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26/07/2017

Magda Szabo : La Porte

magda szaboMagda Szabo (1917-2007) est une écrivaine, auteure de livres pour enfants et poétesse hongroise. Née dans une famille cultivée de la grande bourgeoisie protestante, elle finit ses études de hongrois et de latin à l'université de Debrecen en 1940 et commence à enseigner dans sa ville natale. A partir de 1945, elle est employée par le ministère de la Religion et de l'Education jusqu'à son licenciement en 1949. En 1947, elle se marie avec l'écrivain Tibor Szobotka (1913-1982). Elle écrit ses premiers recueils de poèmes et ses premiers livres paraissent peu après la Seconde Guerre mondiale. Puis s'ensuit, pour des raisons politiques, dans la dernière période du stalinisme, un long silence littéraire, rompu seulement vers la fin des années 1950, où elle connaît alors un grand succès. La Porte, paru en 1987, a été traduit en France en 2003.

A Budapest, un couple d’intellectuels engage une femme de ménage pour tenir leur maison. Mais la situation, a priori anodine, va s’avérer particulièrement plus complexe que prévue…

D’emblée la narratrice, Magda (qui pourrait être l’auteure tant elle présente de similitudes avec elle) avoue « il faut que je le dise : c’est moi qui ai tué Emerence. » Ecartons vite fait l’idée qui vous vient en tête, ce n’est pas un polar, s’il y a décès il n’y a pas crime. Le roman est en fait, une longue confession retraçant les vingt années où Emerence, la domestique, restera au service du couple, jusqu’à sa mort.

Emerence est une vieille femme encore très énergique, concierge dans un immeuble proche, elle régente le quartier tout en menant une vie très secrète dans son logement interdit d’entrée à tous ou presque. Et pour dire la vérité, ce n’est pas Magda qui engage Emerence, c’est Emerence qui choisit le couple pour travailler chez eux durant ses temps libres ! Et la bignole a un sacré caractère. Ca pouvait faire un bouquin rigolo mais convenu, Magda Szabo en fait un roman psychologique puissant et émouvant.

Tout le livre est centré sur la relation évolutive entre Magda et Emerence. Tout les oppose, leurs origines sociales et leurs comportements induits ; leurs caractères aussi, une sorte de faiblesse conciliatrice chez Magda, une force de convictions chez Emerence. Emerence sait tout de ses employeurs, entrant et sortant de chez eux à sa guise, quand Magda ne sait rien du passé ni même du présent d’Emerence. Lentement des ouvertures vont se créer, une amitié très particulière va se créer entre les deux femmes : simple et compréhensible immédiatement pour le lecteur en ce qui concerne Magda, plus mystérieuse et secrète pour Emerence, au fur et à mesure des révélations distillées au compte-goutte par le récit.

Des révélations personnelles qui se mêlent par de petits détails à l’histoire de la Hongrie et du monde du siècle passé. Engueulades, bouderies, rabibochages discrets exempts de mièvrerie, entre les deux femmes, ce ne sont que montagnes russes sentimentales. L’auteure introduisant habilement dans son récit un acteur pittoresque, à savoir un chien (Viola) sorte de trait d’union entre les deux mais résumant bien la situation, il appartient à Magda mais il n’obéit qu’à Emerence !

Deux caractères de femmes, Magda l’intellectuelle éduquée, bonne et compatissante mais aussi marquée par les idées reçues ou conventionnelles, Emerence, forte tête, animée d’une volonté farouche et pragmatique, réfractaire aux dogmes (religieux ou autres). Quand in fine, Magda voudra faire le bonheur d’Emerence contre sa volonté, elle se heurtera à la dramatique réalité de la vie.

Un très beau et très touchant roman que je conseille à tous.

 

« - Je vous en prie, ne le prenez pas à la légère, elle n’a pas l’habitude de plaisanter, quand elle a déclaré quelque chose, on ne peut plus la faire changer d’avis. Aujourd’hui, elle a décidé de ne plus revenir chez vous, elle ne m’a pas dit ce qui l’a vexée, j’ai depuis longtemps renoncé à la comprendre, sans parler de lui faire entendre raison, c’est impossible. Elle ne comprend rien au monde d’aujourd’hui, elle se méprend sur le sens du moindre geste, le jour où j’ai voulu lui expliquer l’importance du partage des terres, elle m’a giflé en criant que ce qui s’était passé en 45 ne l’intéressait pas, qu’elle n’avait rien perdu ni gagné aux changements. N’essayez jamais de la convaincre… »

 

magda szaboMagda Szabo  La Porte  Viviane Hamy – 277 pages –

Traduit du hongrois par Chantal Philippe

 

 

 

 

 

 

 

07:38 Publié dans Etrangers | Tags : magda szabo | Lien permanent | Commentaires (4) |  Facebook |