René Barjavel : La Nuit des temps

René Barjavel (1911-1985), est un écrivain et journaliste français, également scénariste et dialoguiste de cinéma. Il est principalement connu pour ses romans d'anticipation, de science-fiction ou fantastiques dans lesquels s'exprime l'angoisse ressentie devant une technologie que l'être humain ne maîtrise plus. La Nuit des temps est un roman paru en 1968.

Une mission scientifique française en Antarctique détecte un son provenant de plusieurs centaines de mètres sous la couche de glace, en focalisant leurs recherches sur ce signal et par déductions, les scientifiques constatent qu’une « architecture titanesque » repose à une grande profondeur. L’ampleur de leur découverte les amène à demander la collaboration des scientifiques du monde entier pour une mission devenue internationale.

La première partie du roman est vraiment très bien car très mystérieuse. Quand les scientifique parviendront jusqu’à la structure, il s’avèrera qu’elle a la forme d’un énorme œuf en or et qu’à l’intérieur - tenez-vous bien – deux corps y reposent : une femme et un homme, jeunes, nus et très beaux, congelés ! Les divers examens maintes fois répétés de ce qu’ils viennent de découvrir sont formels, la construction et ce couple sont là depuis 900 000 ans !

La suite devient plus classique, condensé rapide : la jeune femme, Eléa, est réveillée la première et va expliquer ce qui s’est passé, une guerre épouvantable qui anéantit l’humanité, un homme Coban, savant d’une extraordinaire intelligence qui a créé « l’énergie universelle » et l’a formulée en équation, a imaginé l’œuf pour s’y réfugier avec Eléa, sélectionnée pour ses qualités, afin de repeupler la Terre quand tout aura disparu. Cette partie du livre est partagée entre passages vraiment nunuches (Eléa est amoureuse de Païkan et s’enfuie avec lui) et scènes d’action (la guerre) avec in fine un dilemme dans les derniers instants de la guerre, Coban conjure Païkan de lui livrer Eléa, ou bien elle vit avec Coban dans son œuf, ou bien elle meurt libre avec Païkan (« Hors de l’Abri, c’est la mort dans quelques jours, peut-être dans quelques heures. Que préférez-vous ? Qu’elle vive sans vous, ou qu’elle meurt avec vous ? »). L’intrigue est compliquée au présent par la manœuvre d’un pays cherchant à « voler » le corps de Coban pour lui faire révéler l’ensemble de ses connaissances et s’octroyer un pouvoir phénoménal, ainsi que par (autre nunucherie) l’amour que le Dr Simon porte à Eléa…

J’avais lu ce bouquin à la fin des années 60 et dans mon maigre souvenir, je n’avais retenu que Barjavel était un gentil écrivain trop gentil pour moi et j’en étais resté là. Soixante ans plus tard, mon impression s’est logiquement aggravée car le texte est devenu très daté. L’ouvrage continue pourtant à très bien se vendre et en faire un succès populaire.

Derrière le texte on retrouve les idées des années 60 : l’opposition politique entre l’Ouest et l’Est ou bien les grandes manifestations étudiantes anti-guerres… idées guères différentes de celles de nos jours, et je ne sais pas vraiment ce que voulait démontrer Barjavel mais moi j’en tire une morale pessimiste comme l’un des personnages du bouquin : « Ils ont repeuplé le monde, et ils sont aussi cons qu’avant, et prêts à faire de nouveau sauter la baraque. C’est pas beau, ça ? C’est l’homme ! »

 

« - Mes enfants, dit Grey d’une voix blanche, là… il y a là… Il tenait dans sa main gauche un papier qui tremblait. Il se tut, se racla la gorge. Sa voix ne voulait plus sortir. Il frappait l’écran avec son feuillet qui se froissait. Il avala sa salive, il éclata : - Bon Dieu, merde ! C’est de la folie ! Mais ça existe ! Les quatre sondeurs peuvent pas déconner tous les quatre ! Non seulement il y a là les ruines de je ne sais quoi, mais au milieu de cette caillasse, là, à cet endroit-là, juste là, il y a un émetteur d’ultra-sons qui fonctionne ! »

 

 

René Barjavel   La Nuit des temps   Pocket  - 410 pages -