathieu, manant sous Louis XVI, lui ressemble (« Aussi Mathieu sera-t-il pareil à moi, rejeté, rejeté, rejeté… »), ses souvenirs de jeunesse avec sa cousine Blanche, prude perverse qui tétanise Denis avec ses blasphèmes perpétuels réservés à lui seul, et puis ce tigre, fascinant, attirant, une passion poussée à son comble, le tigre ne pouvant lui appartenir, Denis lui appartiendra et il se prépare à s’offrir en victime consentante…

Ces deux textes se renvoient deux questions opposées et complémentaires : qu’est-ce que la mort ? dans le premier. Qu’est-ce que la vie ? dans le second.

L’écriture de l’auteure est magnifique, je l’ai signalé à chacun de ses livres chroniqués, elle atteint et nous porte à des sommets rarement atteints grâce à sa langue sublime, terrain fertile pour qu’y éclosent les mots rares (« ses murs chancis de briques » ; « des rues squalides »).

Il faut lire Gabrielle Wittkop, c’est impératif.

 

« Depuis quelque temps, C. perdait pied chaque jour davantage, sa vie s’amenuisait. Il pensait souvent à son premier voyage en Inde, plusieurs années auparavant, savait qu’il lui faudrait retourner là-bas, que là-bas devait s’accomplir ce que lui-même refusait d’accomplir de ses propres mains. L’occasion s’est présentée, ne pouvant manquer de le faire. »

 

gabrielle wittkop, Gabrielle Wittkop   La Mort de C. suivi de Le Puritain passionné   Gallimard L’Imaginaire  - 165 pages -    

Commentaires

Il y a très longtemps, j'ai lu un texte très particulier de Gabrielle Wittkop. il s'agit du Nécrophile. Je n'ai pas réitéré l'expérience avec cette autrice depuis cette lecture.

Écrit par : je lis je blogue | 28/04/2025

Répondre à ce commentaire

Je trouve que ce livre est le plus représentatif de son art, le sujet est particulièrement obscène (?) mais c’est tellement bien écrit qu’on peut le lire sans être choqué. C’est mon avis mais chacun réagit selon ses humeurs….

Écrit par : Le Bouquineur | 28/04/2025

J'ai essayé de la lire mais j'ai abandonné... Je ne me souviens plus avec quel titre...

Écrit par : Ingannmic | 28/04/2025

Répondre à ce commentaire

Je retiens le point positif, tu as essayé ! Après, les goûts et les couleurs…

Écrit par : Le Bouquineur | 28/04/2025

Écrire un commentaire