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15/05/2025

James Lee Burke : Jésus prend la mer

James Lee Burke, James Lee Burke, né en 1936 à Houston au Texas, est un écrivain américain de romans policiers, il est particulièrement connu pour sa série mettant en scène Dave Robicheaux. Issu d'une famille pauvre, son père est ouvrier dans une raffinerie, pendant la Seconde Guerre mondiale il fréquente l'école catholique où il se découvre une vocation d'écrivain. Après des études à l'Université de Louisiane du Sud-ouest ainsi qu’à l’Université du Missouri, il sort diplômé dans les domaines de la littérature et du journalisme. Après l'université, Burke a pratiqué plusieurs métiers, ouvrier du pétrole, routier, journaliste, assistant social, garde forestier, topographe, enseignant d'anglais. Actuellement Burke et sa femme Pearl partagent leur temps entre le Montana et la Louisiane. Leur fille, Alafair Burke, est également autrice de romans policiers.

Jésus prend la mer est un recueil de neuf nouvelles écrites entre 1990 et 2007 qui vient d’être réédité dans le cadre d’une opération menée par l’éditeur qui a demandé à François Guérif, spécialiste du roman noir qu’on ne présente plus, de choisir onze titres « iconiques » du fond, ses coups de cœur personnels. Autant vous dire que c’est excellent !

Tous ces textes sentent le vécu et leur part autobiographique est certainement très importante ce qui ajoute un poids moral à la beauté de ces récits le plus souvent poignants. Globalement nous sommes entre Montana ou Texas, un peu, et Louisiane beaucoup, dans les années 40’ ou 50’ et l’écho du monde nous arrive par bribes semées ici ou là, « C’est à la même époque que nous avons appris que les Russes disposaient de l’arme atomique. »

Quand vous lirez ces nouvelles, car ceux qui ne l’ont pas encore fait doivent impérativement le faire, vous croiserez : un professeur retraité qui déteste les chasseurs et en particulier ceux venus aux abords de son ranch dont il va vouloir se venger ; deux copains qui ont fait la Guerre du Pacifique et maintenant sont musiciens dans un groupe de rock ‘n roll qui vont connaitre les galères et être séparés par une chanteuse sexy ; des hommes qui bossent durement sur une barge de forage pétrolier en Louisiane hantés par leurs souvenirs de guerre, « C’est ça, la guerre, j’ai relativisé. On est parfois obligé de faire des trucs moches » ; Lisa, veuve d’un époux tué durant la guerre en Irak, qui se noie dans la drogue et l’alcool [Brume] ; Albert, universitaire, retraité vivait peinard dans son ranch du Montana jusqu’à l’arrivée de trois bikers… ; plusieurs textes ont un gamin en personnage central, persécuté par un jeune voisin plus costaud, jeune frappe en devenir. La dernière nouvelle qui donne son titre au recueil nous mène à La Nouvelle Orléans au moment de l’ouragan Katrina, deux amis sont bloqués sur le toit d’une maison cernée par les flots, « Ce matin j’ai vu le curé passer à la surface de l’eau devant la cime d’un chêne vert. Il était sur le ventre, la soutane gonflée d’air, les bras étendus le long du corps comme s’il cherchait quelque chose en bas dans l’arbre. » [Jésus prend la mer]

Des hommes et des femmes des classes sociales les moins favorisées dans leur quotidien, confrontés à des emmerdements permanents et des problèmes psychologiques lourds, le « rêve américain » est inconnu à cette adresse.

L’écriture est d’une douceur enveloppante mais chargée de souffrances. Les personnages se trimballent le poids de fautes passées, des traumatismes de guerres, des colères gardées enfouies et cherchent à obtenir le pardon. L’écrivain n’en fait pas des tartines, ce n’est que par ellipses ou au détour d’une phrase qu’on apprend ou devine des évènements antérieurs, « tous les braves gens ont chacun leur fardeau ». Je n’ai cité le titre que de deux nouvelles car pour moi les deux plus belles, les plus poignantes, mais les autres sont tout aussi excellentes.  

 

« Albert a appris que certaines blessures sont profondément enracinées dans l’âme, à la manière d’un durillon, et que le temps ne les guérit pas. Il sait que la créature simiesque qui se cachait sous les traits du gardien et du bourreau est née en lui il y a de nombreuses années. Il sait que, le cas échéant, Albert Hollister est capable d’actes qu’on n’attendrait jamais de la part de celui qui animait des ateliers d’écriture à l’université et dont la présence lors des réunions des professeurs était si discrète que personne ne s’en souvenait. » [Une saison de regret]

 

James Lee Burke, James Lee Burke   Une Cathédrale à soi   Rivages/Noir  - 213 pages - 

Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Olivier Deparis

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